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L'enfant et la nature.
Le poète, Carl Spitteler, a publié un volume extraordinairement attachant, intitulé: «Mes premiers Souvenirs». Les scènes qui suivent se placent dans la première enfance du poète, il n'avait pas encore trois ans.
«Je dois à la bonté de mon grand-père d'avoir savouré, un matin, un pur, un calme, un délicieux morceau de vie. Aujourd'hui encore, je lui en suis reconnaissant. Il se rendit à une petite prairie qu'il possédait au-delà du pont et me prit avec lui. Pendant qu'il y travaillait à je ne sais plus quoi,… il me laissa me ballader dans l'herbe, où je le voulais et le pouvais. Il n'y avait pas de danger que je lui échappasse. Je n'avais guère la force de m'éloigner tout seul… Tout joyeux, je m'étais mis le long du ruisseau en quête de ce que j'y pourrais trouver de neuf, quand il m'arriva une merveilleuse aventure: une cigogne, une véritable cigogne vivante s'approcha de nous. Elle se promenait dans l'herbe, à deux pas de nous, comme si elle nous eût appartenu. Pour un peu, mes mains auraient pu la saisir. Elle était belle, ineffablement. Le ravissement dura longtemps, très longtemps, l'oiseau ne s'en allait pas. Tout de même, hélas! il finit par s'envoler sur le toit de l'église. Et nous, nous revînmes à la maison, nous rentrâmes dans la banalité quotidienne. Mais comme ç'avait été beau. Vraiment, il n'y a pas de mots pour le dire.» Une autre fois, on assied le bambin dans un champ «sous un grand arbre élancé qui me plut énormément. On voyait luire le ciel à travers ses branches, et ses rameaux portaient en nombre infini des bouquets de jolies petites baies rouges et rondes comme des balles. Mais voici paraître Tonton et les deux fils de parrain. Ils appliquent une échelle contre l'arbre et ils y grimpent, pleins de courage, à des hauteurs vertigineuses. C'était aussi étonnant qu'amusant à regarder.
Mais je n'avais pas encore vu le plus beau, ils m'apportent de ces baies, m'en suspendent aux oreilles et m'engagent à les manger. Ils disaient vrai: c'était bon, c'était exquis, meilleur que du sucre. Un arbre qui dispense les bonbons, ni plus ni moins qu'une grand'mère! Si ce n'est pas une merveille! Dès cet instant, j'ai nourri pour le cerisier une tendresse particulière.
Il est certain qu'à faire dans sa prime enfance connaissance avec la nature (j'entends avec les choses terrestres qui sont en plein air), on se trouve vis-à-vis d'elle dans des rapports de sentiment tout autres que si on apprend à la connaître plus tard, au cours des promenades et des excursions. En outre, si ce premier contact a lieu sur le sol même de la propriété de famille, il s'en développe comme une parenté spirituelle avec les choses. Les figures aimées de nos proches déteignent un peu sur la campagne à l'entour. Petit enfant, je n'ai jamais vu la nature, les paysages… que dans la société des miens. C'est pour cette raison, je pense, que ce que d'autres appellent le sentiment de la nature se confond chez moi avec le sentiment de la patrie…»
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