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Amour aveugle

Mon enfant bien-aimé, je ne veux pas que jamais tu saches ce qu'est la souffrance, tant que je vivrai tu ne connaîtras ni la peine ni le chagrin, je me mettrai entre eux et toi!

Ainsi parlait une jeune mère au bébé qu'elle serrait dans ses bras, avec toute la tendresse d'un premier amour maternel.

Que vous êtes égoïste et cruelle! lui répondit quelqu'un qui avait entendu ces paroles. Egoïste? Cruelle? répéta la jeune mère. Egoïste, - quand j'aime tant mon enfant? - Cruelle, - quand je veux lui épargner les expériences qui le feraient souffrir?

- Oui, car ce n'est pas ainsi que Dieu agit envers ses enfants, répondit l'ami doucement.

- Oh! je le sais, s'écria la mère avec un peu de véhémence. Mais Dieu est cruel. Il s'appelle notre Père, et Il dit qu'Il a compassion de nous comme nous de nos enfants. Je ne dirais pas que j'aime mon fils et que j'ai compassion de lui, si je le laissais volontairement faire les terribles expériences que font tant de gens. Si j'étais le Tout-Puissant, je ne laisserais souffrir aucune de ces innocentes petites créatures.

- C'est l'amour qui vous fait parler ainsi, mais un amour aveugle, fit l'ami, car de cette manière vous priveriez votre enfant de son divin droit de naissance. Nous sommes trop ignorants pour juger l'infini.

- Je ne vous comprends pas! répondit la mère.

- Vous ne connaissez rien encore des grandes douleurs, des grandes affections, ni des grandes joies de la vie. Quelqu'un a dit: Il vaut mieux être malheureux que de n'avoir jamais vu le danger. C'est le droit de tout être humain d'apprendre, d'aimer et de souffrir. C'est aussi son droit de croire, de se confier, quitte même à être trompé dans ses espérances.

- Oh! s'écria la jeune mère en frémissant, heureusement que mon bébé n'est pas une fille; au moins il ne saura pas ce que c'est que la trahison ou l'abandon. - Dites, - est-ce là encore un droit de naissance divin?

- En soi-même, non, mais sans la trahison et l'abandon, il y a des âmes qui n'auraient jamais connu la vérité, répondit l'ami.

La jeune mère secoua la tête. Si j'avais une fille, je la garderais si bien, dit-elle, qu'une telle détresse ne l'atteindrait jamais.

- Laisserez-vous votre fils apprendre à marcher?

- Sans doute!

- Ne pensez-vous pas qu'il pourra tomber, se heurter, se faire mal?

- Oh! je veillerai, il ne lui arrivera aucun accident.

- Il devra pourtant apprendre lui-même à marcher, vous ne pourrez pas marcher pour lui. Et plus tard, apprendra-t-il à nager?

- Peut-être! dit la mère en hésitant.

- Même avec le meilleur des maîtres, ne faudra-t-il pas qu'il apprenne aussi lui-même?
et le fera-t-il sans rencontrer de difficultés? - Il faudra que tout seul il se lance à l'eau, qu'il connaisse d'avarice tous les dangers qu'il rencontrera dans cet emploi de sa force corporelle, c'est son droit. Pourrez-vous l'empêcher de courir, de grimper, de lutter avec ses camarades? Dans tous ces exercices, l'enfant rencontrera des difficultés, des dangers aussi, de la souffrance peut-être. Il y a des enfants qui apprennent ces choses plus vite que d'autres, mais ce sont, en général, ceux qui ne sont pas élevés par des mères ou des protectrices trop craintives. Eh bien, il en est de même pour nos enfants dans le domaine moral et dans le domaine intellectuel. Ne nuisons pas au développement de leur intelligence en les habituant à la paresse ou au plaisir, sous prétexte de leur éviter une peine. Nous pouvons en faire des géants, n'en faisons pas des nains.

Est-ce vrai au point de vue moral aussi? demanda la mère anxieuse, est-il nécessaire que nos enfants voient le mal de près pour acquérir plus de force de caractère?

L'ami hésita à répondre. Il sentait que son expérience était plus grande que celle de la jeune femme et craignait de lui donner une impression inexacte de sa pensée. Il répondit enfin:

- Ignorance et innocence ne sont pas synonymes. On peut être ignorante non point innocent. Ce qui vaut plus que l'innocence c'est la vertu, c'est-à-dire cette qualité qui rend l'être humain capable de résister à la tentation et de la vaincre. Ce qui rend fort ce n'est pas d'ignorer le mal, c'est de le surmonter par le bien. Si l'on avait, de bonne heure, avec sagesse, préparé l'enfant à la lutte de la vie, la jeune fille aurait-elle pu être trompée? N'aurait-elle pas su alors prévoir le danger et éviter la chute et la souffrance? Nous devons, nous parents, nous convaincre que Dieu est plus sage en nous offrant les occasions de rester fermes devant le mal, que nous ne le sommes en cherchant à garder nos enfants dans l'ignorance.

- Devons-nous donc renoncer à veiller sur nos enfants s'écria la jeune mère, devons-nous les laisser livrés à eux-mêmes sans protecteur, dans ce monde dépravé et méchant?

- Oh? non, certes, nos enfants ne connaissent pas leur responsabilité; c'est notre tâche à nous parents, de la leur faire comprendre, de guider leurs pas dans le droit chemin, tout en les protégeant contre le mal. Nous devons leur montrer les dangers semés sur leur route, leur apprendre à lutter contre la tentation et à la vaincre. Et ce sera enfin la meilleure manière de les protéger que de les rendre vertueux.

La jeune mère serra plus étroitement encore son bébé, contre son sein et bouleversée
par la grandeur de la tâche - incomprise jusqu'alors, elle dit:

- Je vois que le problème du mal dépasse ma compréhension. Un poète a dit: Le mal n'est que l'ombre du bien. Si nous considérons le problème de la vie et ce que nous appelons maux: le péché, la souffrance, la maladie, la mort, nous sommes surpris de découvrir qu'après tout ils ne sont pour nous que des occasions. Si nous n'avions pas d'obstacles à surmonter, nous ne pourrions devenir forts; si nous n'avions jamais de larmes a verser, nous ne connaîtrions pas l'émotion divine qu'est la sympathie. C'est par le mauvais emploi des meilleurs dons de Dieu que l'homme est plongé dans les profondeurs des ténèbres que nous appelons péché et mal, mais par un sage emploi des mêmes dons, nous devenons non seulement forts, mais aussi tendres, miséricordieux, sympathiques, charitables.

C'est cela qui en réalité nous fait dépasser la stature de l'homme naturel et atteindre celle de l'homme idéal.









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