Accueil
   

 

 

 

RECHERCHES
Rechercher un mot dans les articles:


Recherche avancée
• par mots
• par thèmes

ARCHIVES DE TOUS LES ARTICLES



AUTRES MENUS
ACCUEIL
ADRESSES
  • Adresses utiles
  • Bibliographie
  • Liens Internet
LE JOURNAL






Les « Entretiens sur l'éducation » est un mensuel publié sans interruption depuis plus de 100 ans.
Le site www.entretiens.ch vous offre la possibilité de consulter en ligne ces extraordinaires archives parcourant/ponctuant au jour le jour l'histoire de l'éducation familiale d'un bout à l'autre du XXème siècle.
La survie de la brochure mensuelle imprimée parallèlement à la distribution virtuelle à travers le site est le garant de la poursuite de cette aventure. La rédaction est assurée de façon bénévole par un groupe de parents passionnés par la réflexion et l'écriture autour du vécu familial. Les frais d'impression du journal et la gestion du site (100 000 pages demandées par mois??)....30.- par an (20€).
En dehors du grand intérêt pour vous de cette matière exceptionnelle, que vous soyez jeune parent, chercheur dans une université ou simplement intéressé par l'évolution des comportements humains, votre soutien par l'intermédiaire d'un abonnement nous est indispensable.
Pour les pays lointains et si vous ne désirez pas profiter de la version papier, un abonnement sous forme de pdf est accessible au même prix annuel de CHF 30. Il vous donne un accès complet aux archives
RETOUR

Et la politesse, bordel !

Les jurons envahissent notre monde civilisé, scolarisé, cultivé, éduqué et surinformé. Ils sortent non seulement des lèvres pubères des jeunes garçons en quête de virilité, mais aussi des bouches pulpeuses des jeunes filles de bonne famille.

A l'époque du paléolithique moyen, nos ancêtres humanoïdes libéraient leur trop-plein de violence en réglant leurs comptes avec leurs congénères des tribus voisines silex en main. Scénario qui n'est plus guère convenable de nos jours, puisque nos lois et usages nous dissuadent de massacrer les resquilleurs qui nous passent sous le nez à la poste ou à la pharmacie. Pour nous défouler, nous courons sur le bitume le samedi matin, nous tapons sur des balles de tennis, deux exercices sans doute sains, mais nettement insuffisants pour servir d'exutoire à nos flambées d'adrénaline. Alors, comme on ne peut plus cogner sur celui qui nous met en rogne, on se bat à coups de mots insultants.

L'enfant terrible

C'est ainsi qu'Aurélie, quinze ans, fait le désespoir de ses parents, deux enseignants qui ont essayé de donner à leur enfant chérie le meilleur d'eux-mêmes: «C'est une fille intelligente, douée, qui réussit dans tout ce qu'elle entreprend, raconte sa mère, mais qui nous met les nerfs en boule dès qu'elle ouvre la bouche. C'est juron sur juron. Comme nous aimons la langue française, que nous la respectons, la manière qu'a Aurélie de s'exprimer nous heurte profondément. Pour la ramener à la langue de Molière, nous avons pris les mesures nécessaires. Nous lui avons imposé une corvée ménagère pour chaque gros mot, nous l'avons privée de sorties et d'argent de poche, cela n'a servi à rien. D'autant plus, et nous sommes bien placés pour le savoir, que tous les jeunes s'expriment de cette façon».
Vérification faite, il est vrai que ladite Aurélie parle plutôt crûment: «Tous mes profs sont des "cons", les mecs de ma classe "m'emmerdent", ils sont vraiment "chiants".» Lorsqu'un copain l'ennuie elle lui conseille de "se casser", et quand sa mère la réprimande, elle répond qu'elle en a marre de voir "sa tronche" et menace de "se tirer". Charmante atmosphère! Et surprenant langage pour ceux qui ont appris dans l'enfance à ne pas répondre ni hausser le ton de peur de recevoir une taloche. Pourtant, dans les meilleures familles, il est des moments où les adultes sortent de leurs gonds et s'invectivent à qui mieux mieux en présence des enfants qui n'en perdent pas une miette. Dans la mienne, par exemple, sans offenser la langue française, lorsque mon père, de nature assez explosive comme tout Italien qui se respecte, jurait dans sa langue maternelle. Sans le savoir, papa m'a rendu un service inestimable. Mes notions d'italien, quoique très rudimentaires, me permettent néanmoins, en tout point de la Péninsule, de me débarrasser de messieurs trop collants. Car l'injure est d'abord une parole offensante. Et l'offense n'est autre chose qu'un coup, une attaque verbale lancée contre un interlocuteur ennemi.

Pourquoi utilise-t-on des gros mots ?

Par un gros mot on exprime la volonté de puissance née d'une frustration, d'une angoisse ou d'une insécurité. Sentiment que l'on tente tant bien que mal de cacher sous la grossièreté. Les vrais durs, eux, cognent avant de s'expliquer. Quand on est faible et démuni, on se réfugie derrière les mots dégradants. Et comme nul, aussi puissant soit-il, n'est aujourd'hui à l'abri des contraintes démocratiques, que les impôts, les tracasseries administratives et les règles de la circulation concernent petits et grands, la grossièreté gagne le gratin de la société, pour atteindre son point culminant au volant de nos voitures même les plus prestigieuses.
Quand on jure, c'est tout le côté négatif de notre affectivité qui se dévoile. Mais en même temps on se purge d'émotions qui, refoulées, peuvent à la longue provoquer de pénibles inhibitions.
Dans le très intéressant ouvrage de Pierre Guiraud*, on apprend qu'en remontant la chaîne étymologique d'un concept et d'un mot, on arrive à des images toujours plus simples, plus archaïques, qui sont liées à des représentations du corps et de ses fonctions, étant donné que le corps est l'unique siège de nos sensations et pulsions. C'est donc sur des images corporelles -en particulier le ventre et le sexe -que s'enracinent une sémiologie et une lexicologie de la grossièreté.


*Des Gros Mots, Pierre Giraud, Ed. PUF.









www.entretiens.ch fait partie du réseau « NETOPERA - culture - société - éducation sur Internet » et pour la photographie PhotOpera - Uneparjour || DEI - Défense des Enfants - International
ROUSSEAU 13: pour allumer les lumières - 300 de Rousseau  ROUSSEAU 13: les IMPOSTURES - 300 de Rousseau - portraits déviés PHOTOGRAPHIE:Nicolas Faure - photographe d'une Suisse moderne - Le visage est une fiction - photographie de l'image brute - Laurent Sandoz - comédien et acteur professionnel - Genève