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Les relations entre les parents, le médecin et l'enfant malade

Le Docteur Martin Du Pan, désireux d'apporter dans cette causerie quelques réflexions et exemples fournis par la vie quotidienne d'un pédiatre, avait envoyé un questionnaire à une centaine de mères ou de pères de ses petits malades.

Les réponses obtenues et sa riche expérience de pratique médicale lui ont permis de traiter ce problème de relation d'une manière extrêmement vivante et vraiment « vécue ». Successivement il envisagera les parents, le médecin et l'enfant.



Les parents.

Dans le questionnaire adressé à une centaine de parents, nous avons posé comme première question :« Dans quel état d'esprit êtes-vous lorsque vous amenez votre nouveau-né au pédiatre pour la première fois? »
Une psychologue, femme de médecin, a répondu par un point d'interrogation. Le contact avec son pédiatre n'est pas un problème pour elle. Mais certaines mères répondirent à cette même question par les mots : inquiète, anxieuse, angoissée. Est-ce à dire que ces mères appartiennent à ce groupe de parents angoissés, si bien décrits par le Prof. André Rey dans son chapitre consacré à la psychologie des parents d'enfants arriérés : ces parents qui s'affolent à la première alerte, qui courent d'un spécialiste à l'autre pour faire confirmer le premier diagnostic, qui demandent un pronostic détaillé, bref qui ne peuvent s'attacher à un médecin et ne savent à quel saint se vouer.
Au contraire, d'autres mères répondirent par les mots : confiante, calme, détendue, curieuse de savoir si mon bébé est le plus beau du monde. On peut espérer que ces mères, venues pour recevoir des conseils, savent que ceux-ci seront donnés par une personne expérimentée, digne de confiance et capable de saisir leurs difficultés et de les résoudre, et qu'elles se trouvent dans un état d'esprit propre à poser clairement les questions qui les préoccupent et à écouter attentivement les explications voulues. Le contact sera alors facile et profitable. Sans doute que leurs enfants seront aussi d'abord plus facile et seront plus confiants que ceux de parents anxieux.
Mais il serait bien simpliste de diviser les parents en deux classes : celle des parents détendus et celle des parents anxieux.
Les parents, qui sont en quelque sorte le pain et le lait psychologiques dont se nourrit l'enfant, sont aussi divers que les fleurs d'un jardin anglais. Mettre à jour leur personnalité est primordial pour la connaissance des besoins de leur enfant.
Le premier diagnostic que doit faire le pédiatre est donc celui des parents - de la mère en particulier - afin de savoir dans quel « climat » vit l'enfant et comment aider au mieux chaque mère, selon ses talents. Car il y a des dons pour tout. Certaines femmes ont vraiment le génie maternel, et là, nos indications peuvent rester cantonnées dans le domaine strictement médical. Mais d'autres femmes ont besoin d'une aide qui dépasse les frontières de la médecine. Il nous faudra alors les instruire, les secourir et souvent les orienter (vers l'Ecole des Parents en particulier).

Le médecin.

Je vais essayer de vous brosser un tableau du pédiatre parfait, tel que le désireraient bien des parents :
1. Savant exemplaire, il devrait toujours poser un diagnostic brillant et connaître les dernières découvertes scientifiques lui permettant de soigner et guérir le malade le plus rapidement possible, sans mettre pour autant l'organisme en état de moindre résistance.
2. Excellent psychologue, il devrait être capable de vous renseigner exactement sur le comportement que vous devez avoir en toutes circonstances vis-à-vis de votre enfant.
3. Toujours à votre disposition, de nuit comme de jour, il devrait sonner à votre porte dès que vous avez reposé le cornet de votre téléphone.
4. Toujours détendu et de bonne humeur, il ne devrait jamais prendre de vacances car il faudrait alors le remplacer par un inconnu - et l'inconnu est souvent angoissant.
5. Il devrait toujours et immédiatement mettre votre enfant en confiance et avoir un contact agréable avec lui, même lorsqu'il doit le vacciner à plusieurs reprises.

