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Un lien entre la famille et l'école : le carnet de notes

Stéphanie sort de l'école en courant. A la porte, elle a aperçu sa mère. Celle-ci lui demande, l'air anxieux : « Alors, comment s'est passée la journée ? » - « Oh ! très bien. » - « Mais, as-tu su ta leçon de grammaire ? As-tu été sage ? As-tu réussi les divisions à deux chiffres ? » Stéphanie ne répond pas. Sa mère est déçue. Elle voudrait des détails. Et visiblement, Stéphanie ne veut parler ni de la classe, ni de la maîtresse, ni des camarades. Pas plus qu'un homme qui sort de son bureau n'a aussitôt envie de parler de ses affaires, de ses collègues, ou de ses problèmes. Stéphanie est comme beaucoup d'écoliers : pour elle, l'école est son domaine réservé, bien séparé de la famille ; un monde où elle veut vivre sa vie d'écolière, libre et indépendante. On lui a d'ailleurs assez souvent répété : « Tu es assez grande maintenant pour aller à l'école. » Cette promotion n'aurait pas de sens si elle ne conférait pas à l'enfant une certaine indépendance.

D'ailleurs, lorsqu'un enfant est capable de séparer la famille de l'école, c'est la preuve qu'il s'est bien adapté, qu'il est sorti des jupes de sa mère, qu'il est à l'aise avec la maîtresse et avec ses camarades. Respectez donc cette discrétion de l'enfant. Si vous voulez savoir où il en est de son travail, regardez ses cahiers, son carnet de notes, allez voir la maîtresse, faites réciter les leçons, mais montrez bien à votre enfant que la maison ne prolonge pas l'école, que l'une n'empiète pas sur le terrain de l'autre. Mais pourtant, dans ces deux mondes qu'il veut séparer, l'enfant reste un, il est toujours le même personnage. S'il a chez lui un problème, il le transporte à l'école. Et inversement, l'enfant qui est sans cesse grondé par la maîtresse est nerveux chez lui.

C'est pourquoi les parents ne peuvent vraiment comprendre leur enfant s'ils ne savent comment il réagit à l'école, et les maîtres ne peuvent vraiment comprendre un enfant s'ils ne savent pas, dans les grandes lignes, quelle est la vie de famille, qui sont ses parents, quelle est l'atmosphère affective, intellectuelle qui entoure leur élève.

La lecture du carnet de notes

Sophie, une gentille petite fille de 8 ans, nous disait : « Je n'aime pas rentrer à la maison le samedi, c'est le jour du carnet. »

Et Sophie, qui travaillait pourtant bien, vivait dans la hantise de ce samedi fatal, car elle savait que, si elle n'avait pas le maximum, le drame éclaterait, quelle que fût la note d'ailleurs.

Le carnet est très important, bien sûr. Il est le lien entre la famille et l'école ; d'ailleurs, dans beaucoup d'établissements, il s'appelle encore le carnet de correspondance. Mais il faut savoir le lire de la manière la plus juste pour l'enfant.
Avant tout, il faut considérer la note ; elle seule rend vraiment compte du travail ; le rang ne situe ce travail que par rapport à celui des camarades. Or, c'est le contraire qu'on fait en général. Car il ne s'agit pas de demander à l'enfant d'être le meilleur de sa classe, mais de donner le meilleur de lui-même.

Ensuite, il faut voir par cette note si l'enfant a donné son maximum.

C'est cette notion d'effort et de progrès, suivant les possibilités de l'enfant, qu'il faudra avoir en vue à la lecture du carnet de notes. Ce n'est pas toujours le cas. Voici l'histoire de François :

François, 9 ans, a de mauvaises notes ; elles oscillent entre 1 et 2 sur 6, et il est en général 28e ou 30e (sur 32). Mais il fait de gros efforts, car il a vraiment de la peine à suivre la classe. Un jour, il rapporte triomphalement son carnet à son père : il a 6 sur 6, il est 10e. Le père ne regarde pas le carnet, et dit en continuant à lire son journal (pour les pères, le journal est souvent le paravent de l'indifférence) : « Tu me le rapporteras lorsque tu seras premier ». Depuis ce jour François n'a plus fait d'effort, il est retombé dans son malheureux rang de 30e, et dans ses mauvaises notes.

