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Scrupuleuse honnêteté
Il y a des parents qui désirent sincèrement voir leurs enfants grandir dans l'honnêteté et la droiture et ne se doutent pas que, par leur manque de véracité, par leurs actes peu scrupuleux, ils les entraînent eux-mêmes sur la mauvaise voie.
Parmi les personnes que nous estimons respectables, n'en est-il point qui profitent de ce que leur enfant est de petite taille pour ne payer que demi-place dans les trains ou les chemins de fer, après qu'il a dépassé l'âge réglementaire? Sans doute, ils ne diront pas de mensonge, mais recommanderont à l'enfant de se faire petit, lui mettront, peut-être, un costume spécial pour pouvoir faire à bon marché un long voyage!
Ne voit-on jamais un chrétien chercher à tromper la douane? Ne glisse-t-il jamais une lettre ou des valeurs dans un colis postal qui ne doit point en renfermer?
Nous savons des personnes qui utilisent des enveloppes donnant droit à la franchise de port pour des oeuvres d'utilité publique, quand même leur correspondance ne concerne pas ces oeuvres. Nous en connaissons qui profitent de ce que les soldats jouissent de ce privilège pour leur faire expédier gratuitement leur propre correspondance.
Celui qui, découvrant une erreur à son profit, la fait remarquer à son fournisseur, comprendra par la joyeuse surprise que causera cette démarche combien cette marque d'honnêteté est rare.
On assure que, dans les magasins où l'on reprend ou échange la marchandise après quelques jours, il n'est pas rare de voir des dames rendre, sous prétexte qu'il ne leur convient pas, un article de toilette dont elles voulaient se servir dans une occasion spéciale, quelquefois elles se le sont fait envoyer dans le seul but d'en relever le patron. Il y a des parents qui donnent à leurs enfants un billet pour excuser leur absence à l'école, ou leur arrivée tardive, alors même qu'il n'y a aucune bonne raison pour exempter l'enfant d'une punition méritée.
Nous n'en finirions pas, si nous voulions énumérer les petites infidélités qui se commettent chaque jour sous les yeux de nos enfants. Il en est une cependant que nous voudrions signaler encore, car elle est tout particulièrement actuelle et la sanction que lui a donnée l'habitude la rend presque innocente à nos yeux; nous voulons parler de la lenteur coupable que nous mettons à payer nos dettes, de la facilité avec laquelle nous laissons sans scrupule s'accumuler les notes, mettant ainsi nos fournisseurs dans la gêne et entraînant involontairement à leur ruine ceux qui n'ont pas de gros capitaux.
Une dame nous communique à ce sujet les ligues suivantes:
«J'entrais l'autre jour, écrit-elle, dans un magasin de papeterie, près d'une école publique, et m'y attardais à causer avec la marchande.
- C'est donc bien vrai, Mademoiselle, vous avez de la peine à vous faire payer vos factures?
La marchande. J'ai pourtant une bonne clientèle...
Un étudiant entre en saluant poliment - c'est un gymnasien -: J'aimerais des enveloppes pour cartes de visites!
La marchande. Bien, Monsieur, de quelle grandeur?
L'étudiant sort sa carte, assortit l'enveloppe, reçoit son paquet: Vous mettrez sur le compte! (II sort)
La marchande. Oui, Monsieur!
La dame. Mais...
Un collégien entre précipitemment: Un cahier de deux sous, s'il vous plaît, Mademoiselle!
La marchande. Voilà, Monsieur!
Le collégien. Merci! Vous marquerez, n'est-ce pas?
(Il remet son chapeau sur la tête et sort.)
La dame. ...?
La marchande....? (Les regards se croisent.)
La dame. C'est comme ça souvent, je pense?
La marchande. Madame, vous devriez venir un matin, à l'heure de la récréation!
La dame. Voilà une dizaine d'années que j'ai entendu parler de ce défilé chantant le même refrain dans votre magasin. Cela n'a donc pas changé?
La marchande. Mais, Madame, si je n'avais pas ces comptes qui tiennent mes clients, je ne pourrais pas tourner...
La dame. Alors vous les envoyez chaque mois, je suppose, pour que votre commerce puisse marcher?
La marchande....?
La dame. Au moins tous les trois mois, puisque vous avez à payer vos traites chaque trimestre?
La marchande. Madame, j'ai essayé, car cela m'aiderait et me tirerait souvent de peine, mais la majorité de mes clients ne me paie tout de même que tous les six mois... il y en a qui, étant à la campagne, en été, ne veulent pas recevoir leurs factures et attendent ainsi une année... ou davantage avant de me payer!
La dame. Il me semble que, si les familles honorables qui sont votre clientèle se doutaient de la gêne dans laquelle vous met cette habitude de ne payer que deux fois par an, on vous prierait d'envoyer plus souvent vos notes.
La marchande. Il est évident que mes créanciers à moi n'attendent pas...
La dame. Il vous arrive, alors, d'avoir en janvier seulement le paiement de marchandises achetées au mois de janvier précédent!
La marchande. Oh! si c'était en janvier que cela rentrait, mais c'est souvent en février, en mars...
La dame. Il me semble que je ne pourrais pas supporter de devoir, ne fût-ce qu'une toute petite somme, si longtemps!
La marchande. Les comptes sont quelquefois dérisoires, et cela nous prend beaucoup de temps pour 2 à 3 francs!
La dame. En effet, si on vous payait à mesure, vous auriez votre argent
disponible de suite pour vos traites et moins de fatigues et d'heures de travail en juin et en décembre.
La marchande. On a pris l'habitude de faire marquer, c'est pour cela qu'on revient... Et je suis obligée de prendre mon mal en patience, il y tant de concurrence!
La dame. Mais ne trouvez-vous pas déplorable que des enfants, des jeunes gens soient incités par leurs parents à ouvrir des comptes ici et là? Il y a longtemps que votre magasin a la réputation d'être assailli par de jeunes «non payeurs».
Les étudiants d'il y a 15 ans sont devenus des pères et des mères. Qu'auront-ils enseignés à leurs enfants s'il ont pris l'habitude, tout petits, de ne pas payer comptant?...
La marchande. Inconsciemment, ils leur ont appris cette phrase qui nuit à tant et tant de commerçants: vous mettrez ça sur le compte! et, de même qu'il ne s'informaient pas si et comment payaient leurs parents, ils attendent peut-être, sans aucune mauvaise volonté, six ou huit mois avant de payer les dettes de leurs enfants et les leurs!»
Mères chrétiennes, prenons garde de scandaliser un de ces petits. Que la droiture la plus sticte préside à toutes nos actions; ne disons pas: ce sont de petites choses dont ils ne s'aperçoivent pas; les enfants voient tout ce qui passe autour d'eux.
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