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Par la loi de l'obéissance vers la liberté

«La loi est dans les choses», dit Ch. Wagner. «Elle est l'ordre tranquille, profond et sûr que l'observateur attentif peut remarquer partout dans l'univers, depuis la poussière jusqu'aux étoiles.

«Rien n'est hors la loi. La feuille fraîche au printemps, quand se rompent les bourgeons, éclôt selon la loi. Tout le long de l'été, elle boit la rosée et respire l'air, selon la loi. Et, si elle tombe en automne, c'est encore selon la loi...

«Naître, vivre et mourir lui sont soumis.

«Elle enveloppe les enfants au berceau et les morts dans la tombe.

«On peut aussi peu sortir de sa puissance que sortir de l'univers et de la réalité... C'est pour cela que de toutes les notions à acquérir, à répandre, à entretenir, il n'y en a pas une qui soit plus utile, plus vitale que la notion de la loi.» (1)

Mères, éducatrices, savons-nous ce qu'est l'enfant? Savons-nous que le développement, l'évolution du petit être sont soumis à des lois, que sans la connaissance exacte de ces lois, nous sommes incapables de guider ce développement qui nous est confié et que, si nous ne nous conformons pas strictement à ces lois, nous sommes la cause de résultats désastreux, inévitables que nous constatons, hélas, chaque jour.

Si des connaissances exactes sur les animaux sont nécessaires à celui qui en fait l'élevage; si l'horticulteur doit faire l'étude des plantes; combien, plus encore, est-il indispensable à l'éducatrice de connaître les premiers principes de la physiologie, et les vérités élémentaires de la psychologie, puisqu'ils constituent la science de la vie, la seule qui ne puisse être négligée pour la tâche que nous sommes appelées à accomplir.

La première partie de la vie du petit enfant se résume ainsi: Respirer, - se nourrir, - se mouvoir.

C'est dans cette période végétative, ne l'oublions pas, que l'éducation commence. Voici ce que dit le Dr Godin, dans son ouvrage: Les Droits de l'Enfant.

«Dès le berceau, la mère, qui aime son enfant, doit avant tout savoir le défendre contre les caprices de l'entourage, contre ses propres caprices de maman. Voici les premières bases de l'éducation physique et morale que l'on peut, à juste titre, appeler élevage, dressage, et cet élevage consiste à donner au petit être de bonnes habitudes.»

Cette éducation, qui se fait sans paroles par la seule influence, est de la plus grande importance.

Dans une récente conférence, s'adressant à des mères, le Dr Liengme montrait l'immense impressionnabilité du petit être durant ses premiers mois d'existence. La mère, disait-il, «à quelques mètres du berceau de son enfant peut lui communiquer son état de calme ou d'excitabilité.»

Dès les premiers jours, la volonté naissante de l'être se manifeste déjà par ses cris, par ses exigences; le bébé s'essaye à faire plier tout ce qui l'entoure. Il faut donc que la mère oppose une règle; il faut qu'elle trace une limite à ses désirs; autrement, l'enfant, qui momentanément serait le maître, ne tarderait pas à devenir l'esclave de ses besoins et de ses tendances.

Voici la toute première apparition de l'obéissance. Mais du jour où la mère la réclame, elle doit elle-même, se soumettre à des lois:

L'enfant doit recevoir tous les soins que comporte une bonne hygiène; c'est une loi.

Il doit être couché et levé à l'heure. Son repos ne doit pas être troublé; c'est une loi.

Il doit être entouré de paix, de calme, d'harmonie; c'est une loi.

Il en est bien d'autres encore qui ne peuvent être transgressées, sans que les bases de la première éducation ne soient sérieusement compromises.

Avec les premiers pas de l'enfant, ses premiers essais de langage articulé, se manifestent aussi ses premiers sentiments d'indépendance et son grand besoin d'activité.

