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La liberté de l'enfant

Fillette descendait l'escalier. Dans ses bras elle portait la superbe poupée qu'elle avait reçue à Noël.

- Maman, veux-tu, s'il te plaît, lui ôter ses habits? dit l'enfant, je vais lui faire une nouvelle robe.

Je déboutonnai les beaux vêtements de la poupée et Fillette alla les serrer dans son tiroir. Puis, usant de son privilège coutumier, elle fouilla dans le sac aux chiffons et en sortit une vieille chemise de son père. De sa corbeille à ouvrage elle tira du fil, des aiguilles, des ciseaux, et pendant une heure, en confectionnant une robe à sa fille, elle connut le bonheur parfait. Elle ne me demanda pas mon aide, et je me gardai bien de la lui offrir. Ce vêtement, elle le coupa d'après un patron à son idée. Ce ne fut certes pas une création merveilleuse, même Fillette, qui n'a que 6 ans, s'aperçut fort bien de son imperfection !

Certaines coutures se trouvèrent faites du beau côté, et de ses petits doigts malhabiles, elle essayait d'écraser les coutures rebelles et trop proéminentes en disant: Il me semble que cela devrait être plus lisse !

Cependant, l'oeuvre achevée, l'enfant la contempla avec admiration.

- Mon bébé chéri a une robe neuve et je la lui ai toute faite moi-même ! s'écrie-t-elle en s'en allant promener son enfant dehors.

- Pourquoi l'as-tu laissé faire cela? me demande la jeune tante de Fillette. La poupée était si jolie avec la robe que tu lui as faite, et maintenant elle est hideuse. J'ai honte d'aller promener Fillette avec cette horreur là.

- Elle la préfère ainsi, tu sais qu'il n'y a pas de raison pour l'obliger à se conformer à mon goût personnel.

Comme la jeune tante est sur le point de se marier, je profite d'ajouter à ces paroles un brin de morale sur l'éducation des enfants, problème qui se présentera sans doute à son esprit avant longtemps. La liberté, dis-je donc, est le privilège des petits comme des grands dans cette maison.

- Je laisse les enfants agir à leur guise tant qu'ils ne font rien de mal. Je ne veux pas qu'ils me copient servilement; je veux que leur personnalité se développe en toute liberté. On ne voit, hélas ! que trop d'enfants moralement rabougris et déformés pour la vie entière, par le pur caprice ou les préjugés de leurs éducateurs. Tu vois, fis-je en riant, que je suis devenue assez large d'idées pour croire que mes enfants ne seront que meilleurs si, en grandissant, ils ne reproduisent pas exactement mon image!

- Mais, objecte la jeune tante, toujours sceptique, comment apprendront-ils a avoir des égards si tu leur laisses ainsi la bride sur le cou ? Un enfant désobéissant est repoussant. Cela m'indigne toujours de voir la façon stupide et sentimentale dont les mères élèvent leurs enfants et en font un fléau pour leurs alentours.

- Voyons, ne confonds pas liberté et licence, dis-je. Dans notre pays, nous jouissons de la liberté, mais cette liberté n'existe que grâce à des lois restrictives. Il en est de même sous ce toit. Du reste, ajoutai-je avec une fierté bien pardonnable, mes enfants savent obéir, tu le sais !

- Oui, dit-elle, cela va sans dire, aussi je ne parle pas de toi.

- Il y a une loi chez nous, et j'ai essayé de l'établir équitable et invariable. Les enfants ne se heurtent pas un jour contre un mur d'airain hérissé de défenses, pour être livrés le lendemain à tous leurs caprices. C'est d'une part l'invariabilité de la loi, d'autre part le respect de leur liberté qui rendent les enfants si prompts à l'obéissance. S'ils ne savent pas l'exprimer, ils sentent du moins que leur père et leur mère sont bons et justes, et qu'ils ne leurs défendent une chose que pour leur vrai bien. Nous essayons, par exemple, d'inculquer aux enfants la politesse, la bonne humeur, l'empire sur soi-même. Par la loi établie, nous les préservons de ce qui serait mauvais et nuisible, mais pour le reste, nous les laissons se frayer la route eux-mêmes. Nous ne voulons pas laisser notre caprice ou notre irritabilité détruire, par de stupides «ne fais pas ceci», «ne fais pas cela», leurs petits plans innocents.

Si Fillette préfère confectionner elle-même les vêtements de sa poupée, qu'elle le fasse! Et si son frère, pour orner son jardin, trouve bon d'y planter des fleurs sauvages, devrais-je l'en empêcher et le forcer à cultiver ce qui me plairait à moi. Peut-être est-il plus avisé que moi en découvrant la beauté de ces plantes ?

En se développant, les enfants en viendront assez tôt à voir les choses sous l'angle conventionnel, et s'ils n'y parviennent pas, le malheur serait-il grand ? leur point de vue pourrait être le meilleur. Dans toutes les générations, les hommes qui ont remué le monde sont ceux qui n'ont pas considéré les choses au point de vue conventionnel.

Souviens-toi de ceci:

Si la liberté est la meilleure des choses pour les nations et pour les individus, elle l'est aussi pour l'enfant, pour cet être si tendre, pour cette âme toute neuve créée à l'image de Dieu.









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