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Les « Entretiens sur l'éducation » est un mensuel publié sans interruption depuis plus de 100 ans.
Le site www.entretiens.ch vous offre la possibilité de consulter en ligne ces extraordinaires archives parcourant/ponctuant au jour le jour l'histoire de l'éducation familiale d'un bout à l'autre du XXème siècle.
La survie de la brochure mensuelle imprimée parallèlement à la distribution virtuelle à travers le site est le garant de la poursuite de cette aventure. La rédaction est assurée de façon bénévole par un groupe de parents passionnés par la réflexion et l'écriture autour du vécu familial. Les frais d'impression du journal et la gestion du site (100 000 pages demandées par mois??)....30.- par an (20€).
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Tout ce que les ados pensent sans jamais le dire

Chers lecteurs,

Nous vous livrons ci-dessous un texte percutant, et espérons que vous trouverez le temps de le lire cet été, de le digérer et pourquoi pas de réagir! Nous, il nous a remuées!
La rédaction.



Mais qu'est-ce qu'ils ont dans la tête, les 13-17 ans? Plutôt protégés par des parents qui les traitent volontiers comme des copains, ils n'en demandent, en fait, pas tant et préféreraient simplement qu'on les écoute.
On essaie d'être «cool». On trouve nos parents plutôt «cool» et la société «hyper cool». Et pourtant, c'est «galère» d'être un adolescent en 1990. Mais ne le dites pas à nos parents, ils pourraient s'inquiéter. Dites-leur qu'on les aime bien, qu'on ne leur veut pas de mal, mais que, eux, nous veulent trop de bien, leur «idée du bien». La nôtre, on aimerait bien la trouver.
Voilà résumés les propos des dizaines d'adolescents que l'Express a interrogés, à travers la France. Ils ont entre treize et quatorze ans. Ils foncent en rollers sur les trottoirs des villes, palabrent interminablement dans la rue, ou s'engouffrent à plusieurs dans les appartements désertés par les parents qui travaillent. Ils se réveillent parfois au milieu de la nuit pour faire leurs devoirs, leur walkman aux oreilles. A la logique des parents, dont le leitmotiv est «travaille», les jeunes répondent par des questions: «L'avenir heureux passe-t-il par la réussite scolaire?» Ou encore «Quel espoir, quelles valeurs, quel sens donner à notre vie?» Les parents flottent dans leur propre histoire, années 50, 60, 70 et 80 mêlées, sans savoir clairement ce qu'il faut jeter ou garder. Héritiers de ces contradictions, leurs enfants feront le tri. En attendant ils flottent comme tout le monde, et la majorité des 13-17 ans tente simplement de prendre place en douceur dans le monde des adultes.

Des parents qui ne jouent pas leur rôle

Le psychanalyste, Tony Anatrella, auteur du livre Interminables Adolescences, éd. Cerf/Cujas nous dit: «Les adolescents ne sont pas des adultes en miniature. Ce sont d'abord les enfants de leurs parents. Mais à notre époque, les adolescents sont restés le modèle de référence. Les parents agissent comme eux. Non qu'ils soient curieux ou fascinés, mais parce que la génération des années 60 n'a pas intériorisé ce qu'est la paternité, ce qu'est la maternité. La société adulte n'a pas de valeurs à transmettre, ni de repères à proposer aux jeunes. C'est très inquiétant, car, faute de repères, les adolescents ont du mal à se construire, et certains souffrent cruellement. Ces enfants qui ont été vraiment programmés, pilule oblige, ne sont pas ressentis comme des êtres qui viennent s'inscrire, après d'autres, dans l'ordre des générations, mais plutôt comme des témoins de l'épanouissement de leurs parents, de leur réussite sexuelle, conjugale ou sociale. Ils servent à valoriser le narcissisme des adultes: donc, ces enfants sont formidables, par définition. Mais, à la moindre difficulté scolaire, ce sont ces parents-là qui dépriment».

