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Jeux de l'enfant à la maison

Il est presque impossible à un enfant robuste de se tenir longtemps tranquille, chaque nerf, chaque muscle de son jeune corps vibre en lui, cherchant le mouvement et l'occupation. La mère est constamment appelée à satisfaire ce besoin impérieux, elle sait que la croissance et le développement de l'enfant dépendent d'un exercice judicieux de toutes ses forces.

Durant les premières années cet exercice ne peut se produire que par les jeux, car c'est tout ce qu'on peut attendre d'un bébé.

La mère qui aime son enfant ne s'efforcera pas de le tenir constamment tranquille, mais l'encouragera à être actif et joyeux. En pensant à son avenir elle ne veillera pas seulement à ce qu'il soit occupé, mais elle le guidera dans ses jeux de manière à ce que son intelligence et la formation de son caractère y trouvent un profit réel.

Etudier l'enfant quand il joue, le diriger, et même parfois jouer avec lui peut avoir d'excellents résultats.

Si nous l'observons, lorsqu'il est assez absorbé pour être inconscient de notre présence il nous révèle son vrai moi, sa pensée intime, et ces révélations nous aideront à trouver les moyens les plus propres à favoriser son développement.

Par ses jeux l'enfant se forme des habitudes, et la mère vigilante discerne les tendances qu'il faut encourager, et les défauts qui sont à redouter. Paul bâtit volontiers; mais il est facilement découragé, il jette ses jouets de côté et commence à pleurer; un mot aimable et un peu d'aide: il continuera son petit travail jusqu'au bout et sa patience et sa persévérance en seront stimulées.

L'enfant qui a été habitué à observer les règles du jeu saura un jour observer les lois de son pays. Les hommes ne sont que des garçons qui ont grandi, la loyauté et la nature de leurs premiers jeux sont donc en quelque sorte la base de leur caractère futur.

Les enfants aiment tellement qu'on sympathise avec eux qu'ils sont mieux disposés à acquiescer aux désirs de leur mère dans les choses importantes s'ils la voient participer à leurs plaisirs.

Les petits n'ont pas besoin de jouets coûteux pour s'amuser royalement et être aussi heureux que possible. Les objets qui se trouvent dans la plus humble demeure leur suffisent, si seulement la mère leur donne de temps en temps un regard de sympathie, un petit mot d'encouragement ou un conseil.

Il y a des chaises dans toutes les maisons et les enfants trouvent un grand plaisir à s'en servir d'innombrables manières. Elles servent à faire une clôture, une étable, un pont, une maison. Trois de ces chaises formeront un train, une charette ou un bateau, surtout si l'un des petits est pourvu de morceaux de papiers représentant les billets, un autre d'un sifflet ou d'une sonnette pour annoncer le départ. Deux chaises et un bout de ficelle seront un cheval et une voiture, et l'enfant conduira son attelage à une grande distance, vous disant tout ce qu'il voit sur la route. Un vieux châle jeté sur deux chaises fera une tente Indienne, et avec de tels objets, nos enfants joueront durant une demi-journée.

Garçons et filles s'intéressent beaucoup aux animaux, ils aiment à imiter leurs cris et à essayer de vivre à leur manière. Une ferme étant construite avec des chaises, les enfants représenteront eux-mêmes les différents animaux qui s'y trouvent; des agneaux qui bêlent et gambadent, et qu'on peut laver et tondre, des grillons qui remplissent l'air de leurs sons musicaux, des grenouilles qui sautent partout, et des chevaux surtout dont les petits garçons ne sont jamais lassés. Un poney peut être étrillé avec un petit balai, il peut être couché sur de la paille imaginaire, harnaché avec un morceau de ficelle et conduit chez le maréchal pour être ferré, ou mené dans la prairie pour s'y reposer en mangeant l'herbe verte.

Les enfants ont une joie spéciale à imiter le travail des grandes personnes, nous aurons ainsi des barbiers, des serruriers, des cordonniers, des médecins, des demoiselles de magasin, des couturières, des facteurs, des photographes, et en général tous les métiers pour lesquels on voudra bien permettre aux enfants l'usage de certaines choses qui sont dans la maison.

