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Les « Entretiens sur l'éducation » est un mensuel publié sans interruption depuis plus de 100 ans.
Le site www.entretiens.ch vous offre la possibilité de consulter en ligne ces extraordinaires archives parcourant/ponctuant au jour le jour l'histoire de l'éducation familiale d'un bout à l'autre du XXème siècle.
La survie de la brochure mensuelle imprimée parallèlement à la distribution virtuelle à travers le site est le garant de la poursuite de cette aventure. La rédaction est assurée de façon bénévole par un groupe de parents passionnés par la réflexion et l'écriture autour du vécu familial. Les frais d'impression du journal et la gestion du site (100 000 pages demandées par mois??)....30.- par an (20€).
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L'Enfant et la Verité (1)

Mères qui lirez ces lignes, n'avez-vous pas souvent le coeur angoissé à la pensée de l'avenir qui attend vos enfants? Au devant de quoi vont-ils? De quelles difficultés? De quels bouleversements, de quelles luttes morales? Nul ne le sait. Mais ce que vous savez, c'est que vous devez les armer pour le combat qui les attend afin qu'ils en sortent vainqueurs; en d'autres termes, vous voulez leur aider à trouver une loi suprême qui soit à la fois la base de leur vie morale, leur guide et leur force dans la vie.

Quelle sera cette loi suprême?

Il n'y a qu'une réponse possible: c'est le service de la vérité.

«Le devoir de vérité est irréductible à tout autre. Qui ne met pas la vérité au point de départ de la vie morale, qui n'en fait qu'une conséquence de la justice ou de la charité, ne lui donne pas la place à laquelle elle a droit.» (P. Bovet).

Le devoir de vérité, le service de la vérité, voilà la loi suprême à laquelle nous devons nous soumettre, nous et nos enfants, quoi qu'il puisse nous en coûter.

Comment amener nos enfants à la vérité? C'est un problème d'éducation.

Or, pour résoudre un problème d'éducation, il faut 1) être un éducateur exemplaire ; 2) connaître à fond l'enfant que l'on élève.

Etre un éducateur exemplaire. Vous aimez tant vos enfants que vous voudriez être des mères parfaites, n'est-ce pas?

Il faut en effet que nous, éducatrices, nous soyons des servantes enthousiastes de la vérité si nous voulons la faire aimer à nos enfants. Il faut qu'ils nous voient, non seulement être absolument véridiques mais justes en tout, respectueuses d'une parole donnée, scrupuleuses à l'égard des impôts, des règlements de la poste et de la police, des arrêtés du gouvernement, etc.

Or, les enfants ont respiré dans le monde entier pendant ces années de guerre une atmosphère de mensonge qui risque fort d'avoir vicié leur être moral. Les difficultés du ravitaillement et les prix excessifs ont conduit à la tromperie, au trucage et aux opérations plus ou moins louches. S'ils ont vu leurs parents accaparer illégalement telle ou telle marchandise ou en trafiquer peut-être, que s'est-il passé dans leur pauvre conscience? De deux choses l'une, ou ils se sont dit: «Mes parents font cela, donc c'est bien; donc je puis tromper, frauder comme eux»; ou «mes parents font ce qu'il n'est pas permis de faire; ils disent ce qui n'est pas» et la confiance en eux est détruite. De ces deux maux lequel préférez-vous, mères chrétiennes. Vous n'en voulez aucun, parce que vous voulez, vous, vivre dans la stricte vérité. Vous voulez, à l'exemple de Jésus, vous sanctifier pour vos enfants.

Nous avons dit qu'il faut d'autre part connaître l'enfant à fond.

Parlons d'abord de l'enfant de 1 à 5 ans.

