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(Sans titre)

Depuis quelques années s'est fondée à Paris une entreprise philanthropique à laquelle on a donné le nom de «Semaine de la Bonté». Les organisateurs de ce mouvement ont eu l'idée de mettre à part une semaine pendant laquelle on s'ingénierait à donner de la joie aux déshérités de ce monde. C'est ainsi que chaque malade des hôpitaux de Paris reçoit une fleur avec une jolie carte illustrée portant ces mots: «Des amis inconnus pensent à vous». On a songé aussi aux prisonniers. Des artistes professionnels (qui ont tenu à taire leur nom) se sont offerts à aller donner un concert dans plusieurs prisons, en particulier à la Petite Roquette et à Fresnes où sont internés de jeunes détenus des deux sexes. Ce n'est pas sans peine qu'on a obtenu l'assentiment de la Direction. Celle-ci craignait que cette infraction aux règlements n'amenât de graves perturbations dans la discipline. A force d'insistance, l'autorisation a été donnée; mais des conditions très strictes ont été posées. Il a été stipulé que cette manifestation aurait un caractère purement laïque, que le nom de Dieu ne serait pas prononcé, pas même dans les chants. D'autant plus frappante est l'impression produite sur les auditeurs.

Nous reproduisons ci-dessous quelques fragments des lettres qu'ils ont écrites spontanément, soit aux artistes auxquels ils tenaient à exprimer leur reconnaissance, soit à leurs familles.

De la prison des jeunes filles: (1)

Monsieur le Directeur. - C'est avec regret que j'ai vu se refermer la porte de ma cellule et que j'ai vu partir cette musique, car j'ai été très impressionnée par le charme et l'émouvance de tous ces morceaux. C'est avec une infinie gratitude que je veux vous remercier de cette distraction que vous avez eu la bonté de nous offrir à nous qui ne le méritons pas, peut-être. Croyez, M. le Directeur, à la reconnaissance de mon coeur depuis si longtemps privé de toutes satisfactions et cette musique était faite pour me soulager et m'attendrir.

Noëlie.


Monsieur. - Cela fait une très grande impression surtout en pensant que ses artistes ont penser à des enfants qui n'ont pas su écouter leurs Parents et qu'ils ont eu la bonté de distraire pendant une heure; cela donne beaucoup à réfléchire et le coeur se sent ému malgré soi... J'ai pleuré en écoutant car si j'avais su obéir à mes Parents, je ne serais jamais venue en Prisons... Je vous remercie beaucoup d'avoir eu la bonté de permettre à ses artistes de révêler mes pensées et de nous avoir procuré une bonne heure que je me souviendrai ma vie entière.

M.


M. le Directeur. - Que de bons sentiments, j'aie ressentie, en entendant cette musique si harmonieuse et si pure, quelle différence avec celles que j'ai ecoutées jusqu'alors et combien j'aie compris que les personnes qui la jouais, avait un autre esprit que le mien... J'espère qu'elles ont ressenti la même impression que moi et qu'elles penseront à cette petite séance comme à la parole de Dieu.

Paulette.


Il est vraiment impossible d'exprimer par des mots l'émotion qui s'est emparée de moi lorsque j'ai entendu cette musique, je me sentais littéralement emportée et il me semblait que j'étais bien loin bien haut et malgré moi, lorsque chaque morceau était terminé des larmes perlaient à mes yeux. Vraiment ces accords étaient bien loin de ressembler aux Jazzband habituels cela ne me donnait guère envie de danser un charleston endiablé. Ça me faisait penser à ma vie passée pour la regretter hélas! J'ai eu en écoutant ce concert le sentiment du beau que la musique exprime si bien, mieux qu'aucun mot ne pourrait le faire... non seulement le réconfort d'un bon moment, mais encore la notion exacte qu'avec de la bonne volonté, de la force de caractère on peut malgré sa déchéance se refaire une vie...


Cher papa... je t'assure que je me sens tout autre je voudrais bien réparer toutes les peines que je t'ai faites, cher papa, rien ne vaut la solitude et la musique pour reconnaître ses torts.

Hélène.


Je viens de vivre quelques moments de merveilleuse émotion... cette musique divine me transporta d'émotion et pendant quelques instants j'oubliais tout et mes souffrances et le lieu où je me trouvais. J'ai versé de douces larmes qui ont apaisé mon coeur, purifié mon âme. Je ne saurais traduire ces beaux sentiments que j'éprouve...

Amélie.


Le temps que cette musique berceuse et lente jouait, je pensais combien l'honnêteté est belle aussi... il me semblait que chaque note me reprochait ma mauvaise conduite aussi, chers parents je vais racheté tout ce que j'ai fait et me refaire une vie honnête et laborieuse.

Juliette.


Le Directeur de la prison a reconnu l'excellent effet de la musique sur les jeunes détenues. Voici en quels termes il remercie l'initiatrice du mouvement: Permettez-moi de vous présenter mes remerciements personnels en vous faisant connaître que votre séance contrairement à mes appréhensions premières, n'a eu aucune conséquence fâcheuse sur la discipline générale de l'établissement. Je n'ai eu aucune sanction à prononcer pour infraction consécutive à ce mouvement exceptionnel de la population. Je suis, personnellement heureux de vous en informer.


