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Les « Entretiens sur l'éducation » est un mensuel publié sans interruption depuis plus de 100 ans.
Le site www.entretiens.ch vous offre la possibilité de consulter en ligne ces extraordinaires archives parcourant/ponctuant au jour le jour l'histoire de l'éducation familiale d'un bout à l'autre du XXème siècle.
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RETOURL'enfant malade Quand on se plaint de son fils de 16 ans qui travaille mal à l'école, refuse d'obéir à la maison et montre un caractère de hérisson, on reçoit comme réponse : "C'est l'âge pénible" ou "Il fallait l'élever quand il était plus jeune". Cette dernière suggestion me rend songeuse. A l'âge où il aurait fallu lui donner de bonnes habitudes et exiger un travail scolaire bon et régulier, qu'est-il arrivé à cet enfant? Il a été malade, de 11 à 14 ans, d'une primo-infection. Nous étions décidés à tout faire pour le soigner et le médecin a conseillé de courts et fréquents séjours à la montagne. L'école était suivie irrégulièrement mais les dispositions intellectuelles de l'enfant et là compréhension des maîtres lui permirent de passer d'une classe à l'autre sans doubler. Et notre garçon retrouvant force et entrain, nous espérions que le caractère et le travail iraient en s'améliorant. Là, les difficultés semblent insurmontables. Il vaut la peine d'en rechercher les causes. Tout d'abord l'enfant malade ou délicat a conscience d'être un centre d'intérêt pour la famille. Il joue un rôle important. Chacun est très gentil et s'ingénie à lui faire plaisir. Les amis apportent des livres, des puzzles et des chocolats. Il a toujours un partenaire pour jouer aux cartes ou au Monopoly, une lectrice bénévole, la possibilité d'écouter une émission distrayante à la radio, le temps de faire un mot croisé. On n'exige pas d'un enfant qui a de la fièvre de gros efforts scolaires. Pas de père courroucé quand le carnet est médiocre. Pour la forme, il insiste sur la nécessité de prendre le travail au sérieux, mais il se contente de peu. Certaines natures, dans ces conditions, se replient sur elles-mêmes, s'angoissent sur leur santé, et chaque détail prend une grande importance. L'enfant conserve l'impression qu'il demeure délicat et, parfaitement guéri, se considère comme encore malade. Il continue ainsi à jouir des avantages qu'il avait, sans se rendre compte du mal psychologique qu'il se fait et des conséquences redoutables pour son avenir que cette attitude négative lui procurera. Il faut débarrasser l'enfant de ces séquelles psychiques en lui donnant confiance dans ses forces, en élargissant son horizon, en lui faisant faire des sports dès que possible, en l'encourageant à s'intégrer à des mouvements de jeunesse, le scoutisme, l'Union chrétienne, etc. En un mot, le sortir de sa trop confortable ornière, le libérer de ses complexes. D'autres caractères supportent avec impatience la maladie qui dure, qui impose des soins et des restrictions. Ceux-là sauteront d'eux-mêmes sur toute occasion de s'affranchir des limitations imposées. Parfois on se trouve devant un choix difficile à faire : risquer un accroc physique ou exaspérer une ardeur trop réfrénée. L'avis du médecin est décisif, mais n'empêche pas les parents de trembler. On ne s'étonnera pas non plus de voir cet enfant, une fois guéri, faire mille folies comme pour rattrapper celles qu'il n'avait pas pu faire auparavant. Il me semble nécessaire de laisser, autant que possible, la bride sur le cou à ce poulain échappé. Mais que de tourments pour les parents, que de nuits blanches et de jours angoissés! Je pense à une erreur qu'il nous est aisé de commettre en pensant bien agir. C'est de tout sacrifier à l'enfant malade. On arrive alors à développer chez lui un égoïsme renforcé. Il prend l'habitude de considérer que tout lui est dû, sans jamais penser aux droits des autres. Une mère peut et doit se faire remplacer au chevet de son enfant et lui montrer qu'il est juste et bon qu'elle mène une vie normale. C'est nécessaire à l'équilibre de toute la famille. Un film, une visite à des amis, un concert sont des liens avec le monde extérieur qui enrichissent et distraient les parents. On doit aussi demander à l'enfant tous les services qu'il est capable de rendre. Il faut toujours se reporter au but que l'on veut atteindre : un enfant guéri et équilibré. Le problème est différent de ceux des enfants bien portants et peut durer des années. L'adolescence en est encore compliquée et il faut une patience et une compréhension très grandes et toujours renouvelées pour mener cette tâche à bien. |
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