Sa conscience n'est pas formée. Pour lui qu'est-ce qui est le bien, qu'est-ce qui est le mal? Ce qui est bien c'est ce qui plaît à sa mère; ce qui est mal, c'est ce qui lui déplaît. - Il faudra le conduire plus loin! - En le regardant vivre on s'aperçoit qu'il a en lui certaines dispositions, certaines inclinations qui seront des obstacles à son éducation pour la vérité. Ainsi, il a souvent un instinct de ruse qu'il emploie pour arriver à ses fins. Il faut alors le déjouer, lui montrer qu'on n'en est pas dupe. Mais il faut le faire avec affection; il ne sait pas qu'il fait mal. On constatera aussi que son intelligence n'est pas ordonnée; ainsi il ne sait pas la valeur du temps ni de l'espace. Aujourd'hui, hier, demain, ici, dehors, correspondent à des notions vagues pour lui donc, s'il emploie ces mots à contre sens il ne ment pas. Prenez patience, ne le grondez pas; expliquez-lui avec douceur en quoi il s'est trompé. Il ne connaît pas non plus la valeur des chiffres. S'il vous assure qu'il a mangé deux bonbons alors qu'il en a mangé trois, il est peut-être de bonne foi. Connaît-il le vrai sens d'autres mots qu'il emploie? Cela n'est pas sûr. Donc avant de tirer une conclusion de tel rapport qu'il fait sur ses frères et soeurs, ou sur sa bonne, assurez-vous qu'il sait bien ce qu'il dit.

L'imagination de l'enfant le trompe souvent; confondant le réel avec l'irréel, ce qui se passe en lui avec ce qui se passe hors de lui, il invente une histoire. Ce n'est pas un mensonge.

Mais, direz-vous, comment former l'intelligence de l'enfant, et comment former sa conscience, quand il est tout petit?

Essayez de former son intelligence en le mettant en face de la réalité, demandez-lui de vous raconter des faits dont il a été acteur on témoin, si vous êtes à même d'en contrôler les détails; et au besoin, remettez les choses au point, mais sans brusquerie, sans indignation, avec fermeté et douceur. Faites-lui décrire un objet qui l'intéresse, une fleur, un jouet, un animal qu'il a sous les yeux.

Cherchez à former sa conscience en lui faisant remplir le mieux possible de petits devoirs à sa portée - ne les multipliez pas. - Il lavera son ardoise avec soin, mettra ses jouets en ordre, pliera sa serviette après les repas, etc. Cherchez à obtenir l'aveu complet de petites fautes et récompensez cet aveu par un complet pardon. Faites tout cela sans abuser des récompenses et des punitions, moyen trop facile.

Mais l'enfant grandit.

Que l'éducatrice se tienne plus que jamais sur ses gardes. Qu'elle surveille ses propres actes, ses paroles, ses regards; surtout qu'elle veille sur sa vie intérieure.

Vers 5 ou 6 ans, la réflexion s'éveille. L'enfant commence à avoir des notions claires des choses; il comprend le sens précis d'un grand nombre de mots; il écoute ce que l'on dit, il observe ce que l'on fait. Il devient un être responsable qui discerne le vrai du faux. Ses inclinations, ses tendances personnelles s'affirment, se précisent de plus en plus. Etudions-le au point de vue spécial qui nous occupe.

S'il est timide, nerveux, anémié, il sera plus porté au mensonge qu'un autre.

S'il est retardé d'intelligence, il aura de la peine à discerner ce qui est vrai de ce qui ne l'est pas.

S'il est orgueilleux, égoïste, faible de volonté, il mentira à cause de ces défauts mêmes.

Si sa sensibilité est extrême, il sera porté peut-être à mentir par altruisme, pour excuser un de ses frères et soeurs, un de ses petits amis, ou pour ne pas peiner sa mère.

Comment surmonter tous ces obstacles. Vous vous trouvez, je suppose, en face d'un premier mensonge. Dans votre indignation et votre angoisse, donnerez-vous une claque à l'enfant ou l'enfermerez-vous dans le cabinet noir en lui disant: «Tu es un menteur?» Non. Vous vous efforcerez d'obtenir, toutes preuves en mains, l'aveu complet de sa faute. Prenez garde de le tenter par des questions mal posées. Ne lui dites pas: «As-tu dit cela, as-tu fait cela?» mais «Pourquoi l'as-tu dit? pourquoi l'as-tu fait?» Et quand «il aura tout dit» et qu'il aura compris qu'il a fait le mal, qu'il vous a offensée et qu'il a offensé Dieu dont les yeux sont trop purs pour voir le mal, ne le découragez pas; dites-lui: «Tu as menti, mais tu n'es pas un menteur; tu peux ne pas mentir avec le secours de Dieu.»(2) Il faut laisser une porte ouverte à l'espérance.

