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Le site www.entretiens.ch vous offre la possibilité de consulter en ligne ces extraordinaires archives parcourant/ponctuant au jour le jour l'histoire de l'éducation familiale d'un bout à l'autre du XXème siècle.
La survie de la brochure mensuelle imprimée parallèlement à la distribution virtuelle à travers le site est le garant de la poursuite de cette aventure. La rédaction est assurée de façon bénévole par un groupe de parents passionnés par la réflexion et l'écriture autour du vécu familial. Les frais d'impression du journal et la gestion du site (100 000 pages demandées par mois??)....30.- par an (20€).
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La petite Ménagère

- Que fais-tu toute la journée ? demandait Mme Senn à la petite Marguerite Balou, âgée de six ans.
- Moi ? je mange, je dors, je m'amuse et j'aide maman à faire le ménage!
A ces mots Mme Senn sourit et s'adressant à Mme Balou:
- Elle est persuadée qu'elle vous est d'un grand secours.
- Et c'est la vérité, répondit la mère, tandis qu'avec tendresse elle suivait du regard l'enfant qui retournait à ses jeux.
- C'est-à-dire que vous le lui laissez croire car vous m'avouerez qu'à cet âge l'aide d'un enfant est plutôt un embarras qu'autre chose.
- Cela dépend. Observez Marguerite, mais en silence, et peut-être demain aurez-vous changé d'avis.
L'heure du repas approchait, Mme Balou frappa à la fenêtre et Marguerite arriva en courant.
- Est-ce que tu prépares le dîner ? demanda-t-elle.
- Oui, ma petite, va me chercher des pommes de terre.
L'enfant prit un panier et en rapporta bientôt le nombre voulu; puis elle les frotta avec une brosse réservée à cet usage et les tendit à sa mère pour les autres opérations. Elle alla aussi chercher à la cave d'autres légumes et fruits, ramassa les épluchures et monta du petit bois. Aidée par sa mère elle mit la nappe; puis, avec adresse et précision, disposa les couteaux, les fourchettes, les cuillers, les salières et autres objets non fragiles; enfin elle plaça tout ce que sa taille et sa force lui permettaient de soigner et commença à essuyer les assiettes, couverts et couteaux que lavait Mme Balou. Tout en lavant et essuyant mère et fille causaient gaîment, tandis que Mme Serin écoutait en silence, de plus en plus intéressée par ce qu'elle voyait et entendait. Evidemment c'était l'heure des libres entretiens. Questions et réponses se succédaient et la visiteuse comprit qu'il s'agissait d'une histoire commencée la veille et dont la continuation provoquait les réflexions de l'enfant.
- C'est charmant! s'écria-t-elle, quand les deux dames furent seules, mais vous n'auriez jamais obtenu ce résultat avec un garçon.
- C'est ce qui vous trompe, répondit Mme Balou, Jacques faisait exactement à l'âge de Marguerite ce qu'elle fait maintenant, et il a aussi des devoirs à remplir à la maison quand il revient de l'école.
Tout l'après-midi la fillette s'amusa au jardin mais le soir venu, Mme Senn vit, non sans étonnement, que les deux enfants confectionnaient la plus grande partie du souper. Le petit écolier de dix ans paraissait fort entendu en cuisine et ne s'imaginait certainement pas que personne pût critiquer un garçon qui savait cuire un potage et placer sur la table les mets destinés au repas.
- Jacques aime beaucoup à cuisiner, dit Mme Balou et je suis surprise de voir combien de choses il fait aussi bien que moi! “ Il faut que j'apprenne tout cela maintenant, dit-il parfois, si je veux avoir de bonnes choses à manger quand j'irai aux colonies.â€
Très fier de voir sa mère se confier en ses talents, même lorsqu'elle avait une visite, Jacques redoubla de soin et un “ joli petit souper parut sur la table bien que la mère s'en fut à peine occupée.