Puisqu'on a pris l'habitude de classer les élèves (habitude que certains jugent stimulante, d'autres décourageante), il faudrait, pour rétablir les choses, instituer un classement de l'effort ; cela permettrait à un élève qui a vu passer, par exemple, sa moyenne de 4 à 6, d'être premier au classement des progrès.
Ensuite, en lisant ce fameux carnet, il faut oublier son propre passé. C'est classique : le père qui a été un cancre voudrait que son enfant soit brillant`; celui qui a réussi, voudrait que son fils l'égale.

Un professeur de nos amis, agrégé, n'ayant eu que des déboires avec ses quatre aînés, disait de la petite dernière qui « promettait » : « Toi, tu es ma consolation, tu seras ma petite agrégée ». Et un autre père, descendant d'une brillante lignée de polytechniciens, disait de son fils, comme on parle d'un déshonneur :« Il sera le seul non-polytechnicien de la famille ! »

Il faut aussi faire taire son impatience de voir l'enfant réussir dès le départ. Certains enfants, même très intelligents, démarrent lentement.

L'orgueil et l'impatience rendent souvent les parents injustes en lisant le carnet.

Quels sont les stimulants en face des mauvaises notes? Pas les comparaisons du genre :« A ton âge, ton frère faisait les divisions à décimales » ou « Regarde ta cousine Anne, comme elle réussit ses analyses » ; pas la moquerie, ni l'humiliation, le « Oh ! c'est un cancre, il n'arrivera jamais à rien », dit devant l'enfant, bien sûr ; pas plus le « Si tu m'aimais, tu travaillerais mieux. »

Le seul stimulant pour l'enfant, c'est de savoir que, malgré ses résultats médiocres, on lui fait toujours confiance. L'enfant le moins doué multipliera ses efforts s'il se sent encouragé, et toujours aimé.

Et puis, ne jugez pas l'intelligence aux notes obtenues : « Mais non, Claire n'est pas intelligente », disait une mère de sa fille, « elle a toujours zéro en calcul. » On peut accumuler les zéros en calcul en 3e et avoir la révélation des maths en 10e. Mais surtout avec l'école actuelle, avec son rythme rapide où les lents sont perdus, avec cette primauté exclusive donnée à l'intellectuel, certains enfants sont incapables de fournir leur maximum.

Et, pour les jours où vous seriez déçus par de mauvais carnets, je vous dirai l'histoire vraie d'un de mes jeunes amis de 14 ans, que j'appellerai Bernard :

Un jour, j'entrai dans sa chambre, et je vis, collée au mur, toute une série de photos représentant Churchill, Picasso, Einstein, Faulkner, Emile Zola, Jean Rostand, Dali, Chostakovitch.

Idoles ? Modèles ? Bernard pouvait difficilement avoir envie d'être peintre, savant, musicien, poète, écrivain… Je lui posai la question.

« Non, ce sont mes illustres prédécesseurs. Ils n'aimaient pas l'école, mais ils ont tous réussi. » Renseignements pris, Churchill était un cancre notoire. Il n'arrivait à décrocher de prix qu'en escrime et en récitation de poèmes guerriers ; Dali fut expulsé de son collège ; Zola eut un zéro en littérature au lycée Saint-Louis ; Cézanne fut refusé à l'école des beaux-arts parce que son dessin était « trop faible » ; Einstein était noté comme « attardé mental » ; Chostakovitch dut interrompre ses études parce qu'il était nul en maths ; Jean Rostand avoue :« Je n'étais pas un bon écolier, j'ai fait mes études avec dégoût » ; et Goethe raconte dans ses souvenirs: « L'orthographe, la ponctuation m'ennuyaient, je trouvais ridicules les règles de grammaire. »









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