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Comment former des hommes normaux ?

Qu'est-ce qu'un homme normal?

L'homme normal est celui qui a une apparence saine, dont toutes les fonctions (physiques et psychiques) s'accomplissent dans une sensation de bien-être, qui est heureux de vivre, et qui surmonte d'une façon satisfaisante les difficultés de la vie, les épreuves et les souffrances, les déceptions. Il conserve son équilibre en face des circonstances nouvelles, sait s'adapter à un but nouveau, sait surmonter des obstacles nouveaux ; mais, d'autre part, il sait renoncer à ce qui n'est pas accessible. Il vit dans le présent, en fonction de ce présent et de l'avenir. Le passé n'est pas une chaîne pour lui ; il ne le considère que comme un trésor d'expériences dont il peut tirer profit ; non pas comme un refuge, non pas comme un but de rêveries inutiles ou de regrets stériles. Il conquiert la vie pour son plaisir, mais tient compte des autres et de leurs besoins ; son égoïsme normal est limité par un altruisme spontané. Il remplit le rôle que notre destinée nous assigne à l'égard du conjoint, des enfants, de la société ; il sait aimer et être aimé. Il travaille avec bonheur, se repose en bonne conscience, mange et dort selon ses besoins. Il prévoit et est responsable, gagne la vie des siens et les protège. Dans la société, il est rival sans mauvaise conscience, mais sans agressivité déplacée ; mais il est aussi collaborateur ; il ne se soustrait pas à cette réalité essentielle qu'il fait partie d'un groupe humain, ou - en élargissant le cercle - de l'humanité ; il se sent solidaire. Il est capable de perfectionnement ; il désire se perfectionner et accroître son empire sur lui-même, sur les choses et sur les gens.

Influence déterminente

A quel moment de l'évolution de l'enfant notre attitude, à nous adultes, est-elle particulièrement déterminante ? Elle l'est au maximum dans les premières années de la vie, dans la première surtout. Nous sommes loin du temps où l'on pensait que l'action éducative ne jouait que depuis le moment où notre enfant nous comprenait. Grave erreur, provenant du fait que nous surestimons la valeur de la parole dans les relations humaines. Répétons une fois de plus que c'est ce que nous sommes qui agit sur l'enfant dès sa naissance, non pas ce que nous disons ; et que notre attitude inconsciente est plus importante encore que notre attitude consciente.
Pour former un homme normal, il nous faut laisser à l'enfant nouveau-né la mère dont il a besoin ; dont il a besoin psychologiquement parce qu'elle fait encore partie de lui comme lui fait partie d'elle : ils sont un seul et même être, indistincts l'un de l'autre pendant les six premiers mois au moins. Ce n'est pas du tout simplement parce que l'enfant, dans sa dépendance totale, a besoin des soins maternels ; c'est parce que lui et elle sont une véritable unité à deux faces, dont l'une des parties en tout cas - l'enfant - ne peut vivre en santé que si l'autre est présente. Unité non seulement physique, mais affective et psychique. Le sein maternel n'est pas la chose essentielle dans l'affaire, mais bien l'amour de la mère, présence affective, ce don total d'elle à son petit qui se trahit dans chacun de ses gestes. C'est de cette sécurité affective que dépend en bonne partie la santé psychique et physique du nouveau-né, puis de l'enfant. Et cet enfant, une fois devenu adulte, sera encore empreint de cette sécurité, ou en sera dépourvu.
Une confirmation de l'importance pour l'enfant - donc pour l'adulte qu'il deviendra - d'avoir le contact affectif avec sa mère, de se setir sûr de son amour, nous est donnée par les belles études du Dr R. Spitz, de New York, sur des enfants de 6 à 18 mois. Ce psychiatre a eu l'occasion d'observer un très grand nombre d'enfants, par tous les moyens qui, aux Etats-Unis, sont mis à la disposition des équipes de travail (y compris le cinéma, bien entendu). Il a pu comparer en particulier les enfants d'une pouponnière attachée à une prison pour femmes, enfants qui avaient leur mère journellement à disposition, et ceux d'une maison d'enfants trouvés, qui n'avaient jamais de mère et dont chacun se partageait une nurse avec 7 à 11 petits camarades. Eh bien, malgré la nette supériorité des soins physiques, malgré des conditions matérielles et d'hygiène idéales dans la maison des enfants trouvés, les enfants de cette maison jouissaient d'une santé psychique et physique beaucoup moins bonne que leurs camarades de la pouponnière. Si bien qu'il ne s'est produit aucun décès en cinq ans dans la pouponnière (qui abrite plus de 200 enfants), tandis que, sur les 91 enfants de la maison pour enfants trouvés, 34 moururent en deux ans. Devant cette différence bouleversante, qui n'est pas due simplement à des facteurs héréditaires, on est bien obligé de conclure que les conséquences de la privation de la mère sont plus graves qu'on ne l'avait supposé jusqu'ici, et l'on doit se demander si un certain nombre de maladies apparemment corporelles de la petite enfance et de l'enfance ne sont pas dues en bonne partie à une carence affective. Pour nous la preuve est faite, et tous ceux qui ont eu la chance d'entendre le Dr Spitz ont été convaincus de la justesse de ses conclusions. Voici les troubles divers constatés chez les enfants qui ont souffert de cette carence affective : troubles de la nutrition parfois fort graves allant jusqu'au coma et à la mort, troubles cutanés (eczéma infantile); désordres de la motricité, hypermobilité (balancement sur les coudes et les genoux); jeux fécaux persistants et exagérés ; attitudes paranoïdes ; attitudes catatoniques ; quotient intellectuel abaissé (dans les cas graves jusqu'au stade de l'idiotie); retard dans le développement de la sociabilité. Vous voyez que les troubles nerveux et psychiques peuvent être importants et qu'ils constituent un très mauvais départ pour l'évolution affective et mentale du sujet ; quand la relation d'amour subit un échec aussi précoce que cela, on comprend que toute la vie et toute la personne en soient marquées. Ces terribles régressions et ces dépérissements impressionnants ne sont guérissables que lorsqu'on rend assez tôt à l'enfant la mère qu'il avait perdue ; nous avons assisté, grâce aux films du Dr Spitz, à de véritables résurrections. Malheureusement ces faits sont encore beaucoup trop peu connus, même des médecins d'enfants.


Remarques

1. La brochure dont nous avons extrait ces deux passages a été publiée en 1955. Depuis cette époque, beaucoup de parents, de nurses et de pédiatres ont été informés des travaux du Dr Spitz et en tiennent compte dans leur activité. Cependant, nous voyons encore un si grand nombre d'adultes les ignorer ou les sous-estimer que nous avons jugé nécessaire d'en rappeler l'importance capitale.

2. Quand on parle de la mère qui est absolument indispensable à la vie du petit enfant, on pense tout naturellement à celle qui l'a mis au monde. Or, il faut préciser que c'est plus exactement « d'amour maternel durable » dont il a besoin. Cet amour peut aussi être prodigué par une mère adoptive, une grand-mère, une éducatrice spécialisée. Ce qui importe, ce n'est pas le titre officiel de celle qui prend l'enfant en charge, c'est la qualité et la continuité de son amour.

M. L.









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