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Entre Mères

- Ah ! que cette enfant me fatigue! Le peu que je lui demande semble toujours être de trop. Rien n'est fait ou accepté de bonne grâce par elle! Votre Emma n'est pas comme cela. En voilà une qui obéit facilement! ...

Et la pauvre Madame Barnet s'affaissa plutôt qu'elle ne s'assit aux côtés de la visiteuse.

- Il est vrai, répondit celle-ci, que je n'ai guère de peine avec Emma maintenant, mais je pense que c'est parce que dès qu'elle en a été capable, je lui ai donné à accomplir régulièrement certains petits travaux. Elle a généralement fait volontiers les choses quand elle savait exactement ce que c'était et à quel moment elle devait les faire.

- Volontiers! ... Ah, oui ! Agnès, elle, a toujours quelque objection à me faire!

- Emma m'en fait aussi quelquefois. Je vous assure qu'elle est loin d'être parfaite. Mais elle sait très bien que si elle lambine dans son ouvrage elle aura moins de temps pour s'amuser.

- Avec Agnès, ni raisonnement, ni menaces, ni promesses n'ont jamais rien fait !

Le ton de Madame Barnet exprimait un profond découragement.

- Moi, reprit Madame Legrand, j'ai découvert que moins j'argumente et moins le gronde, mieux cela vaut. Si je disais continuellement à Emma: "Voyons, dépêche-toi donc ! Allons, pas tant de lambineries ! Ah! quelle patience il faut avoir avec toi" etc.... elle finirait par devenir mécontente, boudeuse et désobligeante. Moi-même je perdrais tout repos d'esprit et vous savez combien une mère en a besoin...

- Tout ça est facile à dire: "Point de gronderies!" C'est bon pour vous qui êtes par nature pleine de douceur et de support !

- Merci du compliment, mais vous n'auriez pas parlé ainsi il y a quelques années. A la naissance de mon premier enfant et pendant sa courte vie vous auriez vu que je n'étais rien moins que douce et patiente. Ce n'est jamais sans remords que je me rappelle mes impatiences et mes gronderies continuelles d'alors et ce jour inoubliable où je surpris ma petite fille qui, tout en berçant sa poupée dans ses bras (il me semble que c'était hier tant cette scène est restée présente à ma mémoire)...

Ici, la voix de Madame Legrand s'altéra et ce fut en retenant ses larmes qu'elle continua:

- Oui je la vois encore avec sa robe rose et ses gracieuses boucles brunes qui voltigeaient à chaque balancement de sa petite chaise. Elle parlait à sa poupée: "Comme je t'aime, bébé, disait-elle. Je voudrais que tu vives toujours, toujours. Si tu mourais, je pleurerais tout le temps. Maman ne m'aime pas autant que ça. Si je mourais, elle ne serait pas triste !"

Un mois plus tard elle partait pour le ciel.

Il y eut un moment de silence, puis Mme Barnet dit en hésitant : Et - après cela ?...

- Après que la douleur si aiguë des premières semaines fut un peu apaisée et qu'un nouvel enfant m'eut été promis, le rentrai en moi-même et je compris et confessai mes fautes sans m'excuser en aucune façon. Puis, j'implorai le secours de Dieu et commençai une nouvelle vie.

- Je prie aussi, mais il me semble qu'il n'en résulte aucun bien, dit la pauvre Madame Barnet.

- C'était la même chose pour moi autrefois. Mais j'ai dû reconnaître qu'alors mes prières n'étaient pas de vraies prières, car au fond du coeur le pensais: A quoi cela sert-il ? je serai demain ce que je suis aujourd'hui ! Maintenant tout est changé ! Depuis que j'ai ma petite Emma à élever, je prie comme si tout dépendait de mes prières, mais j'agis aussi comme si tout dépendait de moi.

- Vous m'avez dit qu'Emma sait exactement ce qu'elle a à faire et quand elle doit le faire et que sa tâche accomplie elle va s'amuser. Ne l'appelez-vous jamais pendant ses récréations pour faire des commissions ?

- Aussi rarement que possible, mais quand l'occasion s'en présente, elle le fait très volontiers. Nous avons imaginé un petit jeu pour ces circonstances: je suis la reine et elle est ma dame d'honneur. Elle vole alors à mon commandement avec tout le zèle que réclame un tel titre.

- Vous avez sans doute raison, répondit Mme Barnet d'un air pensif. Nous ne réfléchissons peut-être pas assez que les enfants sont aussi ennuyés d'être dérangés dans leurs jeux que nous le sommes d'être interrompues dans nos occupations.

L'autre jour par exemple j'appelai Agnès pour me faire une commission et le l'entendis dire aussitôt à sa camarade: "C'est pour fermer une porte, je pense, ou faire n'importe quoi d'autre que maman pourrait faire elle-même."

- Et quand votre fillette est venue auprès de vous avec lenteur et de mauvaise grâce, vous l'avez grondée pour son impertinence, n'est-ce pas ?

- Agnès vous l'a-t-elle raconté ?

"Non, mais je me rappelle ma manière de faire d'autrefois.

Et Mme Legrand se leva pour prendre congé de Mme Barnet.

- Votre visite m'a fait du bien, reprit celle-ci et je veux essayer de votre moyen avec Agnès.

- Peut-être ne s'y prêtera-t-elle pas volontiers, mais si vous êtes persévérante à prier et à agir, je suis sûre qu'avec le temps vous réussirez.









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