Bref, ce savant, ce protecteur, cet ami infatigable, ce « superman », voilà le pédiatre que je vous souhaite.

Malheureusement, je crois bien que ce médecin-là n'existe qu'en peinture. Et pourtant, François Mauriac n'a-t-il pas écrit :« Je connais encore des médecins qui ont, sans s'en rendre compte eux-mêmes, parfois, des vies dont pourraient être jaloux bien des religieux ». Cette réflexion édifiante, certes, a fait surgir devant mes yeux une double image : celle de bons pasteurs ou de bons curés, confortablement rebondis, et prenant le temps de faire honneur aux biens que nous offre notre Seigneur, et celle d'une assemblée de pédiatres réunis à un Congrès international où je défie quiconque de trouver plus d'un ou deux pédiatres obèses !
Les pédiatres du monde entier courent en effet comme des chats maigres, téléphonent en mangeant, se brûlent en avalant leur café, luttent contre la montre du matin au soir, s'accommodant tant bien que mal d'une mauvaise conscience chronique, puisqu'ils ne pourront jamais satisfaire tout le monde à la fois.
De plus, si notre métier est une vocation, nous n'avons pas tous fait voeu de célibat. Ce serait d'ailleurs une lacune pour notre expérience humaine. Car il est important que nous ayons vécu les vicissitudes du père qui a passé des nuits blanches parce que son fils ou sa fille criait la nuit, parce qu'il avait mal aux dents, le nez bouché ou des cauchemars.
Comme tout autre homme, le médecin aimerait pouvoir être un époux attentionné et un père qui voit ses enfants à un autre moment que lorsqu'ils dorment. La vie privée du médecin devrait exister.
S'il veut progresser ou simplement se tenir au courant dans le domaine scientifique, le médecin doit lire les périodiques souvent publiés dans une langue étrangère ; il doit participer à des Congrès, s'intéresser à la vie de l'Hôpital, ce qui nécessite du temps.
S'il veut être détendu et bien portant, il devrait pouvoir dormir et se récréer le dimanche. Bref, pour être à la hauteur de sa tâche, le médecin a besoin de temps pour lui.
Comme l'a relevé malicieusement un de mes collègues français, le médecin n'est ni un fétiche, ni un domestique. Il n'est pas non plus un surhomme, mais un Homme. Et comme fils et petit-fils de médecin, j'aime à le souligner, le médecin peut encore être en notre époque de « médecine socialisée », l'Ami de ses patients. « Ce que j'ai appris de mieux à mes élèves, c'est de s'asseoir au lit du malade et de lui tenir la main » comme l'a dit le cher Professeur Roch.
En effet, la médecine change, mais le fond de l'âme humaine ressent les mêmes aspirations que celles de nos ancêtres.


L'enfant.

