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Lu pour vous
Nous tenons aujourd'hui la promesse faite dans notre numéro d'octobre 1966 de vous présenter en détail le livre d'André Diligent :« La télévision, progrès ou décadence ? », dans la collection « La nouvelle encyclopédie », éd. Hachette (prix en Fr. fr. : 3,80).
En 125 pages, ce petit ouvrage, à la fois clair et substantiel, direct et nuancé, apporte beaucoup.
Il offre notamment :
- des informations :
« Aucune digue ne pourra retenir cette marée qui monte : la télévision.
Aux Etats-Unis en 1948 on comptait 102.000 récepteurs, en Grande-Bretagne, 15.000. En 1963, les Etats-Unis avaient dépassé les 60 millions et la Grande-Bretagne les 12 millions. Dans le premier de ces pays, plus de 90% des foyers était pourvu de récepteurs, dans le deuxième plus de 80%.
La situation la plus spectaculaire est peut-être celle du Japon : en 1953, pas un seul poste n'était fabriqué dans ce pays. En 1961 on en dénombrait 6.642.800, et ce chiffre était doublé dans le courant de l'année 1963.
Dans le monde entier la fièvre monte. Chaque nation souhaite l'invasion. Il y avait sur la terre, en 1964, plus de 3000 émetteurs et relais, plus de 150 millions de récepteurs.
L'ensemble des représentations de la Comédie-Française en 1963 a réuni un publie inférieur à 500.000 personnes alors que le nombre de postes de télévision à l'époque atteignait presque 4 millions. Le cinéma réunit en un an dans l'ensemble des salles françaises environ quatre fois moins de spectateurs que doit en avoir un seul spectacle télévisé. »
- d'heureuse définitions :
« L'avantage essentiel de la télévision est, en effet, de pouvoir donner sur-le-champ, l'image animée d'un objet lointain, difficile à approcher ou à examiner. Grâce à elle, l'oeil se déplace, se multiplie, et la vision s'améliore. »
- des anecdotes :
« Eugène Mannoni se trouvait en reportage dans un pèlerinage. A côté de lui, perdue dans la foule immense des pèlerins, une femme sautillait, tendant le cou pour voir ce qui se passait. Puis se tournant vers son mari elle eut ce mot :« C'est dommage que l'on soit ici, si on était resté à la maison on l'aurait vu à la télé. Ce doit être vraiment formidable ».
- des faits à méditer :
« J'ai fait vendre 40,000 Proust en une semaine. » Roger Stephane (après un « portrait-souvenir » sur Marcel Proust).
- des éléments de réflexion :
« Tout nouveau moyen de communication entre les humains provoque dès son invention un long procès.
La T.V. rendra-t-elle l'homme plus ou moins instruit ?
Déjà il y a plus de deux millénaires, Socrate dans le Phèdre de Platon condamnait en ces termes la découverte de l'écriture :
« Car cette connaissance aura pour résultat, chez ceux qui l'auront acquise, de rendre leurs âmes oublieuses parce qu'ils cesseront d'exercer leur mémoire : mettant en effet leur confiance dans l'écrit, c'est du dehors, grâce à des empreintes étrangères, non du dedans et grâce à eux-mêmes, qu'ils se remémoreront les choses. (
) Ils sembleront être bons à juger de mille choses au lieu que, la plupart du temps, ils sont dénués de tout jugement. Ils seront en outre insupportables, parce qu'ils seront des semblants d'hommes instruits au lieu d'être des hommes instruits. »
Mais plusieurs siècles avant Socrate un proverbe chinois lui avait par avance donné la réponse :« Une image vaut dix mille mots ».
Le téléspectateur ne sait pas que filmer c'est choisir des images, que choisir c'est interpréter, et, par conséquent, c'est déjà trahir. Par le cadrage, par le montage, par l'accomplissement musical, par le commentaire, on peut fournir du même fait, même en étant de bonne foi, deux vérités opposées. Filmez une grève, une manifestation violente : selon l'endroit où sera placée la camera il pourra en sortir un film montrant les malheureux défenseurs de l'ordre attaqués par des bandes séditieuses ou, au contraire, de sauvages policiers brutalisant d'honnêtes citoyens sans armes.
Prêtez une camera à M. J.-P. Sartre ou à M. François Mauriac, apprenez-leur à s'en servir, envoyez-les à Cuba, à Berlin ou en Chine : avec la meilleure honnêteté du monde, ils en ramèneront deux films très différents. Le téléspectateur se sera cru le témoin de l'histoire, il n'en aura vu qu'une version. »
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