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La survie de la brochure mensuelle imprimée parallèlement à la distribution virtuelle à travers le site est le garant de la poursuite de cette aventure. La rédaction est assurée de façon bénévole par un groupe de parents passionnés par la réflexion et l'écriture autour du vécu familial. Les frais d'impression du journal et la gestion du site (100 000 pages demandées par mois??)....30.- par an (20€).
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Réactions des jeunes devant le monde moderne

Précisons d'abord ces réalités :
- les jeunes;
- le monde moderne ;
- les réactions des jeunes.

Qu'est-ce qu'un jeune ?

Y a-t-il coïncidence entre la jeunesse et l'adolescence? Oui, si nous pensons à l'âge ; non, si nous pensons à l'évolution psychique. De vieilles gens peuvent s'être attardés mentalement à un âge tendre, et certains jeunes gens ont les réactions de vieilles personnes.
Il est probable qu'en proposant ce titre, on ait pensé au nombre des années et non au développement psychologique, c'est-à-dire à des garçons et des filles dont la puberté physiologique est effective et qui s'acheminent vers l'âge adulte. La guerre les a partiellement déterminés. L'après-guerre aggrave chez beaucoup le malaise qui a sans doute éclaté avec toute sa violence pendant l'occupation, ce qui nous amène à constater que les réactions de la jeunesse contemporaine ne sont pas identiques à celles des générations précédentes.

Le monde moderne

Que dirons-nous donc de ce monde moderne qui conditionne en partie une attitude de la jeunesse? Certes, le monde est toujours en marche et une génération nouvelle a toujours étonné celle qui la précédait, précisément en raison de sa nouveauté. Certes aussi, le heurt des générations est de toutes les époques et on le conçoit, ne serait-ce qu'en raison de l'état de crise (crise juvénile) qui caractérise l'adolescence. Rappelons en gros que l'adolescent s'achemine vers l'état adulte, c'est-à-dire vers des fonctions totalement différentes de celles qu'exigeait l'état d'enfance :
L'enfant devait se construire lui-même ou construire en lui-même l'adulte qu'il allait devenir. L'adulte doit construire le milieu matériel et humain où il vit.
Travail surtout intérieur de l'enfant, travail surtout extérieur de l'adulte, ce qui ne s'oppose nullement à la continuité de l'action intérieure sur la vie morale et spirituelle.
L'adolescent se sent donc sollicité par deux forces contraires :
l'une veut le fixer dans la quiétude d'un temps auquel il avait fini par s'adapter, l'autre veut l'introduire dans un avenir dont il aperçoit le risque (et heureusement aussi le « beau risque »). Ce tiraillement explique ce qu'on appelle les contradictions juvéniles.
Mais lorsque l'avenir se présente comme un ciel couvert de nuages et où les orages semblent imminents, la seconde poussée engendre des reculs ou des fanfaronnades. Et voilà bien ce qui provoque actuellement des réactions amplifiées ou modifiées de la jeunesse.
La marche du monde ne constitue pas une avance comme pour les générations précédentes et il est faux d'attribuer toutes les difficultés à la seule accélération des rythmes de la vie. Nous assistons à un changement de pente, à un retournement, à une mutation. Les problèmes individuels perdent de leur importance, mais les problèmes collectifs en prennent au contraire avec tant de brutalité qu'on peut se demander si les premiers ne sont pas considérés comme négligeables. Ce serait faux, mais il est certain que les relations et les structures humaines requièrent le meilleur de nos forces et de notre attention. Après avoir tout analysé jusqu'à l'émiettement nous opérons des synthèses ; après avoir « dispersé » jusqu'à l'extrême limite de… l'atomisme, nous sentons qu'il faut rassembler. Ainsi, la vie présente-t-elle aux jeunes des exigences dont pour la plupart nous n'avions pas l'idée il y a vingt ans. Ils sentent cela d'emblée, même sans bien s'en rendre compte et leur propension naturelle à nous considérer comme des « fossiles » s'en est considérablement accrue.

Les réactions des jeunes

Quelles sont donc les réactions nouvelles d'une jeunesse qui amorce pour l'humanité une voie opposée à la première (disons du moins : complémentaire de la première) ? Pour les observer, il nous faut admettre que notre qualité maîtresse d'éducateurs doit être, sur ce plan, la jeunesse d'esprit. Si nous sommes de farouches défenseurs du bon vieux temps et des règles dont nous avons vécu, n'allons pas plus loin. Mais nous devons alors admettre ce dilemme : ou nous laisser piétiner par les jeunes, ou bien engager la lutte pour les réduire et les détourner de leur temps. Si nous sommes prêts à essayer de comprendre, alors, attaquons-nous tout de suite à leur fameuse dureté :

