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(Sans titre)
Il est bien souvent difficile d'éveiller la conscience du petit pêcheur.
A l'asile, Théodore avait dérobé un morceau de gâteau à une petite fille et l'avait mangé. Une punition eût été évidemment la juste rétribution du délit. Mais il fallait que Théodore réparât lui-même le mal commis. En le questionnant, j'appris qu'il aimait beaucoup les gâteaux, mais qu'il n'en avait jamais qu'un morceau, le dimanche. Je lui fis comprendre qu'il ne devrait pas manger son morceau de gâteau, le dimanche suivant, afin de l'apporter lundi à la petite Anna. «Tant que tu ne feras pas cela, Anna ne sera pas consolée, et je ne pourrai pas me réconcilier avec toi.» Il s'en alla, l'oreille basse, et m'évita plusieurs jours de suite. Le samedi je lui rappelai ce qu'il avait à faire, mais le lundi, pas de gâteau.... Trois semaines plus tard, comme je racontais une histoire de la bible, j'en vins à parler de la mauvaise conscience; je lui demandai ce que c'était. Alors Théodore, tout rouge, mais à haute voix:
«C'est quand on sait qu'on a fait quelque chose de mal.
- Sais-tu cela toi ?
- J'ai pris le gâteau d'Anna.
- Comment peut-on retrouver une bonne conscience?
- En apportant du gâteau à Anna.»
J'approuvai de la tête, mais je m'abstins de tout autre avertissement. Le lundi matin suivant, comme il passait devant moi, portant avec précaution un paquet sous le bras, il me regarda tout fier. En entrant cinq minutes plus tard, dans la classe, j'aperçus Théodore et Anna qui se tenaient tendrement par le cou... et mangeaient ensemble le gâteau. Le regard qu'ils me jetèrent tous deux exprimait la plus complète félicité.
Le petit avait fait son expérience et ces remords, ce tourment qu'il s'était créé par sa faute avait eu sur lui une heureuse influence.
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