Comme j'ai coutume d'en avertir les étudiants en médecine, l'exercice du pédiatre diffère essentiellement de celui du médecin d'adultes, car le pédiatre examine généralement son malade, non pas en tête à tête, mais en présence d'une tierce personne.
Et cette tierce personne, c'est vous, Mesdames ou Messieurs. C'est vous qui nous indiquez le comportement de votre enfant qui refuse énergiquement d'aller sur le vase lorsque vous l'avez décidé, de manger à l'heure indiquée et en quantité prescrite ce que vous lui avez préparé.
C'est vous qui nous annoncez que votre enfant n'obéit pas à vos ordres, qu'il passe son temps à lire des Tintins alors que vous estimez qu'il devrait lire des livres instructifs, de « son âge », qu'il s'intéresse beaucoup plus aux coureurs cyclistes, aux champions de ski ou aux stars de cinéma qu'à l'histoire des Romains ou à la géographie de l'Asie.
Bref, nous apprenons à connaître la vie personnelle de vos enfants par ce que vous nous en racontez, à travers votre optique.
Et c'est là un point très important, car vous l'avouerez, cette optique n'est pas toujours celle de votre enfant.
Mais votre présence est indispensable. Sans vous, nous sommes fort embarrassés ; en effet il nous manque des éléments importants lorsque nous devons examiner un nourrisson ou un petit enfant en l'absence de sa mère, remplacée par une voisine, une femme de ménage ou une domestique qui ne parle que l'espagnol.
L'examen physique de l'enfant est certes possible et parfois même plus facile en l'absence de sa mère. Mais tout ce qui précède la visite, tout ce qui l'a motivée, tout ce qui devrait s'en suivre fait défaut le plus souvent. On ne connaît alors pas les plaintes de l'enfant qui, s'il est à l'âge négatif, répond par des « non, non » énergiques à tout ce qu'on lui demande ou qui, au contraire, désireux de vous plaire, dit « oui » avec un grand sourire lorsqu'on lui presse sur le ventre et qu'on lui demande si cela lui fait mal.
Quel soulagement lorsque vous revenez du marché, Mesdames, vous plaignant, avec le sourire, d'avoir attendu notre visite toute la matinée et d'être partie parce qu'il fallait quand même préparer le déjeûner.
Comment établira-t-on le contact avec le nourrisson ? S'il a moins de 6 mois et qu'il ne distingue pas le pédiatre de ses parents, il n'y a pas de problème. Le jeune nourrisson ne se souviendra généralement ni du médecin ni des interventions subies, si bien que je recommande aux parents de faire vacciner leurs enfants vers trois mois. Non seulement ils ne se rappelleront pas la piqûre, mais ils réagiront moins violemment au vaccin que plus tard. Et fait capital, ils seront protégés précocement contre la coqueluche, cette maladie qui cause dans nos contrées, chez les enfants de moins d'un an, plus de décès à elle seule que la diphtérie, la scarlatine, la rougeole, la méningite et la poliomyélite réunies.
Dès que l'enfant a dépassé 6 mois, il se méfie de la personne étrangère, le contact devient donc plus difficile. Si le pédiatre porte des lunettes, comme papa, il sera peut-être accepté pendant quelques mois encore, mais plus tard, il faudra souvent des prodiges de patience et d'imagination pour apprivoiser l'enfant et lui faire ouvrir la bouche, lui palper le ventre et l'ausculter.
Il est certainement indispensable de dorer la pilule que doivent avaler nos petits amis : les accueillir dans une salle d'attente pourvue de jouets bien choisis, leur laisser le temps de s'apprivoiser pendant l'interrogatoire posé à la mère, s'amuser avec eux avant et pendant l'examen, tout ceci est le minimum d'attention que le pédiatre, cet étranger en blouse blanche, indiscret et curieux, puisse manifester à ses petits patients.
Mais vous; Messieurs, et surtout vous, Mesdames, vous pouvez collaborer à cet examen en préparant votre enfant, en lui expliquant que son médecin est aussi un papa, qu'il ne lui veut que du bien et que, s'il doit piquer, c'est pour le protéger contre des maladies graves.
Je me rappelle cette phrase d'une maman à son garçon de 5 ans venu pour une injection de vaccin antipoliomyélitique. « Si tu ne dis rien, Janot, je te donne une Fiat 600. " (Je compris qu'il s'agissait d'un modèle réduit!) Je laisse cependant aux psychologues, ici présentes, le soin de vous dire si le marché conclu entre la mère et l'enfant était très raisonnable sur le plan éducatif. Car dès que l'enfant a dépassé l'âge de 4 ans, en principe, il est devenu un allié du médecin qu'il est le premier à réclamer lorsqu'il est malade. Il est donc très important que le médecin ne serve pas d'épouvantail lorsque votre enfant n'obéit pas et que vous ne le menaciez pas alors de le « mener au cabinet de consultation pour lui faire donner une piqûre contre la sottise ou la méchanceté ». Prenez d'autres arguments, vrais et raisonnables.
L'éducation de votre enfant joue un rôle très important, et qui se reflète dans tous les domaines. J'observe souvent que les enfants élevés très sévèrement, auxquels on manifeste peu de tendresse, sont d'un abord plus difficile que les enfants élevés de façon plus maternelle. En effet, les premiers paraissent plus solitaires devant l'épreuve et se laissent moins facilement approcher que les seconds.
La préparation de l'enfant par le médecin et par ses parents joue aussi un rôle important lors d'une opération.
Le moment auquel on décide d'une opération n'est pas nécessairement le moment favorable pour l'annoncer à l'enfant. Le moment où le faire et la façon dont on s'y prendra dépendront de l'âge de l'enfant, de sa notion du temps, de son caractère, des circonstances déjà vécues et de son imagination.
Prévenir un enfant, ce n'est pas forcément lui annoncer tel événement pour telle date. C'est avant tout être de coeur avec lui, le soutenir et lui éviter de toutes les façons possibles l'inconnu angoissant. On ne dira jamais trop le parti que l'on peut tirer des histoires racontées à l'enfant lorsqu'on l'endort. Si le petit patient a été préparé, s'il sait que le petit sirop - l'éther, - qui ne sent pas très bon, est nécessaire pour qu'il ne souffre pas, il suivra avec calme l'évolution des événements. Au contraire, s'il ne sait rien, il craindra tout, s'agitera.
Nous ne saurions trop vous recommander aussi de familiariser vos enfants de façon pratique aux interventions du médecin ou de la nurse en leur donnant une petite trousse médicale. Les enfants aiment jouer au docteur ou à l'infirmière et il est bon pour eux de pouvoir anticiper ou revivre dans l'action les émotions éprouvées. Les médecins en herbe seront toujours de bons confrères et des malades faciles pour les médecins chevronnés.

