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Les habitudes
Il est dans une première éducation bien conduite un avantage, secondaire sans doute, mais presque impossible à remplacer, celui d'accoutumer l'enfant à s'acquitter sans y songer de cette multitude d'actions qui ne méritent pas qu'on y songe, et qui ont pourtant leur utilité. En chargeant les habitudes du soin de lui faire remplir certaines obligations en quelque sorte matérielles, celles qu'imposent notre nature physique et les conventions tacites de la société, c'est affranchir l'âme de ce soin pour l'avenir. Plus à cet égard on se prévaudra de l'instinct d'imitation, plus on s'épargnera le chagrin d'avoir à pescrire comme des devoirs, des choses qui n'en sont point, et qui sont pourtant à peu près indispensables. C'est là un service inappréciable à rendre à l'enfant. Quel embarras, quelle gaucherie, quelle perte de pensées et de temps ne cause pas chez les hommes faits le doute sur la convenance des moindres actes!
Cette même faculté d'association, qui facilite à l'enfant l'apprentissage du langage, fait naître les habitudes chez lui. Quand le cours de sa vie est bien réglé, ses désirs se succèdent dans un ordre à peu près fixe, en suscitant l'image de certains objets devenus nécessaires à ses jouissances... J'ai vu un enfant de neuf mois pleurer amèrement et refuser son déjeuner, parce que la tasse, la soucoupe et la cuiller n'étaient pas dans leur position accoutumée. En profitant de cette disposition des petits enfants, nous leur donnerions aisément le goût de l'ordre. Le besoin de voir chaque chose rangée à sa place devient naturel chez eux, pour peu que nous paraissions l'éprouver nous-mêmes. Quand on pense aux regrets amers que l'absence des habitudes d'ordre laisse dans la suite, on devrait s'appliquer à les faire contracter aux enfants. Une idée vague de devoir s'y associe et le devoir n'est peut-être lui-même que l'ordre moral le plus élevé.
Le goût de la propreté a la même source; une tache est un déplacement, un désordre. Le goût naturel qui s'y associe, ajoute la répugnance des sens à celle de l'esprit. La pudeur est aussi de même famille, et il n'est rien de plus facile que d'inspirer aux enfants cette modestie instinctive qui, pour être dénuée de motifs, n'en est que plus innocente.
Ce dernier objet, trop négligé dans la première enfance, est néanmoins bien important. Au risque de paraître absurde, jle dirai qu'il l'est surtout pour les petits garçons. L'usage seul impose si sévèrement la loi de la décence aux jeunes filles, qu'à moins d'une négligence rare, les moeurs de celle-ci, dans l'âge tendre, ne sont exposés à aucun danger. Mais il n'en est pas de même à l'égard des hommes; les écoles sont déjà un écueil pour eux, et la manière dont l'enfant accueillera les mauvais exemples dépend entièrement de ses premières impressions. Les mères doivent être attentives; elles doivent surveiller les bonnes et ne pas souffrir qu'il s'associe dans l'esprit de l'enfant aucune idée de gaîté à celle du manque de décence. Il convient que le soin de sa propre personne lui soit confié le plus tôt possible, et qu'il s'en acquitte solitairement. Dès lors il prend souvent une pudeur craintive et presque farouche, mais comment craindre l'excès dans un rnouvement qui s'allie de si près à la dignité de l'âme?
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