Donnez à l'enfant un petit seau et il sera un laitier; donnez-lui trois pommes dans un panier et il sera un marchand de fruits; il criera sa marchandise de chambre en chambre avec une grande joie. Quand il sera fatigué de ce jeu, qu'il colporte du poisson frais ou des journaux que vous ferez semblant de lui acheter moyennant une monnaie fictive qu'il acceptera très sérieusement, il se croira alors un véritable trafiquant ce qui sera pour lui le comble du bonheur.

Un petit garçon fait le fermier, il laboure son champ avec une petite chaise tournée sans dessus-dessous; il le herse avec un balai, le sème de bouts de papiers déchirés très petits, moissonne avec un bâton recourbé et vanne dans une machine construite avec des chaises; il peut aussi porter son grain au moulin.

Quelquefois le fermier cherche des oeufs, après avoir caché dans la maison tous les objets ronds qu'il a trouvés. Ce jeu a un intérêt tout particulier si la mère tout en travaillant imite le chant de la poule qui vient de pondre ou celui de la mère poule appelant sa couvée, alors les yeux du fermier brillent de joie, il possède certainement des petits poulets!

Pour les tout petits enfants des jouets inventés à la maison valent beaucoup mieux que ceux qu'on achète dans les magasins, leurs goûts sont si simples qu'il n'est pas difficile de les satisfaire. J'ai vu une petite fille âgée de neuf mois jouer pendant des heures avec une bouteille de verre très fort, bien bouchée et remplie à moitié d'eau; elle ne se lassait pas d'agiter cette bouteille et de la tourner de tous les côtés pour voir l'eau bouger; les enfants de cet âge aiment à secouer un trousseau de clés ou un collier de bobines - un peu plus tard ils enfileront eux-mêmes ces bobines, puis des boutons qu'ils apprendront à assortir, et même à coudre sur de petits morceaux d'étoffe.

Quelques vieilles bouteilles ou des bobines font une délicieuse armée de soldats ou une bande d'écoliers. Faire des paquets avec du papier et de la ficelle, coudre ensemble des morceaux de papier d'emballage et y coller des gravures récoltées dans les journaux, les almanachs et les prospectus sont des jeux qui occupent filles et garçons; tous aiment également à imiter - suivant leur manière drôle et charmante - les travaux de leur mère, à laver, à repasser, à balayer la maison, à cuire, à nettoyer les assiettes et à faire les lits.

Quant aux enfants plus âgés ils fabriquent, pourvu qu'on les aide un peu, des cerfs-volants ou des bateaux. «Bien des heures de mon enfance, écrit une mère de famille, ont été employées à construire une maison de poupées avec une grande boîte de carton dans laquelle mes frères et moi coupions des fenêtres et des portes. Nous couvrions le parquet de la maison avec du calicot blanc, et nous tirions le mobilier des débris de carton.»

Un enfant arrive bientôt à fabriquer des chaises, des tables, des lits, des sièges, des pianos avec une paire de ciseaux, de la colle et des vieilles cartes de visite. La plupart des enfants joueront pendant toute une après-midi à faire des bulles de savon. (Un peu de glycérine mise dans l'eau rend les bulles plus solides, et elles peuvent rouler sur un châle de laine étendu sur le plancher.)

Bien des moments d'ennui seraient épargnés à l'enfant si on lui enseignait à se servir lui-même. Dans ses premières années il considère comme un jeu d'essayer de s'habiller, de brosser ses dents, ses habits et ses souliers, de laver sa figure et ses mains et de mettre en ordre ses jouets.

Un petit garçon s'amusait excessivement en s'imaginant qu'il était un roi nègre avec dix sujets nègres aussi, qu'il faisait obéir selon sa volonté. Il leur enseignait à essuyer la poussière, à enlever les assiettes, à frotter les vitres, à faire briller l'argenterie, à remplir les salières et à rendre à sa mère beaucoup d'autres services dans l'accomplissement desquels il trouvait le plus grand plaisir.

Les quelques suggestions qui sont ici présentées ne sont que des indications générales à l'aide desquelles les mères pourront diriger les jeux de leurs enfants suivant la nature et les goûts de chacun, il est bon de les laisser livrés à eux-mêmes et à leurs propres inventions, mais il faut toujours être prête à donner un conseil, et à s'intéresser à ce qu'ils font.

La mère qui donne ainsi son temps à ses enfants et qui supporte patiemment le désordre causé par leurs jeux sera plus tard récompensée par l'amour qui lui sera témoigné.









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