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Carence de l'amour maternel (1)

Ses répercussions sur le développement affectif de l'enfant par le Dr J. SARKISSOFF

A sa naissance, l'enfant est l'être le plus démuni qui soit dans l'échelle des êtres vivants. Son développement corporel est loin d'être terminé et se prolongera pendant de nombreuses années. Si tous ses organes physiques sont formés à la naissance et n'ont plus qu'à croître, son psychisme n'existe encore pas, puisque le cerveau qui en sera le support n'est pas achevé et ne se terminera qu'à la fin de la première année.
La nature a prévu des conditions physiques identiques (ou presque) pour tous les enfants, si bien que les différences physiques entre les êtres humains sont relativement minimes. Il n'en est pas de même pour nos caractéristiques psychiques. C'est aux parents qu'incombe la responsabilité de façonner l'âme de leur enfant. Mais les instruments dont ils disposent sont d'une telle complexité et les facteurs en jeu sont si nombreux qu'ils ne peuvent pas lui donner une organisation psychique déterminée d'avance.
Quelles sont donc les conditions idéales pour que ce développement de l'enfant se réalise au mieux ?
Le nourrisson ne peut pas s'attacher à plusieurs personnes à la fois ; il lui faut un être unique et stable qui lui appartienne en propre. Des soins maternels (2) lui sont absolument indispensables. En effet une absence - ou une insuffisance - d'amour maternel peut avoir une influence plus ou moins profonde sur son développement affectif.
Voici quelles peuvent en être les répercussions au cours des trois premières années de la vie de l'enfant.
1. L'enfant de moins d'un an accepte assez facilement qu'une autre personne que sa mère prenne soin de lui et lui tienne lieu de mère. Si personne ne la remplace, il va réagir à cet abandon par une dépression qui sera d'autant plus grave que l'enfant se sera attaché davantage déjà à sa mère. Il demeurera assis ou couché, immobile et silencieux, ou se balancera des heures durant d'un air triste. C'est un spectacle que l'on voit souvent dans les pouponnières et qui est beaucoup plus rare dans les familles ; c'est le premier symptôme du manque d'affection.
Des travaux récents de médecins du monde entier montrent que si l'on prive de sa mère un enfant entre l'âge de 6 mois et un an, il présentera des troubles graves. Le Dr Spitz, par exemple, a étudié près de 300 enfants dans une pouponnière très moderne, si moderne même qu'on avait tout prévu pour les protéger des maladies infectieuses et des microbes, en les plaçant dans des boxes isolés. Les infirmières ne s'occupaient deux que pour les langer, les laver et les nourrir, sans jamais jouer avec eux ; elles leur donnaient uniquement des soins physiques. Le résultat fut le suivant : pendant les premières semaines, l'enfant devient apathique, pâle, triste, ne sourit plus à un visage, perd l'appétit et cesse de prendre du poids. Si la séparation d'avec sa mère se prolonge et qu'aucun autre lien stable ne se crée, son état s'aggrave, une diarrhée apparaît et l'enfant devient une espèce de petit vieillard ridé qui va mourir malgré les meilleurs régimes alimentaires et les meilleurs soins physiques.
L'absence de la mère, cet élément affectif, psychologique, a donc des répercussions non seulement sur le développement psychique de l'enfant, mais aussi sur son état physique sous forme de troubles digestifs. C'est là la première description que nous ayons d'une de ces maladies dont on parle beaucoup actuellement, les maladies psychosomatiques - affections physiques dont une des causes est d'ordre psychologique.
2. Si l'enfant est abandonné par sa mère au cours de sa deuxième année, sa réaction est toute différente : il est beaucoup plus difficile de lui fournir un substitut maternel. Il a appris à reconnaître sa mère comme un individu unique et il repousse toutes les autres personnes. Il traverse un état d'angoisse pendant lequel il proteste maintenant énergiquement contre l'absence de sa mère. Cette réaction est d'autant plus marquée qu'il était mieux aimé et compris par elle. Si cet enfant n'est pas rendu à sa mère après 3 mois, il risque fort par la suite, de ne pouvoir contracter avec autrui que des liens superficiels.
Il en va de même pour l'enfant qui n'a pas été réellement séparé de sa mère mais à qui celle-ci n'a pu témoigner l'affection chaude et simple dont il a besoin. Cette séparation, non pas matérielle mais affective, est très peu apparente si on ne pense pas à la déceler. De nombreuses maladies de l'âge adulte : anorexie mentale, colite, asthme, maladies de la peau, certaines maladies mentales sont plus fréquentes chez des sujets qui n'ont pas bénéficié d'une bonne relation avec leur mère.
L'amour de la mère pour son enfant, c'est ce qui lui permet, au sens propre, de vivre. Dès la deuxième année, cet amour va devenir le grand moteur de l'éducation. L'enfant va prendre conscience que l'amour de sa mère lui est absolument nécessaire. La mère commence par rendre possible à l'enfant le développement de ses instincts et de sa capacité d'aimer. Puis elle va lui apprendre à se rendre maître de ses instincts sans s'en appauvrir. Il faut que l'enfant reste capable d'éprouver des émotions les plus riches possibles, d'aimer, de s'attacher à bon escient, mais aussi de détester, de lutter, de se battre s'il le faut, à bon escient aussi. Si cette influence ne s'exerce pas, on constate que l'enfant devient un asocial. Ni sa conscience morale, ni sa volonté ne se forment normalement.
