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Les « Entretiens sur l'éducation » est un mensuel publié sans interruption depuis plus de 100 ans.
Le site www.entretiens.ch vous offre la possibilité de consulter en ligne ces extraordinaires archives parcourant/ponctuant au jour le jour l'histoire de l'éducation familiale d'un bout à l'autre du XXème siècle.
La survie de la brochure mensuelle imprimée parallèlement à la distribution virtuelle à travers le site est le garant de la poursuite de cette aventure. La rédaction est assurée de façon bénévole par un groupe de parents passionnés par la réflexion et l'écriture autour du vécu familial. Les frais d'impression du journal et la gestion du site (100 000 pages demandées par mois??)....30.- par an (20€).
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La liberté dans l'Education de nos enfants (1)

Une bonne méthode dès le tout jeune âge c'est de favoriser les petites expériences personnelles - en partant des tendances innées à l'enfant - de les exercer à des objets nouveaux, en graduant l'effort à faire et lui faisant apprécier le résultat de son travail. Je recommande donc spécialement la méthode expérimentale: collections de tout ce qui peut se trouver à sa portée: pierres, feuilles, fruits, etc. Lui faire palper, toucher les objets pour le mettre en contact avec la nature. Les constructions, le jardinage, etc. Favoriser des réactions, implanter des habitudes. W. James dit que l'habitude est dix fois plus forte que la nature! Faisons donc de notre système nerveux un allié et non un ennemi.

Aidons l'enfant à transformer les idées confuses qu'il a de toutes choses en idées claires et simples; c'est la base de la science.

Pour cela apprenons-lui à avoir de l'ordre, à classer ses idées, à expliquer ce qu'il fait et pourquoi il le fait.

1. Faisons-lui découvrir ce qu'il désire savoir (méthode socratique);

2. Donnons-lui les connaissances dont il a besoin (méthode dogmatique);

3. Posons-lui des problèmes qu'il s'efforcera de résoudre (recherche personnelle).

Surtout encourageons-le de toutes manières à faire usage de toutes ses facultés.

Education morale. Eduquer un enfant c'est l'élever, c'est donc affaire d'influence personnelle de l'éducateur sur l'enfant et d'échange entre deux êtres.

«Soyez ce que vous voulez que les autres deviennent; que votre être et non vos paroles soient une prédication». (Amiel). Puis allez bravement de l'avant pour faire acquérir à vos enfants de bonnes habitudes. Ne souffrez aucune exception, jusqu'à ce qu'elles soient bien implantées. Ne sermonnez pas trop, n'abondez pas en paroles excellentes mais abstraites qu'ils n'écoutent guère. Attendez plutôt l'expérience pratique et amenez votre enfant à réfléchir, à sentir et à agir.

Mon père pratiquait volontiers l'ascétisme mais pour lui seul et si discrètement, que nous, ses enfants, nous nous en apercevions à peine. C'est ainsi qu'il jeûnait régulièrement une fois par semaine, se privant de son repas pour l'apporter à une famille nécessiteuse; (ce n'est que beaucoup plus tard que je me suis rendu compte qu'il s'agissait d'un renoncement volontaire, je croyais qu'il n'avait pas faim ou qu'il s'abstenait de manger pour raison de santé). Nous avions une vieille voisine que des crises de rhumatisme clouaient fréquemment sur son lit; son humeur était fort revêche. Mon père allait la voir et lui apporter à manger. Un jour qu'il souffrait lui-même d'une douleur au genou qui lui rendait la marche difficile, il me pria de monter à sa place chez la pauvre vieille, j'y consentis volontiers mais mon père ajouta: «il te faudra la faire manger à la cuiller, car elle ne peut se servir seule». Cette idée m'effraya fort et je m'écriai: «Oh! non, papa, je ne puis pas faire cela». «Eh bien! me dit mon père, je vais essayer d'y aller moi-même». Il frictionna son genou endolori, et se mit à monter l'escalier de bois qui conduisait chez la voisine, en s'accrochant à la corde poisseuse qui tenait lieu de rampe. A peine eut-il disparu que j'eus honte de mon égoïsme et je me mis en devoir de le suivre. Arrivée à la porte de la mansarde, je m'arrêtai un moment, et j'entendis mon père qui aidait la vieille femme à s'asseoir sur son lit tout en lui parlant d'une voix encourageante. Elle ne cessait de se plaindre et de gémir. «Attendez, je vais vous mettre un coussin, vous verrez bien que cela ira.» Quand il l'eut enfin installée, il se mit à lui donner à manger comme aurait pu le faire une mère pour son enfant malade. Je me glissai tout doucement près de lui. Il posa sa main sur ma tête en disant à la femme: «Voilà ma petite fille qui est venue vous aider à manger». Mes débuts ne furent pas heureux; la malade ne voulait rien accepter de ma main, disant que je ne savais pas m'y prendre, mais mon père lui fit observer avec douceur qu'il ne fallait pas décourager ma bonne volonté, qu'ainsi, je ne pourrais pas faire mon apprentissage. Elle consentit alors à avaler, quelques cuillerées de soupe que je lui donnais. Tandis que nous redescendions l'escalier ensemble, mon père me dit: «Je te remercie d'être montée chez la voisine» et cela me fit plus d'impression que s'il m'avait adressé une sévère réprimande.

