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Un homme de bonne volonté

Parce qu'il avait médit de la « téhessef », refusé au cinéma la qualité d'art, parce qu'il voulait voir avec le coeur, juger avec bienveillance, parce qu'il croyait à l'individu, parce qu'il ne voulait pas qu'on abîme les hommes, et parce qu'il entendait fonder les relations humaines sur la sympathie, Georges Duhamel est peut-être mort désespéré dans un monde en proie à l'étatisme, au refus de ce qu'il nommait « la grâce », à l'abandon de son âme, dans un monde veulement soumis aux terrorismes de la culture de masse et des puissances mécaniques. Il est mort après avoir perdu l'audience d'une humanité qui se rue vers la servitude, qui se réfugie dans l'anonymat des dictatures, qui refuse de penser, de lutter et de souffrir. Il est mort démodé dans sa foi romantique en l'accomplissement individuel, dans sa tentative de sauvegarde des valeurs pacifiques, libérales et sentimentales. Celui qui écrivait : « Je ne prends pas mon parti d'être Salavin pour l'éternité » s'éloigne-t-il donc, à jamais frustré dans sa quête humaniste ?
C'est possible, si les hommes continuent de perdre leur âme et renoncent à cette singularité qui fait de chacun d'entre eux le plus irremplaçable des êtres, s'ils acceptent l'uniforme culturel et politique que l'on brode un peu partout dans les Elysées, les Kremlins et les Maisons-Blanches. C'est possible, si la société se laisse absorber par les plaisirs mécaniques, derrière cette « muraille de solitude » que dénonça, voici déjà vingt ans, l'écrivain-médecin soucieux d'un bonheur rayonnant. Mais ce n'est nullement certain si, un jour, lassée de tout, même de l'espérance en une Jérusalem terrestre, l'humanité donne un grand coup de pied dans la termitière. Alors, peut-être, on relira Georges Duhamel.
Tout étonnés devant tant de simplicité, les lecteurs découvriront un romancier de la « révolte », celui du cycle des « Salavin », un écrivain qui avait senti - et dit - que la place publique n'est pas aussi vaste, après tout, que le coeur et l'esprit, un homme qui, dans le cycle des « Pasquier », avait illustré par les mythes romanesques la grandeur et les misères des accomplissements individuels, et qui, à mi-chemin de l'angélisme et des diableries, avait tenté de promouvoir une éthique fondée sur les plaisirs du coeur, de l'intelligence, du savoir et des valeurs artistiques.
Certes, l'esthétique littéraire de Duhamel est dépassée, mais tel est le sort de toute oeuvre humaine. On ne racontera plus l'ascension d'une famille comme il l'a fait. On raillera peut-être ce goût de l'émotion par le style sentimental, qui faisait le charme et les limites du talent de l'écrivain. Mais le « retour à Duhamel » aura d'autres propos. Il sera retour à un certain respect de l'homme, il sera retrouvaille des êtres et des choses qui nous entourent, l'autre dans ses différences, l'animal dans sa mystérieuse proximité, l'herbe dans sa naturelle beauté, l'enfant dans ses plaisirs et ses jeux. Il sera revalorisation d'une conscience de vivre, charnellement et en esprit. Il sera redécouverte d'une acceptation de soi, banale et vieille comme Montaigne et les stoïciens.
Que Duhamel ait ignoré l'inconscient et ses pouvoirs, qu'il ait mal vu la naissance et le développement de la loi athée du marxisme, qu'il ait été réactionnaire face à l'épidémie collectiviste, tout cela fera seulement dater son oeuvre, mais pas plus que telle page de Descartes ignorant la circulation sanguine. Lorsque le monde sera las de sa dureté, de ses découvertes et de son culte des objets, peut-être alors consentira-t-il à rendre son attention à l'écrivain qui chanta le loisir studieux, la paix des champs et l'ivresse de la beauté. Ce sont des choses simples et douces, c'est une morale modeste, mais je suis persuadé que, la lune conquise, la Chine ayant mondialisé le port du treillis et du bourgeron, et les collections de porte-clefs ayant vécu, les hommes y reviendront avec délices.
Une telle provende humaniste suffit-elle à faire de Georges Duhamel un très grand écrivain? C'est selon. Ou bien nous cherchons dans une oeuvre l'édification d'un style ou telle architecture qui se suffit à elle-même, et dans ce cas l'auteur de « Civilisation », de «Vie et aventures de Salavin » et de la « Chronique des Pasquier » n'occupe qu'une modeste place dans l'histoire de nos lettres. Ou bien
nous attendons des livres, comme il le disait, une part de « la substance de notre âme », et alors Duhamel n'aura pas écrit en vain. Il aura été un homme bon, un homme de coeur, « à la conquête des vraies richesses » qui ne sont ni l'uranium ni le dollar… Et disons, ce qui n'est pas un mince hommage, que Georges Duhamel fut un homme de bonne volonté.









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