Peut-être, malgré son aveu, l'enfant mérite-t-il d'être puni. Quelle punition lui infligerez-vous? la premiere qui vous viendra à l'esprit? celle qui sera la plus commode pour vous? Oh, non! Cherchez. L'âme de votre enfant en vaut la peine. Il faut - règle générale - que la punition soit en rapport avec la faute commise. Par exemple, si l'enfant a trompé votre confiance, enlevez-lui pour un temps - le plus court possible - une partie de sa liberté d'action.

Si le mensonge se répète, s'il devient chronique? C'est alors une vraie maladie qu'il faut guérir en remontant à la cause, pour la supprimer.

Appelez le médecin, s'il est anémié ou nerveux.

Si ses facultés mentales sont déséquilibrées, s'il écoute mal, s'il comprend mal, s'il observe mal, prenez les conseils de ceux qui ont étudié ces défauts intellectuels (si vous habitez Genève, allez aux consultations spéciales de l'Institut J.-J. Rousseau).

Si la cause du mensonge est morale, c'est-à-dire s'il est dû à un défaut de caractère, attaquez ce défaut: orgueil, gourmandise, faiblesse de volonté, ou même excès de sensibilité. Combattez ces défauts en évitant de terroriser votre enfant; ce serait le conduire tout droit au mensonge. Mais il faut savoir et se rappeler toujours que Dieu a mis son empreinte en chaque être humain, qu'il lui a donné des forces extraordinaires qui ne demandent qu'à être développées. Cherchez donc à connaître les forces particulières qui se trouvent dans l'enfant que vous élevez et servez-vous de ces forces.

Eclairez son intelligence, formez son jugement, aidez-lui à avoir des notions nettes des gens et des choses.

Adressez-vous à son sentiment, tout en faisant la guerre à la sentimentalité. Dites-lui que l'amour, que le respect qu'il a pour son prochain - père, mère, maîtres, domestiques, camarades, etc. - l'oblige à lui dire la vérité, à être juste dans ses rapports avec lui.

Faites appel surtout à sa volonté. «Traduisez, comme on l'a dit, son aspiration à la vérité, dans la langue du courage.» Le courage est la vertu que les garçons prisent le plus. Ne négligez pas de faire vibrer cette corde. Vous les rendrez ainsi indépendants de l'opinion des autres, de leur dédain, de leur raillerie, de leur admiration.

Et quelle sera notre attitude à nous, éducatrices ?

Nous aurons confiance en notre enfant, et nous le lui dirons. Nous croirons à ce qu'il peut devenir. Comme nous l'avons fait quand il était tout petit, nous le rendrons responsable de certaines tâches proportionnées à ses forces intellectuelles et morales. Rien ne forme comme les responsabilités.

Mettons à profit son amour pour «les histoires vraies» en lui parlant de ces enfants, de ces hommes, de ces femmes qui ont eu le courage de sacrifier leurs goûts, leurs plaisirs, leur confort, leur repos, leur carrière, leur vie même à la vérité. Selon leur âge, leur sexe, leur caractère, parlez à vos enfants des martyrs et des grands courageux, de Socrate, de Moïse, d'Esaïe, de l'apôtre Paul, des Croisés, des Huguenots, de Jean Huss, de Luther, de Calvin, de femmes comme Blandine, Jeanne d'Arc, Marie Durand, etc.

Surtout, conduisez-les à Jésus. N'a-t-il pas dit: «Laissez venir à moi les petits enfants?» et «Je suis le Chemin, la Vérité et la Vie?» et «Celui qui est pour la Vérité écoute ma voix?». Montrez-leur que Jésus a vécu et qu'il est mort pour la vérité.

Peu à peu, en avançant dans la vie, l'enfant devenu homme comprendra que la vérité n'est pas seulement la véracité, mais que c'est aussi la justice, la bonté, l'amour. «La vérité, c'est la sainteté», a dit Frommel.


(1) Cet article est extrait d'une causerie préparée pour une réunion de jeunes dames.

(2) Lire l'Education par l'encouragement dans l'Ecole et le caractère de F.-W. Foerster, traduit par P. Bovet, pages 228-231.









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