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Les « Entretiens sur l'éducation » est un mensuel publié sans interruption depuis plus de 100 ans.
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RETOURLes échecs scolaires Elle n'est somme toute pas si loin de nous, l'époque où un mauvais carnet, un examen raté, représentaient aux yeux de la famille entière une sorte de déshonneur. Tel ou tel d'entre vous, parents d'aujourd'hui qui me lisez, n'aurait-il pas encore connu cette lourde atmosphère de réprobation, subi ces semonces, enduré ces punitions? Et pour quelques cancres installés avec décision, presque avec gloire, dans leur état, n'y a-t-il pas eu des foules de braves gosses obsédés, hantés par la peur de l'échec scolaire ? Cette hantise, parfois, se prolonge dans l'inconscient jusqu'à l'âge adulte : ne vous est-il jamais arrivé de rêver que vous aviez à passer un examen, quoique ce ne soit depuis longtemps plus de votre âge ? Garder le sens des proportions. En présence des problèmes scolaires de nos enfants, il est très particulièrement nécessaire de garder un sens exact des proportions. On peut certes estimer que la lutte pour la vie commence sur les bancs de l'école, et que pour réussir plus tard dans l'existence, il convient de se placer convenablement dans cette espèce de compétition qui se double d'une course d'obstacles. Ne minimisons pas l'importance d'une bonne scolarité. Mais ne nous l'exagérons pas non plus. Et surtout, ne voyons pas toute la question à travers l'ambition que nous avons pour nos enfants. Il devrait être maintenant tout à fait révolu le temps où chaque père espérait voir son fils devenir polytechnicien ! Avant de décider quelles sont les mesures à prendre, les parents devraient tenter, seuls ou avec l'aide des différents spécialistes qui sont à leur disposition, de diagnostiquer les causes de l'échec, que celui-ci soit déjà survenu ou qu'il soit seulement prévisible. Les avertissements, les réprimandes, sont des solutions de facilité qui ne mènent pas loin et ne sauraient apporter à l'enfant une aide efficace. Or c'est d'une telle aide qu'il a besoin. Les mauvaises notes ne sont jamais qu'un symptôme. Elles trahissent une insuffisance ou une inadaptation que, dans bon nombre de cas, l'écolier est totalement incapable de corriger par lui-même, et dont souvent d'ailleurs il n'a qu'une conscience assez vague. Je vous propose d'examiner ensemble les diverses situations qui peuvent se présenter. Le cas de Pierre. L'un des plus complexes, des plus difficiles en apparence, car Pierre a toutes les peines du monde à s'intéresser à quelque chose. Ce n'est pas seulement en classe que le maître éprouve de la peine à éveiller et à fixer son attention. Il se mêle sans plaisir aux jeux qu'on lui propose, s'en lasse vite, ne sait comment occuper ses congés. Physiquement, c'est un enfant assez maigre, mal musclé, vite fatigué. Il se peut qu'il dorme parfois mal et soit sujet à la paresse intestinale. Paresseux, il l'est d'ailleurs dans tous les domaines. Essayer de stimuler Pierre par des paroles d'encouragement ou, au contraire, par la sévérité, c'est perdre son temps. Il souffre en effet d'asthénie et doit être pris en main par un médecin. Ce dernier ordonnera un traitement, réglera une hygiène à la fois curative et rééducative. Pierre aura longtemps besoin d'être ménagé et il ne faudra pas exiger de lui plus qu'il n'est réellement à même de donner. … de Georges. Camarade de Pierre, et son voisin fidèle dans les derniers rangs de la classe, voici Georges. Celui-ci est un costaud et, à première vue, rien dans sa santé ne devrait l'empêcher de fournir régulièrement l'effort demandé. Nous pouvons toutefois remarquer que c'est un enfant renfermé, se liant peu, se confiant moins encore. Il est lui aussi très souvent distrait en classe. Mais le maître a vite remarqué qu'il ne s'agissait point là de vagues rêveries d'écolier. Il sent que Georges est en proie à de véritables préoccupations. Discrètement, il fait sa petite enquête, interroge la mère de son élève. Celle-ci avoue que son ménage marche mal. Georges souffre de la tension qui règne au foyer. Il souffre d'une vive anxiété, de conflits psychiques aggravés - frustration, inhibition - par le fait que les ordres contradictoires de ses parents maintiennent en lui un vague, mais permanent sentiment de culpabilité. Dans un cas comme celui-ci, c'est évidemment tout le problème familial qui doit être étudié et si possible résolu pour que Georges puisse retrouver sa paix et consacrer toute son énergie à son travail scolaire. … et d'André. André provient d'un milieu relativement aisé. Il est fils unique et sa mère concentre sur lui toute son attention, tout son amour. Le père voyage pour ses affaires, mais durant ses brefs séjours au foyer n'a pas de plus grand plaisir que de gâter sa femme et son fils. Aussi passe-t-on à André beaucoup trop de choses. Aucune discipline sérieuse ne lui est imposée. Il veille trop tard et arrive à l'école fatigué. Son travail n'est pas surveillé à domicile. Il en résulte chez lui une tendance à fuir l'effort qui se répercute fâcheusement sur la qualité de ses études. Ces trois cas sont fréquents, mais il y en a évidemment nombre d'autres. En les examinant, nous devons toujours nous demander si l'inadaptation est d'ordre personnel ou si elle tient au milieu familial (en face d'André, nous pourrions imaginer Paul, fils de famille nombreuse, sans cesse sollicité de rendre service, ne disposant pas de la tranquillité nécessaire pour faire ses devoirs, etc.), ou encore, au milieu scolaire. Le rôle du milieu scolaire. Il est évident que les programmes scolaires ne peuvent être conçus que pour une espèce d'« enfant standard ». Et malgré la peine que se donnent les maîtres pour en faciliter l'adaptation aux cas individuels, il est inévitable que celle-ci ne réussisse pas toujours pleinement. Il faudrait pouvoir utiliser pour chacun une méthode d'éducation particulière, suggérer à chacun sa propre méthode de travail personnel; or, dans une classe, on ne peut que de manière très limitée réaliser cette diversité. Certains enfants sont orientés vers un genre d'études qui ne leur convient pas, ou ne se sentent pas en rapports harmonieux avec leurs camarades, ou encore ne trouvent pas un contact positif avec leur maître. Un changement est alors souhaitable. Et il y a des enfants qui se montrent réfractaires au moule scolaire sans être vraiment des inadaptés : ce sont parfois de fortes personnalités en germe, qui feront plus tard très bien leur chemin et rattraperont le temps perdu. L'aspect scolaire, si important soit-il, n'est jamais qu'un des aspects de la vie de l'enfant, et si nous voulons résoudre les problèmes qu'il peut poser, c'est toute cette vie, toute cette petite personnalité, qu'il faut prendre en considération. |
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