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Les « Entretiens sur l'éducation » est un mensuel publié sans interruption depuis plus de 100 ans.
Le site www.entretiens.ch vous offre la possibilité de consulter en ligne ces extraordinaires archives parcourant/ponctuant au jour le jour l'histoire de l'éducation familiale d'un bout à l'autre du XXème siècle.
La survie de la brochure mensuelle imprimée parallèlement à la distribution virtuelle à travers le site est le garant de la poursuite de cette aventure. La rédaction est assurée de façon bénévole par un groupe de parents passionnés par la réflexion et l'écriture autour du vécu familial. Les frais d'impression du journal et la gestion du site (100 000 pages demandées par mois??)....30.- par an (20€).
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Correspondance

Mme J. C., Genève, nous écrit :

C'est avec intérêt que j'ai lu l'article des « Entretiens sur l'Education » intitulé L'enfant et l'argent. Les renseignements qu'il donne m'ont éclairée sur l'idée qu'un enfant se fait de l'argent, aux diverses étapes de sa vie, mais ils m'ont laissée sur ma soif. J'espère tant que vous allez maintenant nous donner quelques recettes qui permettront aux mamans, dont je suis, d'aider leurs petits à acquérir une notion juste et équilibrée de la valeur de ce « dieu-argent ».
Par exemple :
1. Comment justifier l'interdiction formelle du début :« Ne pas
toucher » ?

2. Par quels mots leur faire sentir qu'ils n'ont pas vraiment commis un « vol » en prenant la pièce de monnaie qui leur permettra d'acheter la sucette convoitée ?
3. Par quels procédés les aider à mieux comprendre les liens qui existent entre le travail et le salaire qu'il mérite et, après cela, que ce même travail peut et doit être parfois désintéressé ?

Autant de questions - et il y en aurait d'autres - auxquelles je vous serais reconnaissante de répondre dans vos prochains numéros.


Répondre à Mme J. C. n'est pas facile ! Il faudrait tout un livre ! Mais sachant que ma réponse est forcément incomplète, j'aimerais souligner deux éléments de la question.

Primo : en éducation, il n'existe aucune recette valable pour tous les cas, avec garantie absolue de succès. En cuisine, un oeuf est un oeuf, la farine ou le sucre sont toujours farine ou sucre ! En éducation il n'en va pas de même ! Un enfant ? mais il ne s'agit pas d'un enfant X, ou de L'enfant ! Il s'agit de cet enfant-là, avec son individualité à lui, ses réactions à lui, sa sensibilité à lui. La seule « recette » valable serait: « Etant donné cet enfant-là mieux vaudrait agir comme ceci que comme cela »; d'où impossibilité totale de donner dans notre journal des recettes valables dans tous les cas.

Secundo : même en cuisine (!) la recette la plus excellente rate! si l'environnement est mauvais. Si votre bol n'a pas été soigneusement lavé et garde encore la vague odeur du saucisson que vous y avez mis tremper, si votre four n'est pas totalement débarrassé de l'odeur du poisson grillé dont la famille s'est régalée hier, votre gâteau préparé avec les oeufs les plus frais et la farine la plus fine, aura malgré tout un goût désagréable!
Il en va de même pour l'enfant. Ce qui importe pour lui, ce ne sont pas « les mots par lesquels nous leur ferons sentir qu'ils n'ont pas vraiment commis un vol », mais c'est notre attitude à nous parents, en face de l'argent. Si nous mesurons l'estime que nous accordons aux êtres qui nous entourent d'après le montant de leur compte en banque, si nous pensons que tous les moyens sont bons pourvu qu'on gagne le plus possible, si notre seul critère pour conseiller un enfant dans le choix d'une carrière est que celle-ci soit « très lucrative » ; si nous sommes de ceux qui cherchent toujours à gagner le plus possible en « en mettant » le moins possible ; alors tous nos mots sont sans valeur aucune, car nul, plus vite qu'un enfant ne sait dire : « faites ce que je dis et non ce que je fais » !

Tout ceci dit, on pourrait répondre très brièvement à Mme J. C.

1. L'argent n'est pas un jouet. C'est une chose précieuse. Donc le jeune enfant n'y touche pas plus qu'aux lunettes de Maman ou à la pipe de Papa. Pas besoin de grandes explications ! !
2. Il me semble qu'il faut prendre la question par l'autre bout, c'est-à-dire ne pas parler de « vol », que cette idée n'effleure pas la mère…, à condition bien sûr que celle-ci soit certaine que l'enfant n'a pas, bel et bien consciemment, voulu s'approprier quelque chose qui ne lui appartenait pas ! !
3. En prenant l'exemple du Père. « Papa travaille tout le jour, il se fatigue, il a des soucis et pour tout cela il est payé; et avec cet argent nous pouvons vivre. Si Papa ne travaille pas, comment ferions-nous ? Non seulement nous vivons, nous, mais nous aidons d'autres gens à vivre ; nous pouvons donner. Et souvent, si nous n'avons pas d'argent - comme toi petit enfant - nous donnons notre travail, notre peine pour rien, pour faire plaisir. »

Et pour conclure, je renvoie Mme J. C. à l'excellent livre de Louise Despert : « Enfants du divorce » qu'elle trouvera dans notre bibliothèque : « La façon d'apprendre de l'enfant est par identification avec les grandes personnes qui ont le plus de signification pour lui : ses parents. Ce n'est pas tant les mots qu'ils disent, mais ce qu'ils font et ce qu'ils sentent, la façon dont ils font face à la vie, qui ont le plus de signification pour lui. C'est de cette image qu'il crée inconsciemment ses propres attitudes, l'acceptation ou le rejet des responsabilités et des privilèges de la vie d'adulte.»









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