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Le site www.entretiens.ch vous offre la possibilité de consulter en ligne ces extraordinaires archives parcourant/ponctuant au jour le jour l'histoire de l'éducation familiale d'un bout à l'autre du XXème siècle.
La survie de la brochure mensuelle imprimée parallèlement à la distribution virtuelle à travers le site est le garant de la poursuite de cette aventure. La rédaction est assurée de façon bénévole par un groupe de parents passionnés par la réflexion et l'écriture autour du vécu familial. Les frais d'impression du journal et la gestion du site (100 000 pages demandées par mois??)....30.- par an (20€).
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Frères et Soeurs. (Suite et fin)

Quand au bébé, le dernier venu, pourquoi le soin de l'entourer, de lui être utile, serait-il exclusivement réservé à une domestique ou à la mère ? Qu'il soit permis à ses soeurs, ou à ses frères, de faire quelque chose pour lui, d'en avoir à certains moments la garde, la responsabilité. Rien ne forme autant l'enfant, rien ne l'incline à la bonté, comme de se sentir gardien du sommeil d'un cher petit, ou de lui racommoder une culotte.

De tels services entretiennent la fraternité. Qu'ils augmentent et prennent d'autres formes quand grandissent les enfants! Il ne faudrait pas trop prendre l'habitude de dire à chaque moment : "Ne fais pas le noeud de cravate à ton frère; ne fais pas les commissions de ta soeur. Appelle un domestique, c'est son affaire". La fraternité passe avant l'étiquette. - L'homme n'est pas un pur esprit. Pour nous exercer à la communion fraternelle et nous la prouver, les paroles, les sentiments invisibles, à eux seuls, ne suffisent pas. Laissez-nous mettre en formes concrètes et palpables ce que nous avons dans le coeur. Ne nous privez pas de ce plaisir, ne vous opposez pas à ce besoin.

Tout cela n'est pas tant matériel et banal que l'on croit. Au contraire: C'est le charme et la grâce de l'existence, que de mettre une âme dans les occupations les plus ordinaires.

Il faut que tout concoure à resserrer plus étroitement la fraternité, même notre ignorance, même nos souffrances et nos misères. Que nos souffrances nous rapprochent au lieu de nous séparer. Aidons-nous, risquons-nous les uns pour les autres. Les heures sombres et difficiles deviendront des heures de bénédictions. On n'est jamais plus sensible aux attentions que lorsqu'on est malade. Jamais non plus on n'a un besoin plus pressant de tendresse, de bonté, de dévouement, et ces choses ne s'oublient pas ! Les jours de souffrance deviennent dans le souvenir des jours lumineux. On oublie les nuits fiévreuses et les heures d'ennui, pour ne se rappeler que les figures douces et aimantes et les pas discrets glissant par la chambre.

Je veux dresser ici une couronne aux petites soeurs consolatrices, à celles qui savent partager nos peines, par de douces paroles, mettre du baume sur les blessures, et, dans un baiser, faire oublier tous les chagrins.

Ces petites soeurs-là n'aiment pas qu'on pleure, elles essuient les larmes. Elles n'aiment pas qu'on se dispute: elles réconcilient les combattants. Quand on tombe, elles vous ramassent; quand on se salit, elles vous nettoient; quand on se déchire, elles vous raccommodent; quand on se blesse, elles vous pansent. Elles sont indulgentes aussi, les mignonnes petites soeurs et ont des trésors de bonté, même pour ceux que la sévérité paternelle a justement frappés. Elles visitent les prisonniers du coin noir et ne craignent pas de se compromettre, en allant embrasser de petits brigands de frères, condamnés pour leurs méfaits à des exils momentanés.

C'était au beau temps, si lointain où j'avais encore mon père, mort jeune; la famille était au grand complet. J'avais surtout une petite soeur, une compagne inséparable. Toujours, nous marchions ensemble, la main dans la main. Lorsque nos sentiers rustiques aboutissaient à une de ces planches étroites qui sont les ponts des minuscules rivières, nous nous tenions mieux serrés, de peur que l'un ou l'autre ne tombât dans l'eau. Et souvent, grâce à cette précaution, nous y tombions tous les deux ensemble. Un jour que j'étais sorti de la maison tout seul, je commis un acte grave. Présente, ma petite soeur l'eut certainement empêché. Un feu, que j'allumai trop près des maisons, gagna la haie d'un jardin, lui-même contigu à une grange. L'émotion fut extrême et la punition exemplaire.

Le soir de ce jour néfaste, j'étais dans mon lit, la couscience bourrelée de remords, l'estomac tiraillé par la faim.

On m'avait envoyé dormir sans dîner et j'aurais eu tort de me plaindre. Quand ma petite soeur vint se coucher, elle s'approcha de mon lit, comme tous les soirs, essaya de me consoler, puis, m'embrassant, elle me glissa dans la main, sans mot dire, une pomme de terre toute chaude.

Il y a des années maintenant qu'elle est morte, la bonne petite soeur, mais je n'ai pas oublié cela. Dussé-je vivre aussi longtemps qu'un patriarche, jusqu'à mon dernier soupir, jusque dans la vie éternelle, je me souviendrai de cette pomme de terre.

S'aimer comme des frères ou comme des soeurs n'est pas une locution superficielle. Au fond, quelque rare qu'elle soit, l'amitié fraternelle est bien la plus pure et la plus forte des amitiés.

Sa forme la plus gracieuse nous apparaît dans l'affection entre le frère et la soeur. Ce genre de lien où le libre choix vient s'ajouter à la communauté d'origine, n'a pas seulement un grand charme, mais encore une puissante influence éducatrice. Au près d'un frère qui est son ami, une soeur trouve un appui, un protecteur, un guide. Sa vie de jeune fille s'enrichit d'une multitude d'éléments, qu'elle n'aurait pas rencontrés sans lui. Elle y gagne en indépendance, en joie du coeur. Elle apprend à comprendre un coeur de jeune homme et d'homme, et tout cela très simplement, sans aucun inconvénient, par la plus naturelle et la plus recommandable des communions.

Un jeune homme qui a pour amie sa soeur, trouve en elle une confidente, une société infiniment douce pour les heures de loisir, un juge sûr et apprécié, de son goût et de ses manières, une conscience pure et incorruptible, un regard et des caresses dont il ne faut pas démériter et qui nous aident à marcher droit et à conserver ce respect de la femme sans lequel un homme est privé d'une qualité essentielle. Ce qu'une soeur peut faire pour un frère, quand elle est aimante et clairvoyante, tient de l'incroyable.

Que la famille favorise leur rapprochement, et se méfie de tout genre d'éducation qui aurait pour effet de l'entraver. Priver nos fils de la société ordinaire et familière de nos filles, les parquer à part dans des genres d'éducation qui les empêchent de se comprendre, serait un tort grave. L'unité de la famille en subirait une atteinte profonde. L'avenir, plus encore que le présent, témoignerait par ses résultats, de notre manque de sagesse.









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