Le mythe de l'égalité

Les adolescents ne semblent pas avoir de gros conflits avec leurs parents, car ces adultes continuent à vivre leur propre adolescence - en se refusant à la clore - à travers leurs enfants. Alors, ils entretiennent le mythe de l'égalité: on est copain. Comment voulez-vous que les jeunes trouvent leur identité? Les images du père et de la mère, voilà trente ans, étaient fortes et contestées. Aujourd'hui elles sont floues. Dans les années 60, on se révoltait contre le père. Aujourd'hui, on le cherche. Où est-il? Qui est-il? Les ex-fans des sixties ont enfanté des fans de sixties: les ados écoutent les tubes de jeunesse des parents, tout en cultivant leur nostalgie. Ils ont tout, tout, mais ils n'ont pas de rêves. «On n'a pas de révolte», constate Damien. Pourquoi en auraient-ils ? Ils n'ont pas le sentiment que, quand ils sont «chiants», les parents leur imposent leur loi, mais plutôt qu'ils expriment leur inquiétude. Ils appartiennent à des familles décomposées, selon le terme du démographe Louis Roussel*: chacun ses horaires, ses ruptures, sa vie. De plus en plus fréquemment, chacun prend son repas quand il veut, et choisit son menu et, dans le bagage moral de leurs parents, les ados picorent comme ils veulent.»

Peur de ne pas être à la hauteur

Du coup les tensions sont étouffées, canalisées. Mais les treize-dix-sept ans ont peur de décevoir, de ne pas être à la hauteur. Peur de ne pas parvenir à se désengluer de l'amour parental. Peur de l'avenir, ils ne savent pas à quoi s'arrimer, au moment où les parents doutent de tout à voix haute. Ils n'ont plus d'appétit, pas envie de grand-chose. «Si, s'amuser», disent-ils. «On ne s'ennuie pas, précise Laetitia, seize ans. C'est la société qui s'ennuie, il faudrait une renaissance, un Mai 68. Mais là, on n'a ni voile ni vent. Il va falloir trouver une nouvelle façon de s'éclater. Dites-leur de nous écouter, ça fait du bien de parler.»

*La famille incertaine, Louis Roussel, éd. Odile Jacob, 1989.


LEUR CREDO EN NEUF POINTS

1. Nous ne sommes pas des malades

«Ado», c'est un mot qu'ils vomissent. «Quand les parents parlent des adolescents, on dirait qu'ils se penchent sur des bêtes curieuses, des êtres bizarres, des malades», dit Isabelle, quatorze ans; «pourtant on est comme tout le monde, ou presque. On aimerait bien retomber en enfance, le soir quelquefois, mais cela on ne l'avouera jamais aux parents. C'est suffisamment compliqué de grandir. Tout pousse en même temps, les poils, les seins, l'acné, et les désirs contradictoires. On passe par des drôles de périodes.»
Punk, fun, hard…Besoin de faire comme les copains du moment, de s'habiller pareil, de délirer ensemble, de détester tout le monde. Besoin de se chercher soi-même, et de chercher les autres. Et puis ça passe, on se trouve, on se perd, on se retrouve.

2. L'école c'est galère!

Marre du slogan: «Travaille et tais-toi». L'école, c'est trop lourd, trop contraignant, trop d'heures, etc. Les parents prennent toujours le parti de l'école. Ces parents, qui, quand ils s'entendent mal, se réconcilient toujours sur le sujet des résultats scolaires. Un consensus étouffant. Une compétition vide de sens aux yeux des adolescents, stressés par des parents obsédés. «-Tu as eu des notes?» C'est la première question de ma mère, le soir, quand elle rentre du travail. C'est énervant. Toujours les mêmes questions: «-T'as fait tes devoirs?» Alors on répond oui, même si ce n'est pas vrai. Nos résultats deviennent l'objet d'un chantage. C'est notre argent à nous, les bonnes notes. C'est avec ça qu'on s'achète la liberté, conclut Christophe, quinze ans.

3. On a besoin de faire des bêtises

Les 14-15 ans emploient le mot «bêtises» comme des gosses, pour raconter leurs «conneries», terme préféré par les 16-17 ans. Elles permettent de s'offrir deux plaisirs mixés: «rigolade» - les fous rires - et la transgression. On se fait peur, très peur, et c'est délicieux. On fume, on boit, on fait des téléphones anonymes au milieu de la nuit, on monte à trois sur un scooter, on regarde des films pornos. Les adultes ne peuvent pas comprendre, ils sont «trop sérieux» surtout les parents. Mais les adolescents très amusés par leurs propres délires jugent sévèrement ceux des autres. A chacun sa transgression, mais à tous un certain sens de l'ordre.