Il peut parler, donc il questionne; il peut marcher, donc il explore. Il veut saisir tous les objets et chaque jour sa curiosité instinctive, naturelle, s'accentue.

Fénélon en parle et dit :

«La curiosité de l'enfant est un penchant de la nature, qui va comme au devant de l'instruction, ne manquez pas d'en profiter.»

Un conflit sérieux commence; une nécessité impérieuse invite le bambin à faire connaissance avec le monde qui l'entoure, nous ignorons ou nous voulons ignorer que pour voir, il faut qu'il touche. L'enfant voit plus avec ses doigts qu'avec ses yeux.

Or, quel est le refrain que Bébé entend le plus souvent dans la journée, pour peu que maman soit fatiguée ou que la bonne soit occupée: Ne touche pas, lorsque les menottes s'avancent pour saisir l'objet convoité, ou tais-toi, lorsque les comments et les pourquois se répètent.

Dans l'ignorance et l'incompréhension des phénomènes auxquels nous assistons, nous croyons que la première éducation de l'enfant réside précisément en ce qu'il apprenne à ne pas toucher, alors qu'il lui est indispensable d'avoir à sa disposition de nombreux objets à palper. On lui impose le silence, alors qu'il lui est indispensable de parler.

Nous intervenons, quand il ne faut pas intervenir; nous contrarions sans cesse, par des ordres et par des défenses, certaines manifestations d'activité spontanée naturelles et bienfaisantes pour l'enfant, et nous nuisons irrémédiablement à son bonheur, à son avenir en faussant son caractère.

Au lieu de suivre la voie que l'enfant nous trace, et c'est la seule qui soit juste, nous lui imposons des activités, des devoirs que nous choisissons pour lui, guidées le plus souvent par l'orgueil ou par la crainte. On veut produire son enfant, on a peur qu'il ne sache pas ce que d'autres savent.

Nous faisons un faux usage de nos droits de parents et d'éducateurs; nous mesurons notre puissance avec l'impuissance de nos enfants; nous sommes heureux lorsqu'ils plient devant nous et nous croyons à de l'obéissance; nous pensons qu'en affirmant notre volonté, nous développons la leur, alors que nous la brisons.

Nous sommes satisfaits de l'accomplissement extérieur des actes que nous avons commandés; mais, savons-nous ce qui se passe au-dedans et que c'est souvent à la dissimulation que nous conduisons l'enfant.

Dans la plupart des cas de désobéissance enfantine que nous déplorons, si nous recherchons, nous verrons que c'est précisément nous, qui avons désobéi aux lois de la psychologie. Le gouvernement des enfants est lamentablement mauvais, dit Spencer:

«La manière de traiter les enfants dans chaque occasion qui se présente est celle de l'impulsion du moment. Elle n'émane aucunement d'une conviction raisonnée de ce qui convient au bien de l'enfant, mais simplement du sentiment, bon ou mauvais, qu'éprouvent les parents; et elle varie d'heure en heure avec ses sentiments eux-mêmes. Ou si, aux inspirations du caprice se joint quelque doctrine, quelque méthode définie, ce sont les doctrines et les méthodes héritées du temps passé, suggérées par nos souvenirs d'enfance, méthodes trouvées, non par la science, mais par l'ignorance des temps.»

Tous les pédagogues de la première enfance, des plus anciens aux plus modernes, s'accordent à dire que cette première éducation, de un jour à six ans, est la plus importante.

Lhotzky, dans son livre «Pour former une âme», nous dit avec conviction et justesse:

«Avant la période de la deuxième dentition, l'éducation domestique doit avoir établi l'obéissance, après il est trop tard. L'obéissance décide de la vie tout entière et le temps dont on dispose pour l'obtenir est court.»

Le développement moral, corporel, intellectuel est le problème le plus compliqué qui existe et nous ne pouvons entreprendre la solution de ce problème avant d'avoir préalablement compris, admis la formule que voici:

Dès que j'impose une discipline à mon enfant, je m'en impose une à moi-même.

