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Les « Entretiens sur l'éducation » est un mensuel publié sans interruption depuis plus de 100 ans.
Le site www.entretiens.ch vous offre la possibilité de consulter en ligne ces extraordinaires archives parcourant/ponctuant au jour le jour l'histoire de l'éducation familiale d'un bout à l'autre du XXème siècle.
La survie de la brochure mensuelle imprimée parallèlement à la distribution virtuelle à travers le site est le garant de la poursuite de cette aventure. La rédaction est assurée de façon bénévole par un groupe de parents passionnés par la réflexion et l'écriture autour du vécu familial. Les frais d'impression du journal et la gestion du site (100 000 pages demandées par mois??)....30.- par an (20€).
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La vie humble

La vie humble, aux travaux ennuyeux et faciles, est une oeuvre de choix qui veut beaucoup d'amour.
Verlaine

Quand on est très jeune, on attend que la vie nous apporte des événements heureux, qu'elle nous comble d'amis, de travaux passionnants, de distractions et de voyages.
Que de déceptions !
La plupart des femmes, tout en raccommodant les chaussettes de leur mari ou repassant leurs chemises, ressassent leur amertume : « Préparer pendant une heure un repas qui disparaît en un quart d'heure!… Et il y a quatre repas par jour! Autrefois le printemps c'était les fleurs, le chant des oiseaux, maintenant c'est la lutte contre les mites. L'automne nous enchantait par ses couleurs, maintenant c'est l'époque des conserves et des confitures. Toute l'année on rallonge les jupes des filles et on retricote les poignets des pullovers des garçons ! Pas de travail intéressant, mais une routine ennuyeuse. »
Cependant, on s'aperçoit, au cours des années que, vu sous un autre angle que celui de l'égoïsme, la vie régulière de la mère de famille est bien autre chose qu'une sempiternelle répétition de besognes domestiques. La mère est le centre du foyer. D'elle dépend le « ton » général de la vie familiale. De son équilibre, de son sens du devoir, de sa volonté de bien faire et d'un certain sacrifice d'elle-même accompli sans acrimonie, la famille vit. Mari et enfants tirent de cette atmosphère la force nécessaire à la lutte dans le monde soit professionnel, soit scolaire. Ils s'en nourrissent psychologiquement, ils y rechargent leurs accumulateurs. Si l'image de la vestale antique nous a plu, évoquons-la quand le découragement nous attaque. Ce feu symbolique était entretenu par des soins quotidiens et matériels. Toutes ces choses qui composent notre vie peuvent être considérées de multiples manières. Il n'y a pas seulement la bonne ou la mauvaise. C'est comme en photographie, affaire d'éclairage qui peut déformer ou embellir.
En y réfléchissant, ne voyons-nous pas souvent bien des choses sous un mauvais jour, et ne pourrions-nous pas les éclairer autrement? Une autre femme réagirait mieux. Pensons à telle amie qui aimerait préparer ce plat difficile pour le plaisir de ses invités gourmands ou à telle autre qui serait contente d'exécuter ce beau raccommodage presque invisible. Je suis certaine qu'on peut tourner son esprit différemment et trouver son contentement aux travaux les plus humbles. Comme exercice de gymnastique du caractère, prenons intérêt et plaisir aux tâches obligatoires. Pensons à ceux qui en bénéficient, attachons-nous à la bienfacture, développons en nous la satisfaction du travail accompli, de l'oeuvre menée à chef.
Voici du reste l'appréciation d'un homme très intelligent et grand écrivain, André Maurois, dans son livre « Un art de vivre ».
« Un bel exemple de l'union du travail manuel et du travail intellectuel, c'est, quand il est fait avec amour, le travail de la ménagère. Une femme qui gouverne bien sa maison y est à la fois reine et sujette. Elle conçoit et souvent exécute elle-même ce qu'elle a conçu. Elle est, pour son mari et pour ses enfants, celle qui rend le travail possible. Elle les préserve des soucis; elle les nourrit; elle les soigne. Elle est ministre des beaux-arts et c'est grâce à elle que la maison ou l'appartement ont quelque charme. Elle est ministre de l'éducation familiale et c'est grâce à elle que les garçons entrent à Polytechnique et que les filles sont cultivées.
Une femme devrait être aussi fière de réussir à faire de son ménage un petit monde parfait que le plus grand homme d'Etat d'avoir organisé un pays. Le Maréchal Lyautey disait, avec raison, que les questions d'échelle n'ont aucune importance. Ce qui est parfait est parfait, quelles qu'en soient les dimensions.
Le travail de la ménagère, hors des classes trop riches, est le plus dur et il n'est guère, pour les femmes, de repos. La semaine des deux dimanches est, à leurs yeux, la semaine où elles peuvent, après le travail de l'atelier, donner deux jours au ménage, à la lessive, au raccommodage, aux enfants. Il y a toujours dans une famille, dans un trousseau, quelque chose urgente qui doit être faite. Ajoutez les soucis de n'être pas trop laide, de s'habiller décemment, de se cultiver. Vraiment ce métier de femme, s'il est bien fait, laisse peu de loisirs, mais il est aussi l'un de ceux où le travail trouve une récompense immédiate. Rien de plus beau que de voir comment, en quelques jours, une vraie femme, avec très peu d'argent et beaucoup de coeur, transforme un taudis en paradis. C'est ici le point d'intersection de l'art de travailler et de l'art d'aimer. »









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