3. Carence d'amour maternel vers 3-4 ans.
A cet âge, l'enfant commence à acquérir la notion du temps. Il sait ce qui est aujourd'hui et demain, il peut comprendre si on lui explique les raisons pour lesquelles maman se sépare de lui, que, s'il ne la voit pas aujourd'hui, il la verra demain. Alors l'enfant qui a établi un lien étroit avec sa mère, celui qui présentait le plus de difficultés à la séparation pendant la 2ème année, sera, à 3-4 ans, l'enfant le plus facile si une séparation s'impose (séjour à l'hôpital, par exemple).
Mais si l'enfant est brusquement séparé de sa mère, qu'elle meure on qu'elle l'abandonne (c'est à peu près la même chose pour lui parce qu'à cet âge, il croit que tout a une cause, que tout est voulu, il n'a pas encore acquis la notion de hasard), il réagit comme si on l'abandonnait volontairement, méchamment et cela éveille en lui une très grande rage. A cet âge, il a déjà appris à ne pas extérioriser sa rage et il va se trouver devant l'incapacité de se débarrasser de cette hostilité. Il pourra en résulter des modifications profondes de son caractère et devenir un adulte aigri, revendicateur, toujours déçu et toujours insatisfait.
Il pourra aussi conserver en lui un grand fond d'hostilité dont il cherchera à se décharger sans jamais y parvenir, se brouillant avec ses amis, se croyant persécuté par ses proches et par la société.
Il pourra penser que s'il a été abandonné, c'est parce qu'il ne méritait pas un meilleur sort. C'est là le curieux raisonnement caractéristique de la forme de pensée de l'enfant à cet âge. C'est pourquoi il est nécessaire d'expliquer à l'enfant qui est en âge de le comprendre tous les événements qui se produisent dans son entourage, afin d'éviter que les explications qu'il se donne, selon sa forme de pensée infantile, ne s'accompagnent d'émotions très dévalorisantes pour lui, créant des sentiments d'infériorité.
L'enfant a 3 droits essentiels :
1. droit à une mère;
2. droit à l'amour de sa mère ;
3. droit de se développer dans une atmosphère de sécurité.
Cette atmosphère de sécurité est créée par une mère sereine. Une mère angoissée fait beaucoup plus de tort à l'enfant que celle qui n'a pas le temps de lui donner les soins physiques et de propreté habituels dans notre civilisation. L'anxiété de la mère est souvent l'expression d'un conflit conjugal et les maris ont aussi leur part de responsabilité car c'est parfois eux qui sont responsables de l'anxiété de leur femme.
L'enfant a un flair infaillible que les adultes perdent en général et qui lui permet de vibrer à l'unisson de ses proches. On ne petit pas lui cacher quand on est triste, préoccupé ou de mauvaise humeur, à plus forte raison si on est anxieux.
Il a déjà en lui-même d'innombrables causes d'angoisse. Les angoisses nocturnes sont habituelles chez beaucoup d'enfants sensibles et, en bas-âge, une propension à l'angoisse est tout à fait normale. Mais la mère est là pour le rassurer et lui donner le sentiment de sécurité auquel il a droit.
Si l'anxiété normale de l'enfant n'est pas suffisamment apaisée, elle va se reporter sur toutes les situations difficiles qu'il aura à affronter : début de la scolarité, conflits avec ses camarades, avec ses frères et soeurs, etc. Le climat anxieux où l'enfant se développe agit comme un poison et l'empêche d'aborder sereinement les problèmes qui se posent à lui. C'est comme si l'enfant anxieux était convaincu d'avance qu'il ne peut lui arriver que des malheurs et qu'il ne peut qu'échouer dans tout ce qu'il entreprend.
Le petit enfant pense, juge, raisonne à travers sa mère. Il absorbe ses pensées et partage ses émotions. Il redoute de faire ce qu'elle interdit avant de pouvoir juger par lui-même ce qui est bien et ce qui ne l'est pas. Il rit si elle rit, devient nerveux si elle est anxieuse, est satisfait s'il reçoit d'elle ce dont il a besoin, aliments, sécurité, présence. A voir sa mère lui sourire, il acquiert ce premier sentiment de contentement qui est l'amorce du sentiment de sa valeur qu'il aura plus tard. Rien n'est plus nécessaire à l'enfant qu'une mère heureuse et sereine; c'est le secret des réussites éducatives.
A la suite des découvertes de Pasteur, on a cru que la santé de l'homme dépendait d'une protection suffisante contre les microbes. On sait maintenant que le problème des maladies est beaucoup plus compliqué et même que les microbes sont parfois nécessaires.
Depuis les découvertes de Freud, on a cru qu'il suffisait d'éviter à l'enfant les conflits psychiques pour qu'il soit sain. Les conflits sont, en réalité, nécessaires, eux aussi, et inévitables.
C'est la mère qui, satisfaisant par son amour et sa présence le grand besoin de sécurité de son enfant, l'aidera, non pas à éviter ses conflits - inévitables au cours de son évolution - mais à les surmonter.

(1) Extraits d'une conférence faite à l'Ecole des Parents de Genève en mars 1955. (2) Par « soins maternels », il faut entendre la présence affectueuse d'une personne, toujours la même, à laquelle l'enfant s'attache. Il n'est pas nécessaire que ce soit sa vraie mère.









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