Sans l'une, l'autre n'existe pas. C'est la grande loi de la cause et de l'effet que nous retrouvons dans les détails les plus infimes de la nature.

Les différents articles de la grande loi de l'obéissance ne souffrent aucune infraction. Il est de la plus haute importance de les connaître. Ils devraient être lus et médités chaque jour.

Lois de l'obéissance durant la première enfance, de 1 à 6 ans:

ARTICLE PREMIER. - Ayez le calme le plus parfait. N'approchez point votre enfant dans un sentiment de colère ou d'irritabilité. N'oubliez pas que vous transmettez au petit être les sentiments qui vous animent, crainte, inquiétude, etc.

ART. 2. - Que votre oui soit oui. Que votre non soit non. Préalablement assurée que tout est bien pour l'enfant, gardez une volonté ferme, inébranlable, vous la donnez en même temps à votre enfant.

ART. 3. - Ne permettez jamais que l'enfant soit dérangé dans ses premières habitudes de sommeil et de nourriture.

ART. 4. - Laissez reposer le bébé, tranquille dans son berceau, ne le fatiguez pas sous prétexte de l'instruire.

ART. 5. - Dès que l'enfant peut être hors de son berceau, laissez-le se traîner, crier, donnez-lui suffisamment d'objets à palper.

ART. 6. - Dès que l'enfant peut comprendre un ordre, que celui-ci soit net, précis, donné dans une parfaite bienveillance, mais avec fermeté; l'obéissance lui sera ainsi facilitée.

ART. 7. - Ne prononcez pas à l'avance des défenses. - Les interdictions provoquent la tentation de désobéir.

ART. 8. - N'essayez jamais d'obtenir l'obéisance par des moyens détournés (promesses de bonbons, récompenses de toutes sortes, joujoux, etc.)

ART. 9. - Ne proférez pas de menaces, sous aucun prétexte n'ayez recours à la crainte que vous pourriez éveiller chez l'enfant (le ramoneur, le gendarme, le chien).

ART. 10. - Répétez, s'il le faut, l'ordre que vous avez déjà donné, sans aucune irritation, mais montrant à l'enfant que vous êtes convaincue qu'il sera exécuté.

ART. 11. - Ne dérangez jamais un enfant dans ses jeux, à moins d'une véritable nécessité - si vous le faites, faites-le avec respect; - dans son jeu se trouve le germe du travail.

ART. 12. - Réfléchissez avant de donner un ordre, mais lorsque celui-ci est donné, ne revenez jamais en arrière.

Rousseau dit dans «l'Emile»:

«Quand la nécessité l'implique, que tous vos refus soient irrévocables; qu'aucune importunité ne vous ébranle, que le non prononcé soit un mur d'airain contre lequel l'enfant n'aura pas épuisé cinq ou six fois ses forces, qu'il ne tentera plus de renverser.

Tout enfant a besoin d'une autorité, c'est-à-dire du respect d'une puissance supérieure. L'autorité doit se fonder sur le respect et non sur la peur éveillée par la tyrannie.

Si nous savons nous-même obéir à ces règles, nous obtiendrons de nos enfants la véritable obéissance, l'obéissance consentie, l'obéissance par confiance, l'obéissance par respect et par affection, l'obéissance vivante, l'obéissance libre

