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Les « Entretiens sur l'éducation » est un mensuel publié sans interruption depuis plus de 100 ans.
Le site www.entretiens.ch vous offre la possibilité de consulter en ligne ces extraordinaires archives parcourant/ponctuant au jour le jour l'histoire de l'éducation familiale d'un bout à l'autre du XXème siècle.
La survie de la brochure mensuelle imprimée parallèlement à la distribution virtuelle à travers le site est le garant de la poursuite de cette aventure. La rédaction est assurée de façon bénévole par un groupe de parents passionnés par la réflexion et l'écriture autour du vécu familial. Les frais d'impression du journal et la gestion du site (100 000 pages demandées par mois??)....30.- par an (20€).
En dehors du grand intérêt pour vous de cette matière exceptionnelle, que vous soyez jeune parent, chercheur dans une université ou simplement intéressé par l'évolution des comportements humains, votre soutien par l'intermédiaire d'un abonnement nous est indispensable.
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Le chat, instrument d'hygiène mentale

Les enfants ont grandi, peu à peu tout ce qui appartenait à l'enfance a disparu, l'appartement est devenu une demeure d'adultes avec un mobilier propre et bien ordonné: On est entré dans cette période de vie familiale à l'équilibre un peu branlant où les jeunes ont un pied dans la vie d'adulte et l'autre dans la fin de leur adolescence.
Entre parents et enfants, les dialogues sont courts, mesurés et les silences éloquents. Il y a tant de choses qu'on aimerait dire mais qu'on retient de crainte d'être mal compris de part et d'autre.

C'est alors, qu'est apparu Minet, un petit minou noir à la frimousse barbouillée de blanc, une petite boule de poils, toute chaude avec des yeux ronds et de longues moustaches amidonnées. Au début Minet, qu'on a arraché à la joyeuse et turbulente compagnie de ses frères et soeurs, est proche de la neurasthénie dans cette atmosphère sérieuse où les rires et la fraîcheur de l'enfance ont fait place aux problèmes sérieux de la vie. Minet a besoin d'amour, de caresses et de jeux, s'adaptera-t-il ? ou la famille s'adaptera-t-elle à lui?
Minet a choisi son coin au vestibule et c'est, appuyé contre une bûche de bois offerte à lui pour se faire les ongles, qu'il joue son petit rôle dans la famille. Le matin, dès que s'entr'ouvre la porte de la chambre des parents, il sait que c'est « son » moment. Il se lève, s'étire et marche très lentement en se retournant souvent du côté de la mère qu'attend une journée très remplie. Comment résister à la tentation de perdre quelques minutes avec cette petite boule caressante? Elle se penche, le prend dans ses bras, comme jadis ses enfants petits et en elle montent ces petits mots qui dans chaque coeur de femme cherchent l'occasion de se placer.
Elle se surprend à les murmurer à ce petit chat qui ronronne et son coeur se dégonfle de son trop plein d'amour maternel dont ses grands enfants n'ont que faire. Pour Minet aucun mot n'est ridicule, ni agaçant, il reste immobile un instant, puis, comme s'il avait fait son « plein d'amour », il s'échappe et commence sa journée de chat.

Jean-Luc a 20 ans, il est étudiant en physique et vient d'entrer à Belles-Lettres. Les études sont ardues et il aime la vie. C'est un dur, au coeur sensible et à l'idéal élevé. Les amourettes ne sont pas son fort, il croit à l'amour sain, solide et durable. Entre ses bras jeunes et vigoureux, Minet a trouvé sa place et les deux grandes mains le cachent presque tout entier. C'est si gentil un petit chat pour un grand garçon ! C'est si doux aussi pour ces grandes mains et pour ce coeur tout gonflé de vie, de caresses, cette toute petite chose confiante et ronronnante !

Les grands-parents sont venus passer quelques semaines chez leur fille. Leur sens moral est strict et leur vie tout entière consacrée aux autres.
« Un chat, - se sont-ils écriés à la nouvelle de l'arrivée de Minet - comment peut-on prendre un chat quand il y a tant à faire chez les humains! » Leur jugement a toujours été sévère à l'égard des propriétaires de petites bêtes : chiens, chats ou perruches, estimant que tout, matériellement, moralement et spirituellement, doit être mis au service de Dieu et du prochain.
Minet les accueille avec quelque réserve, se tenant prudemment sous une chaise, d'où il peut faire ses observations. Enfin il s'enhardit jusqu'à sauter et à s'endormir sur les genoux de grand-maman que les rhumatismes font souffrir encore davantage, par le fait qu'elle ne peut plus courir comme avant, que par des douleurs réelles. Minet a l'air si confortable et heureux que grand-maman s'en voudrait de le déranger en se levant. Après tout, ce petit chat, c'est une bien gentille compagnie !

Les repas sont le moment critique où les trois générations affrontent les discussions avec le coup d'oeil caractéristique à leur époque respective. Le père, qui aime les repas tranquilles, supporte avec peine ces échanges un peu tendus où un mot mal dit ou mal interprété en entraîne d'autres plus désagréables. Tout à coup Minet, s'approchant de son assiette, attrappe un petit morceau de viande qu'il lance à travers la cuisine, le rattrape, le cache et le retrouve avec force pirouettes. Il est si drôle que les trois générations éclatent d'un rire irrésistible qui brise en mille miettes la discussion et détend tout le monde.
Minet, que comprend-il aux confidences de chacun? De celles de Marie ulcérée par l'abandon d'un ami infidèle? De celles de grand-papa dont l'âge alourdit le courage ou de celles de maman dont les nerfs sont mis à fleur de peau par son triple rôle de fille, épouse et mère ?
Confident muet, toujours disponible, Minet écoute tout et réconforte chacun de sa petite langue rèche et rose. Il permet ainsi à chacun d'exprimer ce qu'il a en lui et de se libérer de son « trop plein ».
Dans nos vies de citadins pressés et énervés, le chat amène un élément de calme et de détente, il est sans le savoir, un merveilleux instrument d'hygiène mentale.









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