Un effort demandé, un ordre donné doit être en relation avec ce qu'il y a de plus profond dans l'âme de l'enfant et faire appel à sa conscience: C'est le «tu dois» impératif intérieur et non le «je veux que…» qui doit faire agir.

Ce qui est d'une importance capitale pour l'éducation c'est que la personnalité spirituelle donne son consentement et qu'elle n'ait pas à souffrir de la façon dont s'exerce la discipline.

Il faut éveiller l'énergie morale profonde qui a sa source dans l'être spirituel.

Il faut que les enfants sachent pourquoi ils travaillent, pourquoi ils doivent prendre de l'empire sur eux-mêmes, pourquoi ils doivent être consciencieux. «L'homme travaille en vue de son perfectionnement intérieur. Quiconque a goûté une fois la saveur d'un travail fidèlement poursuivi, ne peut plus y renoncer.»

Il faut donner à l'enfant des forces spirituelles, faire appel à son initiative; c'est le fondement de toute éducation de la liberté digne de ce nom, car l'enfant qu'il s'agit d'élever ne doit pas rester ce qu'il est, il doit être élevé à quelque chose de mieux, de plus grand, de plus fort.

Et l'on n'y arrivera pas sans une obéissance volontaire et stricte.

Quel changement n'observe-t-on pas dans l'expression d'un visage d'enfant dès qu'on lui a fait voir dans son acte d'obéissance non un joug imposé, mais une œuvre d'amour qu'on réclame de lui!

Une fillette avait à faire une couture difficile; elle s'impatientait et plus sa mauvaise humeur croissait, moins l'ouvrage avançait sous ses doigts. Je m'approchai d'elle et lui dis: «Représente-toi que tu es une maman et que tu couds une petite chemise pour ton bébé. Les mamans trouvent que rien n'est assez beau pour leurs petits enfants; elles voudraient que le linge qu'ils portent soit aussi finement cousu que possible. Qu'est-ce que tu ferais?» Aussitôt l'expression de l'enfant changea: «Oh! s'écria-t-elle, je roulerais mon étoffe comme cela, puis je prendrais du fil très fin, une aiguille bien fine, et je ferais de tout petits points». Elle se mit à l'œuvre et réussit si bien que je lui promis de lui faire faire ensuite une chemise pour sa poupée. Il faut très peu de chose pour changer les dispositions d'un enfant, et je suis frappée de voir combien l'on y arrive souvent en faisant appel à leur imagination, en leur demandant «Que ferais-tu dans tel cas donné?»

Nous fortifierons grandement l'élément spirituel chez l'enfant en ne nous lassant pas de le faire intervenir même dans les plus petites choses, comme le motif suprême.

