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Les « Entretiens sur l'éducation » est un mensuel publié sans interruption depuis plus de 100 ans.
Le site www.entretiens.ch vous offre la possibilité de consulter en ligne ces extraordinaires archives parcourant/ponctuant au jour le jour l'histoire de l'éducation familiale d'un bout à l'autre du XXème siècle.
La survie de la brochure mensuelle imprimée parallèlement à la distribution virtuelle à travers le site est le garant de la poursuite de cette aventure. La rédaction est assurée de façon bénévole par un groupe de parents passionnés par la réflexion et l'écriture autour du vécu familial. Les frais d'impression du journal et la gestion du site (100 000 pages demandées par mois??)....30.- par an (20€).
En dehors du grand intérêt pour vous de cette matière exceptionnelle, que vous soyez jeune parent, chercheur dans une université ou simplement intéressé par l'évolution des comportements humains, votre soutien par l'intermédiaire d'un abonnement nous est indispensable. Pour les pays lointains et si vous ne désirez pas profiter de la version papier, un abonnement sous forme de pdf est accessible au même prix annuel de CHF 30. Il vous donne un accès complet aux archives
RETOUR« Je me rappelle : nous allions sur une route, au mois de mai, poursuivant le soleil couchant. C'était en 1918, à la fin de mon congé de convalescence. Blanche poussait la petite voiture où dormait Bernard, alors âgé d'un an. Nous étions heureux, comme on peut l'être à notre époque : furtivement, follement, entre les angoisses de la veille et la séparation du lendemain. Un bonheur replié, sourd, absurde et qui serrait le coeur. Un de ces bonheur qu'on protège à deux mains, quelques instants, contre les coups du vent comme la flamme d'une allumette par une nuit d'orage. Mais que dire de plus ? Nous étions heureux, pour une heure, envers et contre tout. Le Cuib avait vécu sa journée avec une passion endiablée, et, le soir venu, vêtu d'un chaud manteau blanc, il dormait, dans sa voiture, de l'air le plus innocent du monde. Dormir, après une rude journée de plaisir et de fatigue, dormir, allongé sur de doux coussins, dans une voiture qui vous berce, dormir le nez en l'air, en respirant l'air parfumé d'une belle campagne, à l'heure du soleil couchant, au mois de mai ; être veillé, protégé durant ce sommeil, par deux géants familiers et très puissants… Hélas, pensez-vous, voilà qui doit être délicieux, mais qui ne nous arrivera jamais ! Et c'est pourtant ce qui arrivait à Bernard ce soir-là. Je n'affirmerai pas qu'il n'en avait nul sentiment. Son visage si uni, si neuf, exprimait une confiance sans borne, une parfaite béatitude. De temps en temps ses paupières frémissaient et cela semblait dire :« Je ne dors pas si profondément que je ne me rende pas compte de mon bonheur ». Nous étions heureux, je vous l'ai dit ; et je songeais : « Il éprouve, en ce moment, une félicité sans mélange et dont, pourtant, il ne gardera pas le souvenir. Ce bonheur-là, qui ne naît que pour mourir, ce bonheur qui n'aura pas d'histoire, sera-ce donc du bonheur totalement perdu pour l'avenir ? » Blanche, moi, nous, les témoins, les comparses, nous disparaîtrons un jour, emportant notre secret. Toi, petit homme, tu n'auras peut-être jamais souci de ce paradis antérieur où ton âme a connu l'extase. Tant pis ! A tout hasard, je consigne mon témoignage et comme le navigateur en détresse qui lance une bouteille à la mer, je confie mon petit papier au houleux océan des jours. Il n'est qu'un travail pour les hommes : arracher quelque chose, si peu que ce soit, à la destruction et à l'oubli. » « On me demande : - Que leur apprenez-vous ? Eh ! rien, ou presque, pour l'instant. Que leur donner ? Ils prennent de tout, et à pleines mains. En revanche, ils m'apprennent chaque jour mille choses nouvelles. Ils m'apprennent souvent ce que je croyais savoir. » |
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