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Correspondance

Une lettre que vous avez publiée au mois d'août posait entre autres questions celle-ci: «Comment parler de Dieu à nos enfants»? Nous aimerions ajouter: Comment présenter la Bible (c'est-à-dire le livre qui parle de Dieu) à nos enfants?
La Bible (signification étymologique le livre) est en réalité une collection de livres, une bibliothèque entière. Ces livres ont été écrits au cours des siècles par des hommes qui forcément employèrent le langage humain de leur temps, pour exprimer des vérités éternelles; cherchèrent à expliquer en termes humains et concrets l'Etre divin qui toujours, dépassera notre pauvre vocabulaire; et souvent prirent leur expérience incomplète pour une expérience finale.
Il ne faut pas oublier que les livres de la Bible ont été écrits par des Orientaux pour lesquels l'usage de la parabole et de l'image était absolument naturel.
Dans sa remarquable brochure sur l'Ancien Testament (1) M. le Professeur Alex Westphal attire notre attention sur l'emploi de l'expression: «Dieu dit» dans l'Ancien Testament. Nous ne faisons que citer sa conclusion.

«L'expression «Dieu dit» employée par les auteurs bibliques, comme par toutes les littératures religieuses du milieu où l'histoire hébraïque est née, ne suffit pas pour prouver que le texte qu'elle introduit est une révélation divine… Assourbanipal, le plus grand et le plus cruel des empereurs d'Assyrie ne tait rien qu'il n'attribue aux directions de son Dieu, Assour. Mésa roi de Moab, pense la même chose de son Dieu Kamos. «Alors Kamos me dit: Va et prends Nébo à Israël» etc. L'expression «Dieu dit» dans le langage d'un historien sémite signifie donc simplement que l'acte qu'on va raconter est rapporté à l'intervention protectrice d'une divinité».
Comment présenterons-nous donc la Bible et spécialement l'Ancien Testament à nos enfants? Sera-ce comme un document faisant autorité sur toutes les questions? Un document dont on peut isoler quelques mots pour leur donner un sens absolu? Non sans doute. Ce sera bien plutôt comme l'histoire magnifique d'une révélation progressive : d'une part Dieu s'est révélé peu à peu, d'autre part les hommes l'ont découvert peu à peu. Le chemin est long qui mène de la terre au ciel, les hommes se sont mis en marche, cherchant à comprendre, à saisir, ce Dieu qu'ils entrevoyaient, et qu'ils sentaient si essentiellement différent des divinités matérielles qui les entouraient. Ils se sont transmis de génération en génération les vérités trouvées ; et au cours des siècles nous voyons l'idée de Dieu, le portrait de Dieu pour ainsi dire se compléter peu à peu.
Il semble que nous ayons à faire à une succession d'images superposées jusqu'à ce qu'enfin, nous arrivions à Jésus. Celui qui l'a vu a vu le Père. La route a été longue, Dieu a été patient, mais maintenant la révélation est complète.
Loin d'affaiblir la Bible et de lui enlever sa valeur, cette manière de voir confère aux expériences relatées dans la Bible une autorité particulière. Ce n'est pas sans émotion que l'enfant suit ainsi pas à pas les patriarches et les prophètes dans leurs découvertes successives. Et qu'on ne dise pas que les petits ne peuvent pas comprendre. Un bambin de 7 ans auquel sa mère expliquait le sacrifice d'Isaac, en lui faisant voir qu'Abraham avait, ce jour la, découvert un nouvel aspect de Dieu, qu'il l'avait mieux compris, lui répondit: «C'est tellement beau, ces hommes qui trouvent le Bon Dieu par petits bouts».
La même méthode peut être appliquée aux prophètes. On les ignore, hélas ! presque toujours à l'Ecole du dimanche soi-disant parce qu'ils sont trop abstraits, trop difficiles à expliquer. Quoi de plus beau cependant, que de montrer à nos enfants que ces prophètes, qui avaient découvert pour eux-mêmes un nouvel aspect de Dieu ont voulu communiquer leur expérience à leur peuple ; au sein d'une nation qui ne voulait pas avancer sur la voie des découvertes ils ont proclamé leur expérience. Amos ne se contente pas des cérémonies extérieures : il veut la justice et l'équité. Osée prêche l'amour qui ne se lasse pas. Jérémie exhale sa plainte et sa lassitude, mais il revient toujours au Dieu «qui n'est pas une source trompeuse».
L'enfant sera poussé à entreprendre lui-même ce pélerinage ; enrichi par les découvertes des autres, il sera heureux de remarquer, dans sa vie à lui, en quoi son expérience confirme la leur, de retrouver sur la route qu'il suit les traces des pas de ceux qui l'ont précédé ; il ne se sentira pas seul dans sa marche; «environné de la grande nuée de témoins» il voudra, lui aussi, connaître personnellement ce Dieu que Jésus lui révèle comme un Père.
Envisagée ainsi la Bible devient réellement entre nos mains «le pédagogue pour conduire à Christ». C'est elle qui nous dira comment nous pouvons parler de Dieu à nos enfants.

(1) «L'Ancien Testament d'où il vient, ce qu'il contient, ce qu'il enseigne aux chrétiens». Editions de la Cause, 1925. Prix 0.90 ct.









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