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Les « Entretiens sur l'éducation » est un mensuel publié sans interruption depuis plus de 100 ans.
Le site www.entretiens.ch vous offre la possibilité de consulter en ligne ces extraordinaires archives parcourant/ponctuant au jour le jour l'histoire de l'éducation familiale d'un bout à l'autre du XXème siècle.
La survie de la brochure mensuelle imprimée parallèlement à la distribution virtuelle à travers le site est le garant de la poursuite de cette aventure. La rédaction est assurée de façon bénévole par un groupe de parents passionnés par la réflexion et l'écriture autour du vécu familial. Les frais d'impression du journal et la gestion du site (100 000 pages demandées par mois??)....30.- par an (20€).
En dehors du grand intérêt pour vous de cette matière exceptionnelle, que vous soyez jeune parent, chercheur dans une université ou simplement intéressé par l'évolution des comportements humains, votre soutien par l'intermédiaire d'un abonnement nous est indispensable. Pour les pays lointains et si vous ne désirez pas profiter de la version papier, un abonnement sous forme de pdf est accessible au même prix annuel de CHF 30. Il vous donne un accès complet aux archives
RETOURLe grand tourment ou « les gosses sous la loupe » Grand soleil sur la plage. Les jambes blanches s'étirent maladroitement hors des pantalons retroussés et des longues jupes; elles se hasardent sur le sable chaud et se laissent égratigner par les coquillages et les brindilles. Le public. Au loin, la mer qui se retire abandonne, à chaque vague, des baigneurs ruisselants qui se trémoussent et se poursuivent. Le décor. Toi, tu essaies de rassembler des gosses invisibles, de les garder une seule minute autour de toi, oh, une seule minute, le temps d'appeler Gérald, de chercher Jean-Pierre. Et la blancheur des jambes étalées et passives t'exaspère. Tu tournes le dos à la mansuétude des regards, à la pitié des sourires, à la sollicitude des visages. Tu tends un bras menaçant vers ce tas mouvant: « Jean-Pierre, Gérald, c'est fini? Il est l'heure de rentrer. Cessez donc de vous battre en public! » Ah! le public…, si tu pouvais lui tirer la langue. Sur un registre plus aigu: « Venez tout de suite, je pars! » Les neuf autres gosses disparaissent. Dans les magasins, derrière les cabanes plantées dans le sable, sur les rochers! Tu as l'impression d'arbitrer sur un ring. Mais le public te soutient: « Oh! les vilains petits garçons qui se battent, comme c'est laid! Vous n'avez pas honte, à votre âge? ». (Vous avez raison, à votre âge à vous, on s'insulte, on se jette des horreurs avec une élégance…). « Mademoiselle, donnez-leur une paire de gifles! (Ah ! bien sûr, vous, un virtuose de la gifle; pour sa culotte déchirée, pour son mauvais carnet, pour son air perdu lorsque vous lui crachez: « 7 fois 9»). Tu sépares enfin Gérald et Jean-Pierre. Un « M… » superbe et sonore claironne. Alors, sous les yeux apitoyés, exorbités, amusés ou narquois du public, tu prends Gérald et ton courage par la main, tu laisses Jean-Pierre s'éloigner en courant vers la mer. Tu te persuades qu'il n'ira pas loin (ce n'est pas la première fois), mais tu pries pour qu'il n'escalade pas les rochers, pour qu'il ne se jette pas sur la route nationale, pour qu'il rentre à la colonie ; tu cherches éperdûment, tu as mal aux yeux. Tu cries une dernière fois : « Jean-Pierre! ». Il faut se hâter. Tu redécouvres ton groupe, moins un, derrière la cabane et tu quittes la plage, avec un gros point d'interrogation sur l'estomac. « Eh! Jean-Pierre, tu m'prêtes ton couteau ?». Mais oui, c'est lui ; Jean-Pierre, à trois pas, assis sur une borne, te regarde. Il se lève, sort son couteau de sa poche et prend la tête du groupe. Tu ne lui dis rien, tu ne dois rien lui dire après tout; c'est tellement naturel qu'il t'attende là, car il n'ose pas traverser la nationale seul. Tu lui souris et ça suffit. |
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