De la prison des jeunes hommes:

Chers Amis, chers Bienfaiteurs, - jamais je n'aurais cru, avant cette journée du 29 décembre, qu'il pût exister, en dehors des murs de cette prison des gens au coeur si généreux et si bon, pour s'occuper de nous jeunes détenus, avec autant de bienveillance et de douceur. Et c'est pour vous remercier de ce bien être que votre générosité a bien voulu nous prodiguer, que j'ai griffonné ces quelques lignes.
Combien fut douce pour moi cette heure agréable passée au son d'une musique harmonieuse et touchante à la fois. Aux premiers accords de cette douce mélodie, je me suis senti transporté dans une toute autre atmosphère que celle de cette prison où je suis actuellement; il me semble que quelque chose qui jusque là m'oppressait se dégageait et je me suis senti plus libre et mieux à l'aise. Il me sembla que j'étais revenu au bon temps où ma conscience ne me reprochait pas d'être un voleur et où j'étais si heureux. Et ainsi non, seulement ce concert fut pour moi un divertissement, mais ce fut mieux encore, ce fut pour moi l'occasion de comparer l'honnête homme que j'étais autrefois au coupable que je suis maintenant.

En me sentant si libre, si dégagé de ce poids qui jusqu'alors m'oppressait, je vis tout le contraste qui existait entre ces deux hommes qui en réalité n'en forment qu'un seul. Et je m'aperçus combien sont heureux ceux dont le coeur est content et la conscience satisfaite, et c'est plus ardemment que je désire me racheter aux yeux de tous et me faire pardonner de ma famille en m'efforçant de travailler honnêtement et courageusement et en redevenant ainsi le bon sujet que j'aurais dû toujours être si j'avais écouté les sages conseils de ceux qui s'intéressent à moi. Et ainsi, c'est grâce à vous, à votre bon coeur que je serai devenu meilleur, c'est pourquoi je tiens à vous remercier bien humblement de cette journée que vous avez su faire si douce pour nous tous et de laquelle j'ai tiré tant de profit...

Ainsi vous aviez pensé à tout ce qui pouvait nous faire oublier un peu cette captivité si dure pour des corps encore jeunes et avides de grand air et de mouvement. - Bien humblement.

M.


Chers bienfaiteurs et amis. - Permettez-moi de vous appeler de ce nom, puisque l'autre jour le Monsieur qui s'est fait l'interprète de Tous et de Toutes, nous a appelés de ce nom: Amis. Aussi si vous saviez ce que cela nous a fait plaisir, ce que cela au milieu du malheur nous console. Surtout moi, et ceux qui, comme moi, n'ont plus leur père ni leur mère, qui comme moi, n'ont pour ainsi dire jamais su ce qu'était le grondement d'un père, le pardon d'une mère; oh! si vous saviez comme il est doux pour nous de se sentir des amis, si vous saviez ce qu'il nous est doux de savoir qu'au dehors des murs de cette prison, il y a malgré tout des gens qui nous aiment et qui pensent à nous.

M. L.


Le concert que vous nous avez fait l'autre jour, m'a fait beaucoup de bien à moi, pour ne parler que de moi, la musique ne m'est pas connue, mais j'ai senti qu'elle était belle et pure.

Pour ma part vous avez atteint votre but, car durant le temps que j'ai écouté votre belle musique, j'ai pris la ferme résolution de changer de vie.

C'est si doux lorsque moralement on souffre beaucoup, de savoir que des amis pensent à nous.

Je viens au nom de moi-même et de tous mes camarades de malheur, vous remercier de votre gentillesse d'avoir pensé à nous. Oui, car si nous vivons en marge de la société, nous n'avons malgré tout que 20 ans et même beaucoup ne sont que des gamins qui la plupart ont bon coeur.

La plupart n'ont connu dehors aucune affection, aucun soutien moral, aucune tendresse dans la chapelle si froide comme d'habitude, un chaud rayon a réchauffé nos âmes, la belle musique nous a chassé l'inquiétude et l'angoisse dont nos coeurs étaient pleins...

- Aujourd'hui des amis qui nous aiment dans nos souffrances, malgré nos fautes d'ici-bas ont bien voulu nous faire un concert de musique avec chant. Ça nous a fait du bien...

- J'avais fini ma lettre, mais j'ajoute ces quelques lignes pour te dire, maman, combien je suis content. Des dames bonnes sont venues nous faire de la musique et chanter. Que le premier morceau était beau, ainsi que le chant. J'ai pleuré de bonheur.
J'étais subjugué par une force mystérieuse et chaque fois qu'un morceau de musique était terminé, j'avais les larmes aux yeux... je ne puis dire l'effet que j'ai ressenti, c'est inexplicable, surtout pour le premier morceau de musique, le dernier, et celui de violoncelle. C'était palpitant.


(1) Nous conservons le style et l'orthographe.









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