La famille bien organisée, basée sur les principes de haute moralité, de respect réciproque, d'amour constant et désintéressé du Bien pour le Bien, le sentiment profond du devoir envers les enfants et la Société contribue grandement à rendre la vie sociale réglée et normale.

De plus, les parents et les éducateurs doivent inspirer par leur tenue morale et par tous les actes de leur vie le respect, ce sentiment fait de crainte et d'amour si bien analysé par M. Bovet dans son «Essai de psychologie morale».

«Si tous nous avons ressenti du respect tous nous en inspirons. Il n'y en a point parmi nous qui soit si chétif, si peu aimable qu'il n'inspire de respect à personne, quels que nous soyons il est autour de nous des petits qui regardent à nous. Pour ces petits mettons-nous au service d'un grand idéal. Respectons quelqu'un ou quelque chose qu'ils puissent après nous respecter. De façon que le respect que nous leur inspirons bien loin de contrecarrer celui qu'ils ressentiront à leur tour pour un idéal inconditionné les y prépare au contraire.

Soyons nous-mêmes si respectueux de ce qui est souverainement respectable que nos enfants n'aient point à nous haïr pour devenir les disciples du Maître qu'ils choisiront.»

Education, non dressage. Il faut travailler en vue du perfectionnement intérieur de nos enfants. Développer chez l'enfant, à mesure qu'il grandit la connaissance de soi-même, favoriser l'effort de la pensée qui devient la conscience; cultiver l'imagination: rêve de beauté ou de bonheur que chacun se forme à son gré; cette faculté soutient l'âme dans les heures difficiles et lui aide à dépasser la réalité.

Vers l'âge de 14-15 ans, je fus atteinte d'une coxalgie qui m'immobilisa pendant près de deux années sur un lit d'hôpital. Je ne sais ce que je serais devenue sans les lettres de mon père qui étaient pour moi un véritable viatique, à tel point que le docteur, lorsqu'il entrait dans ma chambre, devinait, rien qu'à l'expression de mon visage, que j'avais reçu ma bienheureuse lettre. Mon père m'écrivait que, si mes jambes étaient immobilisées, rien au monde ne pouvait retenir mon imagination captive et il me décrivait sous des couleurs riantes les belles promenades que nous ferions ensemble, plus tard, quand je serais guérie. Ainsi, j'escaladais en pensée des pentes herbeuses, je cueillais des fleurs parfumées et j'en oubliais la triste réalité.

Entretenons ainsi le sentiment: enthousiasme, admiration, amour; c'est le premier moteur des actes humains; il pénètre et provoque l'action.

La tâche éducatrice est toute d'amour et d'intérêt spirituel; l'éducateur doit s'oublier soi-même et son intérêt personnel, sa plus haute récompense est dans la conscience qu'il a d'accomplir une œuvre utile et belle. Il y trouve la force et la joie.

L'artiste cherche à réaliser un rêve de beauté. L'éducateur qui a un haut idéal pour lui et pour ceux qui lui sont confiés, travaille à une œuvre de même nature que l'artiste. Il veut que ceux qu'il éduque soient meilleurs que lui qu'ils vivent une vie plus haute, plus belle, plus noble et il contribue ainsi au seul réel progrès, qui est le progrès de la vie spirituelle. Ce sentiment, ces aspirations, lui donnent sa part de bonheur dans la vie, il ne peut rien lui être souhaité de meilleur et de plus beau.

Mais, disons-nous, qui est suffisant pour ces choses?

Comment nous affranchir de nos propres imperfections pour atteindre cet idéal?

Aucune mère, aucune éducatrice n'est par elle-même à la hauteur d'un tel programme d'éducation.

Pour aider à former des caractères, pour amener nos enfants à la vraie liberté, je ne connais - pour ce qui me concerne - qu'un moyen: s'asseoir jour après jour aux pieds du Christ, notre Maître, recevoir et apprendre de Lui, en toute humilité ce que nous désirons communiquer aux chers enfants qui nous sont confiés. «Si le Fils vous affranchit vous serez véritablement libres» (Ev. S.-Jean VIII, 36.).


(1) Suite de la causerie de Mlle Brechbuhl.









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