Après le déjeuner du lendemain, Mme Senn s'étonnant de voir Marguerite changer de tablier, celle-ci lui dit: “Nous allons arranger les chambres et maman dit qu'il ne faut jamais garder le tablier de cuisine pour faire les lits et tout le reste. †“ A quoi va-t-elle donc s'employer?†se demanda Mme Senn. Mais, comme il avait été convenu, elle garda le silence et observa. Elle vit l'enfant mettre les cols et mouchoirs sales dans le sac qui leur était destiné, serrer pantoufles et souliers puis, passant de l'autre côté du lit, en face de sa mère, étirer les draps et placer les couvertures avec adresse tout en babillant joyeusement.
Quand tout fut en ordre dans la chambre, Marguerite balaya les escaliers avec un petit balai à sa taille et une pelle à main après quoi elle essuya la rampe avec soin.
- Cette petite est vraiment étonnante, dit Mme Senn lorsqu'elle fut partie; elle vous aide réellement à faire le ménage et n'a pas l'air de penser que ce soit un travail pénible.
- Pourquoi le penserait-elle ? Elle voit que c'est une partie de ma tâche et, comme tous les enfants, elle aime à faire ce que font les grandes personnes.
- Pour les singer, oui ; mais pas pour les aider. Généralement ils n'aiment qu'à détruire et jetteraient tout par terre plutôt que d'aider à remettre quoi que ce soit en place.
- A qui la faute ? On n'a pas su les élever. C'est presque toujours le besoin d'agir qui les pousse à détruite et à être indisciplinés. En permettant à mes enfants de m'aider au ménage, je n'ai fait que donner une bonne direction à leur activité.
- Et ils ne se regimbent pas quelquefois ? Ordinairement à cet âge on déteste la contrainte.
- Il n'y a pas de contrainte; je leur donne des ordres bien clairs, voilà tout.
A quel moment avez-vous commencé ? N'avez-vous pas trouvé cela affreusement difficile ? Ces petites créatures sont si égoïstes. Etre servi, jamais servir, paraît être leur devise.
Vous vous trompez. Les enfants ne manquent pas de bonne volonté pour aider leurs mères, mais celles-ci manquent de patience: “ Va-t-en, tu me fatigues, tu me déranges, je n'ai pas besoin de toi ici â€, disent-elles souvent. Et plus tard elles s'étonnent que leur fillette n'ait aucun goût pour le travail de la maison. Aussitôt que mes enfants ont pu marcher seul et porter quelque chose je les ai habitués à mettre et ôter les serviettes et les cuillères. Ils croyaient être indispensables et je le leur laissais croire sachant bien qu'ils ne tarderaient pas à m'être fort utiles.
- Je voudrais que toutes les mères apprissent votre secret, soupira Mme Senn. Tant de jeunes filles restent bras croisés à regarder faire sans songer à offrir leurs services. J'avoue que jusqu'ici j'ai toujours plaint les mères et blâmé les filles, mais aujourd'hui je me demande si je ne dois pas faire le contraire.
- Comme moi hier ! Une voisine se lamentait devant moi de ce que son aînée ne l'aidait jamais, celle-ci répondit:
“ Quand j'étais petite tu ne me permettais de toucher à rien, maintenant, que j'ai bien d'autres choses en tête, je n'ai pas la moindre envie de t'aider. †J'ai trouvé. . .
- Que c'était fameusement impertinent!
- Oui, mais fameusement vrai … et bien triste. Tout en la blâmant, je plains pourtant cette pauvre femme.
Faute d'un peu de patience autrefois pour habituer au travail de petits doigts inhabiles, elle ne connaît pas aujourd'hui la précieuse intimité créée par le travail en commun.
Pour moi, je suis convaincue que les mères qui ne se font pas aider dans les soins du ménage par leurs garçons et leurs fillettes se privent, et privent leurs enfants, d'une grande jouissance.









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