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Les « Entretiens sur l'éducation » est un mensuel publié sans interruption depuis plus de 100 ans.
Le site www.entretiens.ch vous offre la possibilité de consulter en ligne ces extraordinaires archives parcourant/ponctuant au jour le jour l'histoire de l'éducation familiale d'un bout à l'autre du XXème siècle.
La survie de la brochure mensuelle imprimée parallèlement à la distribution virtuelle à travers le site est le garant de la poursuite de cette aventure. La rédaction est assurée de façon bénévole par un groupe de parents passionnés par la réflexion et l'écriture autour du vécu familial. Les frais d'impression du journal et la gestion du site (100 000 pages demandées par mois??)....30.- par an (20€).
En dehors du grand intérêt pour vous de cette matière exceptionnelle, que vous soyez jeune parent, chercheur dans une université ou simplement intéressé par l'évolution des comportements humains, votre soutien par l'intermédiaire d'un abonnement nous est indispensable.
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Mère et fille (1)

... Ceci m'amène à un point très délicat: le passage de l'enfance à l'adolescence et à la jeunesse, ce moment, où les relations entre mère et fille, empreintes jusque là de confiance et d'intimité, se transforment, et où, se produit trop souvent une rupture douloureuse, néfaste pour la jeune fille. C'est à ce moment-là qu'elle commence à cacher à sa mère ses impressions et à dissimuler ses sentiments. Une sorte de pudeur morale, - qui correspond sans doute à son état physiologique, - un besoin d'affections nouvelles et passionnées, un instinct qui lui dit que sa mère pourrait en prendre ombrage, un besoin farouche d'indépendance, - semblable à celui de l'oisillon qui aspire à voler, hors du nid, - tout cela opère dans ses relations avec sa mère un changement marqué.

C'est alors qu'il s'agit pour la mère de se retirer momentanément à l'arrière-plan, si elle ne veut pas perdre pour toujours ce à quoi elle tient le plus. Une discrétion absolue, une sympathie délicate toujours prête à partager les émotions de sa fille sans jamais en exiger ni même en solliciter la confidence, un oubli d'elle même qui l'incite, non seulement à ne point en vouloir aux amies jeunes ou mûres qui semblent usurper la place à laquelle elle estime avoir droit, mais encore à ne pas faire un geste pour réclamer l'intimité qu'on lui refuse, voilà la première condition du succès. Ajoutez-y une patience qui supporte gaîment, et sans les prendre au tragique, les phases absurdes et parfois agaçantes par lesquelles passe la jeune fille. Ajoutez-y surtout une confiance qui continue à l'associer malgré tout à votre vie en lui disant vos soucis, ou même les expériences de votre jeune temps, et cela simplement, sans appuyer trop. Voilà ce qui maintiendra le lien fragile qui menaçait de se rompre, ce qui vous permettra, à vous et à elle, de traverser victorieusement cette épreuve.

Une jeune dame me disait récemment combien elle admirait rétrospectivement sa mère qui, à travers les diverses phases souvent assez ridicules de son adolescence, s'était contentée de supporter ses exagérations sans les souligner, mais sans cesser de l'entourer d'une tendresse vigilante et surtout d'entretenir leur intimité en la mettant au courant de ses propres difficultés. Et je me souviens qu'un jour, comme je disais à une classe de jeunes filles: «Vous rendez-vous compte que, vos mères ont eu, elles aussi des déceptions, des souffrances, des sacrifices à faire, des crises douloureuses à traverser, tout comme vous?» elles m'ont répondu d'un air étonné: «Nous n'y avions pas pensé, elles ne nous en parlent jamais». Un mot qui montre à votre enfant que vous comptez sur elle et sur son affection discrète, fait plus pour vous l'attacher que les récriminations, même les plus justifiées.

Et vraiment, il ne serait pas si difficile de réussir, car les parents ont d'emblée entre les mains toutes les conditions du succès et c'est eux qui, la plupart du temps, sont les auteurs de leur propre défaite.

J'ai vu de près une mère qui, pendant toute l'enfance de sa fille, avait été sa meilleure amie, sa seule confidente et pour laquelle l'enfant éprouvait une tendresse et une admiration sans bornes, - détruire peu à peu leur intimité grâce à une sorte de jalousie qui la rendait incapable de laisser sa fille nouer des amitiés en dehors d'elle, ou simplement échapper dans quelque domaine que ce soit à son emprise, et se développer selon sa nature propre. Plus tard, devenue jeune femme, sa fille me disait: «Quand on songe à tout ce qu'un enfant apporte à ses parents d'admiration, de confiance absolue, au crédit illimité qu'il leur fait, et à ce qu'il faut de temps et de déceptions pour détruire en lui toutes ces choses, on reste épouvanté de la manière dont ils gâchent tout cela de gaîté de coeur.»

C'est que beaucoup ne peuvent admettre qu'une personnalité complètement différente de la leur se développe à côté d'eux, personnalité souvent plus forte et plus haute que la leur. Et parmi ces mères, tendres et dévouées aussi longtemps que l'enfant est comme identifié avec elles et semble leur appartenir en propre, les unes se transforment en tyrans, doux ou terribles, dès qu'il s'agit de relâcher leur emprise pour laisser s'épanouir un être libre, dans la voie qui est la sienne; et les autres lâchent complètement les rênes et abandonnent au hasard la direction de vies qu'il faudrait trop d'effort pour comprendre et pénétrer. Les unes et les autres sacrifient le trésor d'une confiance et d'un respect qui, pour avoir paru s'éclipser un instant, renaîtraient plus profonds et plus tenaces en présence d'une abnégation maternelle généreuse, et digne cependant. Ici, comme ailleurs, se vérifie le mot de l'Evangile: «Celui qui veut sauver sa vie, la perdra.»


(1) Sous ce titre Mlle S. Godet vient de publier une brochure que nous recommandons à nos lectrices. Notre administration l'enverra aux personnes lui en feront la demande en versant à notre compte de cheque 1-542: 0 fr. 75.









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