4. Laissez-nous vivre: de l'air!

Les parents ont tendance à oublier que les adolescents ont besoin d'autonomie, de respect. De respirer, tout simplement. Voilà le grand leitmotiv des 13-17 ans. Leur mot fétiche: la liberté. En réalité, ils sont libres, beaucoup plus que les générations précédentes. Pourtant le jeu consiste toujours, comme autrefois, à repousser les limites de cette liberté, le seul droit qu'ils revendiquent. Cette soif de liberté ressemble souvent à une envie de fuir. Fuir les parents qui s'engueulent ou le stress de l'école. Ils rêvent tous de parcourir le monde. En attendant ils voyagent dans leur tête, dans leur ville, la fugue en fait fantasmer beaucoup.

5. Les copains, c'est tout

Rien de plus important: «A eux, je peux tout dire», clament les ados, unanimes. Les copains, c'est une microsociété à part, avec ses codes. Un terrain d'essai. Bref leur jardin secret, à l'abri de la curiosité des parents. Les jeunes aiment leurs amis parce qu'ils leur ressemblent - des doubles, des miroirs - ou au contraire parce qu'ils les aident à rompre radicalement avec leur enfance. Entre copains on peut jouer impunément, loin des regards castrateurs, tous les rôles, on essaie de devenir quelqu'un.

6. Nous aussi, on a peur

Pas du Sida, ni de la drogue, qui obsède les parents. Non, ils ont peur devant l'avenir, le vide, ils ont peur de la mort. Alors ils jouent à trompe-la-mort, ils prennent des risques. Et surtout ils jouent avec l'idée du suicide, comme des enfants jouent à la poupée. «Pour rendre mes parents plus tolérants»; comme Vanessa, ils tentent de se suicider. L'idée est fascinante d'avoir un certain pouvoir sur soi-même.

7. Nous sommes obligés de mentir

On raconte des salades pour trouver un peu de liberté. Et ils ne mentent pas seulement pour enfreindre les interdits, ils mentent aussi pour des vétilles: parce qu'ils ont besoin de rester entiers. De ne pas se laisser étouffer par l'angoisse des parents, qui se déclenche pour un rien. Parce qu'ils craignent de ne pas être compris. Mais surtout, ils mentent par omission. Parce qu'ils ont besoin d'avoir leur vie privée, même si ces heures volées ne sont parfois remplies que de musique et de spleen.

8. Nos amours, ça nous regarde…

Le problème est que les adultes, si l'on en croit les 13-17 ans sont obsédés par les amours de leurs rejetons. Soit qu'ils les craignent, soit qu'ils redoutent leurs conséquences, soit enfin qu'ils les souhaitent ardemment, modernes pour deux générations. Ils veulent savoir «si ça y est», c'est exaspérant! Pourtant le flirt, c'est naturel comme un verre de Coca un jour de canicule. On s'embrasse beaucoup, on ne se cache pas. On peut changer de copain, on peut aussi s'en passer. Le sexe, c'est permis et surtout pas obligatoire. L'amour précoce n'est sûrement pas une norme, même pas une valeur. Les filles attendent que ce soit «sérieux», elles sont de moins en moins pressées de faire l'amour. Chacun fait ce qu'il veut. Les ados ne croient pas à l'amour fou, hélas. Ils choisiront massivement l'union libre jusqu'au jour où ils décideront d'avoir des enfants.

9. On n'a pas envie de vous ressembler plus tard

Vous êtes plutôt cool. Vous n'êtes pas toujours faciles à vivre. Vous nous avez bien élevés. On fera sûrement pareil, disent tous les 13-17 ans. C'est bien le seul point sur lequel ils s'imaginent un jour imiter leurs parents, mais en mieux, bien sûr. Deux reproches persistent. 1. Vous marchandez notre liberté. 2. Vous ne savez pas nous écouter. C'est vrai qu'on n'aime pas les questions style inquisition, mais quand on a besoin de parler, vous ne comprenez rien. Enfin, on n'a pas envie de vous ressembler, parce que vous avez abandonné vos rêves. Vous faites trop de concessions. Mais vous jugez rapidement. Vous parlez trop d'argent, enfin vous vous prenez pour des jeunes, vous vous habillez comme nous, vous parlez comme nous, un peu ridicule, non!
Allez, courage, vieillissez!









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