Le chapitre «l'Obéissance par la liberté», de Foerster, vaut la peine d'être lu et médité: «Pour ma part, dit-il, je suis toujours de nouveau surpris de voir combien les enfants sont attentifs et dociles dès que l'on parvient à mettre les tâches qu'on leur donne, ou les restrictions qu'on leur impose en rapport avec l'héroïsme latent de leur nature. Avec quelle passion, ils s'exercent à remporter des victoires sur eux-mêmes; quelle ingéniosité inventive ils déploient dans ce domaine... Quel changement dans l'expression d'un visage d'enfant, dès qu'on lui a fait voir dans l'obéissance, non un joug imposé, mais une oeuvre d'amour qu'on réclame de lui! Et, plus tard, si j'ai pu lui présenter la discipline comme une voie qui mene à la liberté, comme un moyen de triompher de son obstination instinctive, combien il me saura gré de l'avoir traité non en esclave, mais en héros de la liberté... Dès qu'on a fait appel à ce qu'il y a d'héroïque dans l'enfant, qu'on a gagné aux exigences de la discipline sa personnalité profonde, la rébellion instinctive des enfants contre la règle, la mauvaise humeur que leur causent les restrictions apportées à leur exubérance, sont bridées dans leur principe et le maître ne trouve pas difficile de faire régner la discipline la plus stricte.»

En admettant une parfaite soumission de la part des éducateurs aux lois énoncées, ne supposons pas cependant que toute désobéissance sera écartée, ce serait le comble de l'absurdité.

N'attendons pas trop de la part des enfants, contentons-nous de mesures modérées et de résultats modérés. Prenons en patience les imperfections que montre à chaque instant notre enfant. Une moralité supérieure, de même qu'une intelligence supérieure doit être le fruit d'un long développement.

Il est encore un grand principe auquel il faut obéir: Que l'enfant subisse toujours les conséquences naturelles de ses actions.

Lorsqu'il faut punir, n'infligez pas des châtiments artificiels. Il est indispensable que l'enfant acquière de bonne heure l'idée du rapport de cause à effet et cela de la manière même dont il en fera plus tard l'expérience dans la vie.

«La braise chaude brûle l'enfant une première fois, elle le brûle la seconde fois, elle le brûle la troisième fois; elle le brûle toutes les fois et l'enfant apprend à ne pas toucher à la braise chaude. Si vous avez autant de suite, si tous les actes chez vous ont la même uniformité, l'enfant respectera bientôt vos lois à l'égal de celles de la nature»....

Quand des enfants trop peu soigneux brisent ou perdent les objets qu'on leur donne, le châtiment naturel, - celui-là même qui apprend aux grandes personnes à avoir du soin, -c'est le désagrément qui en résulte...

Quand un enfant, assez âgé pour avoir un canif, s'en sert avec si peu de précautions, qu'il en brise la lame, ou s'il le laisse dans l'herbe auprès de quelque haie, après avoir coupé une baguette, un père irréfléchi ou un oncle complaisant va tout de suite lui en acheter un autre, sans voir qu'il enlève ainsi à l'enfant l'occasion de recevoir une leçon utile. En pareil cas, un père doit expliquer que les canifs coûtent de l'argent; que pour avoir de l'argent, il faut l'acquérir par le travail et qu'il ne peut acheter des canifs pour quelqu'un qui les casse ou qui les perd; que par conséquent, jusqu'à ce que l'enfant ait donné la preuve qu'il est devenu plus soigneux, il n'aura pas d'autre canif. Une discipline semblable servira à arrêter la prodigalité chez l'enfant.

«Souvenons-nous que le but de l'éducation morale est de former un être apte à se gouverner lui-même, non un être apte à être gouverné par les autres.

Si notre enfant était destiné à vivre esclave, nous ne pourrions trop l'habituer à l'esclavage dans son enfance; mais, puisqu'il sera tout à l'heure un homme libre, qui n'aura plus personne auprès de lui pour diriger sa conduite journalière, vous ne pouvez trop l'accoutumer à se diriger lui-même pendant qu'il est encore sous vos yeux.» (2)

Ce n'est que là où il y a le maximum d'éducation, qu'il peut y avoir le maximum de liberté. Mais ce n'est que si nous avons pu, selon la loi, accorder le maximum de liberté, que nous obtiendrons le maximum d'éducation.


(1) Ch. WAGNER. - «A travers les choses et les hommes.»

(2) H. SPENCER. De l'Education. Tout le chapitre 3 de ce volume est à lire par toutes les mères.









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