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Des rapports de la famille et de l'école

D'après une causerie que Mme Louisa Tapernoux, institutrice, a présentée à l'Association veveysanne de mères et d'éducatrices.

Je vous ferais injure, Mesdames, si je doutais qu'il y eût en vous quelque sympathie, voire quelque reconnaissance envers ceux qui assument la tâche aussi lourde que difficile d'instruire et d'éduquer vos enfants.

Et pourtant! mon expérience de tant d'années m'a appris que dans 90 cas sur 100, le père, la mère se désintéressent infiniment trop de ce qu'est leur enfant à l'école, de ce qu'il y fait.

Dans sa prime enfance, alors qu'il a encore besoin d'un appui, la maman conduira son tout petit à l'école enfantine et, pour la première fois, à l'école primaire. Elle veillera à ce qu'il apprenne ses lettres ou son vocabulaire…

Petit à petit, on desserre la bride; finalement, on la laisse flotter librement sur le cou de l'écolier et cela, au moment où il aurait le plus besoin d'être guidé d'une main ferme, de sentir derrière l'autorité du maître, celle aussi solide qu'approbatrice de son père, de sa mère. Au lieu de cela, trop souvent on parle avec désinvolture et en termes plutôt malsonnants de ce maître - qui n'est pas une perfection, c'est entendu - mais qu'on devrait apprendre à l'enfant à aimer et à respecter. S'il est vieux, «il radote»; s'il est jeune, «c'est un blanc-bec qui n'y connaît rien» ; s'il punit, «il est injuste», et malheur à lui si le fils, qui n'a pourtant pas travaillé, et la fillette qui pense plus à ses jeux et à sa toilette qu'à ses livres, n'obtiennent pas un bon rang!…

Le plus souvent, vous jugez des progrès de l'écolier d'après son rang, ou vous discutez d'une note sans rien connaître ni de la classe ni de sa composition…

Parfois aussi sur le simple dire de votre enfant, vous échafaudez des hypothèses qui sont de vrais romans, vous faites les suppositions les plus abracadabrantes et portez les jugements les plus téméraires; il suffirait souvent d'un simple mot du maître pour éclaircir la plus troublée des situations! Vous savez fort bien que l'enfant «n'a jamais fait de mal! …» S'il «attrape» une mauvaise note, c'est que «son camarade causait»; s'il n'a pas su sa leçon, c'est que «le maître, de mauvaise humeur, lui a coupé la parole ou n'a pas pris la peine de l'écouter»; s'il est un des derniers, c'est «frouillé» tout simplement…

Voyons, mamans qui m'écoutez, vous savez bien que, malgré toutes nos imperfections, nous ne sommes pas l'ennemi. Vous m'avez tout l'air d'oublier une chose, c'est que vos enfants, nous les aimons bien plus profondément que vous ne l'imaginez! Pourquoi alors nous refuser votre confiance et votre crédit! …

Il m'est arrivé dans des cas graves, dans des affaires de vol, de m'adresser directement aux parents. De la plupart de ces entrevues, je suis sortie déçue, navrée parfois jusqu'à l'écœurement. Une fois, c'est un gamin de 8 ans qui s'empare de trois francs dans la boîte de la caisse d'épargne. Sa mère vient rendre la somme dérobée avec ces mots: «Surtout, je vous en supplie, ne le dites pas à son père!» Cela se passe de commentaire…

Un autre vole une montre dans le pupitre. Quand la maîtresse va la réclamer à la mère en lui reprochant de l'avoir recélée, celle-ci réplique avec le plus grand calme: «Il m'a dit l'avoir trouvée devant les TroisRois!»

Plus récemment, une fillette atteinte de kleptomanie aiguë me dérobe - absolument sous le nez - boîtes de plumes, papier à lettres, bobines, ciseaux, etc. Elle emporte dans son bas de l'argent à une camarade et complète par le tricot d'une voisine sa paire de bas non achevée pour les examens! J'en appelle au père. Sa mère détourne ma lettre, arrive chez moi hors d'elle et me dit: «Battez-la, Mademoiselle, battez-la, nous n'y pouvons rien!»…

Vous entendez donc que les parents nous invitent parfois à recourir à la violence; ils nous délèguent leurs pouvoirs et nous pressent d'en user, persuadés que dans certains cas un soufflet fait plus pour l'amendement des coupables que le plus sévère des sermons.

Défions-nous de ces pouvoirs qu'on veut nous accorder; si, dans un mouvement de colère, nous dépassions la mesure, ces mêmes parents seraient les premiers à nous jeter la pierre.

Cela me rappelle le savoureux conseil que donnait un jour la maman de deux fillettes: «La Louise, je défends qu'on la touche, parce qu'elle me ressemble, mais à la Marguerite, vous pouvez seulement y en donner! Elle est comme son père, elle se moque de tout!»

Sincèrement, ne croyez-vous pas, Mesdames, qu'avec une entente plus cordiale, plus étroite, entre la famille et l'école, nous aurions évité, pour une part du moins, le spectacle navrant qu'ont offert parfois nos jeunes filles à peine sorties de l'école?

Si vous n'avez pas su faire obéir votre fillette lorsqu'elle avait douze ou treize ans, ce n'est pas étonnant qu'à dix-sept ans elle échappe à votre contrôle. Si vous aviez uni votre faiblesse à l'énergie peut-être un peu rude de la maîtresse, n'eussiez-vous pas obtenu quelque bon résultat? Seulement, direz-vous, le temps nous manque. Nous ne pouvons quitter notre travail pour aller importuner un maître qui donne ses leçons! Quitter votre travail? L'âme de votre enfant en vaudrait pourtant la peine. Et puis, le domicile de l'instituteur n'est point un asile inviolable et je doute que celles qui y ont frappé poliment, discrètement, non point la menace à la bouche, s'en soient vues refuser l'entrée! Il vous est pourtant plus facile à vous de tenter la démarche qu'au maître d'aller voir les parents de ses quarante élèves. Que de fois il nous arrive d'avoir pendant trois ans consécutifs une écolière, sans connaître aucun des membres de sa famille, aucune de ses circonstances particulières..

Voilà, tels qu'ils existent, les rapports entre la famille et l'école (avec des exceptions très honorables, très réconfortantes et qui sont dans notre vie des points lumineux).

Ces rapports, je les résume: Indifférence, quatre-vingt dix fois sur cent; esprit critique; manque de confiance et de bon vouloir.









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