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Janvier 1940 Quelle attitude adopter en temps de guerre?
Une question difficile se pose en ce moment à nous, parents, au sujet de nos enfants. Devons-nous les tenir le plus possible à l'écart des conflits et de tout ce qu'ils déclanchent en nous d'incertitude, de trouble et d'angoisse ? Ou bien est-il juste et nécessaire de les faire participer à ce qui ébranle et menace notre monde actuel ?
Il est évident que la réponse dépend tout d'abord de l'âge des enfants. Auprès des petits, c'est le calme et la paix qui devraient toujours régner, afin que leur fragile système nerveux soit à l'abri des chocs néfastes, des tensions usantes… Avec les plus grands, la question se pose tout autrement, car ils ne peuvent pas vivre hors du temps et des circonstances que nous traversons. L'école, les camarades, la radio, les journaux, les tiennent au courant de tout ce qui nous préoccupe, et souvent nous bouleverse, même en pays neutre, et nous ne pouvons pas les en préserver. Vont-ils devenir de petits adultes avant l'âge, soucieux, accablés, pessimistes ?
Détrompons-nous !
J'ai assisté chez les miens, cet automne, à une étonnante… et rassurante réaction, qui est certainement très générale.
Ils ont fait le geste de l'oiseau qui secoue ses plumes afin de se débarrasser des gouttes d'eau importunes ; ils ont tout simplement élevé une barricade entre les soucis, les angoisses du temps présent, et eux-mêmes ; leur réaction inconsciente et spontanée a été de demeurer jeunes, insouciants et joyeux.
Ce n'est pas qu'ils ignorent les souffrances d'autrui et refusent d'y sympathiser ;ils prennent même une part active dans les services d'entraide qui les sollicitent ; mais ils obéissent à un obscur instinct de préservation qui les pousse à rejeter un fardeau trop lourd encore pour leurs jeunes épaules, afin de garder leurs forces intactes pour le jour où ils seront des hommes et des femmes responsables.
J'avoue que cette attitude détachée m'a d'abord surprise et quelque peu scandalisée, - et puis j'ai compris que c'était une grande grâce de Dieu pour ces jeunes que nous aimons, et non seulement pour eux, mais pour ce malheureux monde, qui aura en effet tant besoin de forces vives, fraîches, alertes et confiantes pour repartir d'un nouveau pas sur une route nouvelle.
Alors que ferons-nous devant cette attitude ? Nous nous en réjouirons sincèrement, malgré nos coeurs soucieux ; mais, fermes au gouvernail, nous saurons cependant intervenir ici et là auprès de cette jeunesse qui veut vivre et chanter quand même, pour lui rappeler d'un mot, d'un signe, les dures réalités de notre époque et l'amener à mêler des accents de plus en plus virils et graves à ses chants juvéniles.
Ainsi nous préparerons demain avec eux, mais sans oublier aussi de les remercier de nous aider à vivre aujourd'hui par leur ferme et joyeuse confiance dans un avenir meilleur.
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