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Un jour à la fois
Surpris par une tempête, en traversant le massif des Andes, Guillaumet est contraint d'atterrir
son avion capote dans la neige. Il se met alors en route à travers les solitudes hostiles. Pendant cinq jours et quatre nuits, il marche sans trêve, par 40° de froid. Il marche seul, sans vivres, escaladant, sans piolet, sans corde, des cols de 4500 mètres. Pas de repos possible! Ce serait la mort certaine. « Dans la neige, on perd tout instinct de conservation. Après deux, trois, quatre jours de marche, on ne souhaite plus que le sommeil. Je le souhaitais. Mais je me disais: Ma femme, si elle croit que je vis, croit que je marche. Les camarades croient que je marche. Ils ont confiance en moi. Et je suis un lâche si je ne marche pas. » Et chaque fois qu'il était sur le point de s'abandonner, n'en pouvant plus, il repartait quand même. Il ne s'arrêtait hâtivement que pour reposer son coeur défaillant et pour élargir, avec son canif, l'échancrure de ses chaussures qui ne contenaient plus ses pieds gonflés par le gel. Il perd finalement la mémoire, oubliant, dans ses courtes haltes, d'indispensables objets : un gant, sa montre, son canif, sa boussole. Arrivé enfin au but, alors qu'on le croyait mort, il confiera à son ami: « Ce que j'ai fait, je te jure, jamais aucune bête ne l'aurait fait », et lui dira: « Ce qui sauve, c'est de faire un pas. Encore un pas. C'est toujours le même pas que l'on recommence
»
Nous relisions récemment ce récit - si saisissant qu'on en reçoit toujours une impulsion nouvelle - de l'exploit fabuleux de Guillaumet, raconté dans Terre des hommes par son ami Antoine de Saint-Exupéry.
Sur le chemin de l'épreuve, ce qui sauve, c'est de marcher un jour
encore un jour
sans aller plus loin, sans voir plus loin, sans empiéter sur le lendemain. Car « à Dieu sont nos lendemains! » Ils sont son secret, son affaire
Précieuse assurance qui doit nous suffire ! Puisque l'avenir appartient à Dieu, pourquoi peupler cet inconnu de nos craintes? Pourquoi nous occuper de ce qui est à Lui ? Seul nous est donné le jour présent et à ce jour suffit sa peine. Il m'est donc demandé de vivre seulement cet « aujourd'hui » et pour en porter la peine - à l'exclusion de celle de demain - de concentrer sur cet « aujourd'hui » toute ma pensée, mon courage et ma foi !
« Combien de temps aurai-je à souffrir? » demandait un malade à son médecin. « Seulement un jour à la fois », lui fut-il répondu. Oui, ce qui sauve, c'est de marcher un jour
encore un jour
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