Les jeunes sont durs, c'est un fait ; nous n'avons pas besoin de lunettes bien grossissantes pour découvrir derrière cette dureté (je devrais dire ce durcissement) une inquiétude, une angoisse, une détresse. Quelle peur de vivre, souvent ! et parfois quelle peur tout court. Quel monde les accueille? « désintégré dans tous les domaines »-, disait une jeune fille. Comment ne nous en voudraient-ils pas inconsciemment, même si nous sommes portés nous-mêmes par un flot que nous ne pouvons ni endiguer, ni orienter! De cette sourde agressivité qui amplifie l'agressivité normale de l'adolescent, nous pourrions peut-être les guérir, si nous n'étions la plupart du temps tremblants de la même peur. On me dira qu'il y a bien de quoi ! et je n'en disconviens pas, mais je suis convaincue que non seulement « la peur n'enlève pas le danger » mais qu'elle le provoque. De sorte qu'il nous faut à tout prix vaincre notre propre peur et montrer de ce fait aux jeunes, sans discours et sans sermons, comment on peut la surmonter.
Lesquels parmi les parents soucieux du courage de ces jeunes ne sont pas indignés du ramassis d'horreurs que publient la plupart des journaux? Qui n'a pas souhaité qu'il y soit fait état avec plus d'insistance, des gestes vraiment humains auxquels s'accroche notre espoir ? Tant de symptômes sont « réjouissants » dont nous ne parlons pas assez: grands mouvements de solidarité, possibilité de donner son sang - effectivement et non plus seulement en image - de donner ses yeux, ses reins… Quel étonnant échange ! Possibilité de venir au secours d'un malade condamné, grâce à un appel instantané, répété en écho sur toute la terre ; en un mot, possibilités nouvelles et immenses de l'amour en face des possibilités immenses aussi de la haine. Dire que les jeunes sont enthousiastes et ont besoin de s'enthousiasmer, c'est un lieu commun, mais si nous nous taisons sur les grands thèmes, ils s'accrochent aux petits, ils déifient un acteur de cinéma ou une jeune romancière qui n'apportent cependant au monde que leur désespérance et leur morbide intrépidité. Heureux le jeune qui rencontre un adulte dont il peut vraiment se faire le disciple ! C'est alors qu'il peut se détourner de la poussière des mots, des idées, des systèmes en décomposition et faire face à toutes les constructions aujourd'hui possibles. Montrons-leur par l'exemple, que c'est à l'heure où « rien ne tient plus » que nous avons toute liberté pour amorcer la réalisation des plus beaux rêves.
Il est un élément plus positif de la mentalité des jeunes qui augmente encore leur agressivité, c'est leur goût de la vérité. Ils appellent un chat un chat; ils rejettent orgueilleusement tout ce qu'ils appellent conformisme ou hypocrisie. Ils ont raison mais dans cette rage de destruction où ils n'épargnent aucune forme, ils brûlent dans le même autodafé, les moules vides et les vases précieux, les convenances mondaines et les signes d'exquise courtoisie. « Ils n'ont plus de respect » disons-nous, « ils sont cyniques ». C'est vrai. C'est ainsi que la vie humaine aborde toute période nouvelle : elle détruit avant de construire. Ou la jeunesse n'arrive pas à croire qu'elle fait souffrir ou bien elle se délecte de la souffrance qu'elle cause comme si elle pouvait neutraliser ainsi les incompréhensions dont elle souffre elle-même. Chaque fois que les compensations sont possibles, on arrive à le lui faire comprendre et à lui suggérer que détruire des formes vides est souhaitable mais qu'il faut être prêt à en créer de nouvelles pour relier les êtres entre eux, au temps où éclate le sens de leur unité profonde. Mais ces conversations restent plus difficiles entre parents et enfants, qu'entre enfants et adultes étrangers. Il est donc nécessaire de faire confiance pour eux à une personne d'expérience qui n'a pas les traits de l'ennemi barrant le passage.
Et c'est souvent « l'étranger » qui peut faire comprendre aux parents que les goûts nouveaux de l'adolescent ne sont pas forcément des provocations à leur égard ; en même temps qu'il peut faire comprendre aux jeunes qu'ils rendraient leur propre vie beaucoup plus agréable s'ils ne lançaient pas comme des projectiles leurs avis et leurs engouements. Si nous considérons par exemple le goût des jeunes pour la guitare, il est aussi nécessaire de maîtriser l'indignation des parents fidèles aux études de piano de leur jeunesse (dans la mesure peut-être où elles leur ont tant coûté) que le mépris des jeunes pour un instrument qu'ils considèrent un peu comme nous aurions considéré l'épinette de nos grand'mères. Un peu de jeunesse d'esprit d'un côté et de bienveillance de l'autre seraient fort capables de concilier deux formes très valables d'expression musicale, chacune expressive du temps où elle fleurit.

Il faudrait ici parler longuement des relations entre jeunes gens et jeunes filles (encore un problème de relations!). Il est impossible de le faire en quelques mots, en quelques lignes; il creuse trop loin. En gros, il évoque pour nous plus de dangers, mais aussi plus de vérité. Respecter la vérité, diminuer les dangers, ce n'est pas facile, mais il me semble que nous pouvons encore proposer ici deux sujets de réflexion :
1) De toute évidence, nos critiques acerbes renforcent chez les jeunes le besoin d'indépendance.
2) Ouvrir la famille, permettre à l'adolescent de recevoir quelques compagnons ou compagnes, c'est nous accorder à nous-mêmes le plus sûr droit de regard.
Et cette remarque nous permet de conclure ce qui n'est cependant qu'effleuré puisqu'une ère nouvelle commence tout juste : notre effort doit tendre à moraliser sans sermons, à faire profiter les jeunes de ce qu'il y a de toujours valable dans notre expérience, sans le leur asséner comme un code de perfection. Quel réglage ! car notre bienveillance ne peut se faire condescendante, pas plus que notre attention ne doit ressembler à une surveillance. - « Pourquoi, demandais-je à un groupe de jeunes, écoutez-vous avec sympathie ce que je vous dis, alors que vous n'acceptez pas les paroles semblables de vos parents ? - C'est que, me répondit l'un d'eux, ce que vous nous dites est une réponse à ce que nous vous avons demandé, tandis que nos parents nous disent sans cesse ce que nous ne leur demandons pas!
« Que nos paroles soient comptées ».









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