Entretiens sur l'éducation : historique du journal

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Des dangers que court la foi de nos enfants (suite)

Les objections qui auront surgi devant nos enfants, seront peut-être de l'ordre de la critique. Nous devrons ne pas être entièrement étrangers à l'influence exercée par cette science sur la conception générale de la Bible sans admettre nécessairement tous les points de vue dits modernes, nous ne refuserons pas à la révélation son caractère progressif, nous ne confondrons pas les questions littéraires et les questions religieuses, nous laisserons le champ libre aux discussions relatives aux auteurs, à la date des livres sacrés, etc.

Ces objections pourront relever du domaine philosophique ou scientifique, ou du domaine spécifiquement religieux. Il n'est pas possible d'indiquer alors une méthode générale. Tout dépendra de la nature spéciale de l'objection. Faisons auprès de nos enfants la part légitime du besoin de comprendre; si nos facultés ont leurs limites nécessaires et naturelles, plaçons ces limites au bon endroit, et n'affirmons pas mal à propos, cette vérité d'ailleurs si vraie, qu'il faut savoir accepter de ne pas comprendre. Ne parlons pas mal de la science, nous ne ferions que du mal; relevons-en au contraire la valeur tout en affirmant ses limites; rappelons l'existence de savants croyants. Les jeunes gens traversent presque tous une phase d'intellectualisme; ils veulent raisonner et ne comprennent que le raisonnement; l'intelligence est à leurs yeux la faculté maîtresse, et ils la considèrent comme l'unique route qui mène à la vérité. Plus tard ils expérimentent que tout n'est pas esprit en l'homme; ils conçoivent l'importance et le rôle des facultés de l'ordre moral, et admettent des certitudes qui ne reposent pas sur l'activité intellectuelle, mais sur l'expérience morale.

Nous insisterons alors sur la notion du devoir et de l'obligation morale: à moins d'être positivement corrompus, nos enfants en comprennent la valeur et y tiennent. D'un côté cette notion nous donne le droit de repousser les doctrines qui aboutissent à nier le devoir (déterminisme, matérialisme); de l'autre en partant de cette base, la vérité évangélique peut être édifiée plus solidement que sur des raisonnements logiques. Nous renvoyons ici le lecteur à la belle page dans laquelle le célèbre prédicateur Robertson expose ses propres expériences:

"C'est un moment terrible que celui où l'âme s'aperçoit que les appuis sur lesquels elle s'était aveuglément reposée jusque-là sont des appuis illusoires; quand elle commence à sentir le néant de la plupart des opinions traditionnelles qu'elle avait adoptées avec une confiance implicite, et que, dans l'affreuse incertitude qui l'envahit, elle se demande s'il y a encore quelque chose de vrai. C'est une heure terrible (celui-là seul qui l'a traversée en connaît l'amère tristesse), que celle où la vie a perdu sa signification et semble se réduire à rien, où la vertu n'est plus qu'un nom, où la tombe nous apparaît comme la fin de toutes choses et le ciel comme un espace vide et morne d'où Dieu lui-même a disparu. Dans cette solitude effrayante de l'âme, quand ceux qui devraient être nos amis et nos conseillers n'ont pour nous que des paroles de blâme et nous donnent le profane conseil d'étouffer des doutes qui pourraient bien provenir de la source même de la vérité, et d'éteindre comme une suggestion infernale ce qui pourrait bien être une lumière venue du ciel; quand tout est enveloppé d'une affreuse incertitude, je ne connais qu'un moyen de sortir sain et sauf de cette agonie, c'est de retenir fermement les points qu'il est impossible de contester, les grands et simples axiomes de la morale. Dans l'heure la plus sombre par laquelle une âme d'homme puisse passer, quand tout le reste serait remis en question, une chose demeure certaine: à supposer même qu'il n'y eût point de Dieu, et point de vie future, même alors, il vaut mieux être généreux qu'égoïste, il vaut mieux être chaste qu'impur, il vaut mieux être sincère que faux, il vaut mieux être courageux que lâche. Heureux au-delà de toute félicité terrestre, celui qui, dans les plus sombres tempêtes de l'âme, a su retenir fermement ces principes sacrés ! Trois fois heureux celui qui, alors que tout est sombre et désolé en lui et hors de lui, quand ses maîtres l'épouvantent et que ses amis l'abandonnent, s'attache obstinément au bien moral ! Trois fois heureux, car à la nuit qui l'enveloppe succédera la pure et brillante lumière du jour. J'en appelle aux souvenirs de l'homme, quel qu'il soit, qui a traversé cette heure d'angoisse et qui finalement s'est retrouvé debout sur le roc, les flots apaisés au-dessous de lui, le dernier nuage balayé du ciel au-dessus de sa tête, en possession d'une foi, d'une espérance, d'une confiance, non plus traditionnelles, mais lui appartenant en propre, une confiance que ni la terre ni l'enfer ne pourront plus ébranler".

(A suivre).

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