Jusqu'à présent, nous avons vu comment le médecin s'adaptait aux parents et aux petits patients. Maintenant prenons la lorgnette par l'autre bout et voyons comment les parents et les enfants réagissent.
Les réactions des petits sont très diverses, mais toujours absolues : petites filles qui vous sautent au cou, petits diables qui arrachent vos lunettes, bébés émus qui, comme des oiseaux, laissent leur carte de visite à chaque passage. Il n'est pas dans notre intention d'y ajouter de commentaire !
En ce qui concerne les parents, deux réactions générales m'ont vivement frappé : elles ressortent très clairement du questionnaire dont je vous ai déjà parlé. C'est d'une part la confiance que les parents témoignent au médecin de leur choix. Et c'est d'autre part l'impatience qu'ils ressentent lorsque la visite du pédiatre se fait attendre.
Pourquoi les mères s'énervent-elles, s'angoissent-elles ? J'ai une idée toute faite à ce sujet : il manque à leur sérénité un petit cours de puériculture qui pourrait s'appeler par exemple :« Ce que tout parent devrait savoir! ». Elles apprendraient alors à distinguer les cas graves des cas bénins et sauraient si le médecin doit venir ou non d'urgence.
La collaboration serait grandement facilitée en effet si chaque parent savait comment se comporter en diverses circonstances.
En définitive, il faut que le médecin soit un Ami. C'est ce que réclament le 95 % des personnes auxquelles nous avons demandé « quelles devaient être les qualités essentielles du pédiatre ».
Mais j'irai plus loin encore ; il faut que dans la confiance qu'ils témoignent à leur médecin, les parents comprennent que si leur pédiatre par exemple met tout son savoir, toutes ses capacités et toute sa sympathie à leur disposition, il n'est quand même pas tout puissant. Et je crois qu'un médecin conscient de ses pouvoirs, mais aussi de ses limites, paraphrasant le mot du père de la chirurgie française, Ambroise Paré, devrait pouvoir dire à chaque guérison : Je le soignai - Dieu le guérit.









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