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Les « Entretiens sur l'éducation » est un mensuel publié sans interruption depuis plus de 100 ans.
Le site www.entretiens.ch vous offre la possibilité de consulter en ligne ces extraordinaires archives parcourant/ponctuant au jour le jour l'histoire de l'éducation familiale d'un bout à l'autre du XXème siècle.
La survie de la brochure mensuelle imprimée parallèlement à la distribution virtuelle à travers le site est le garant de la poursuite de cette aventure. La rédaction est assurée de façon bénévole par un groupe de parents passionnés par la réflexion et l'écriture autour du vécu familial. Les frais d'impression du journal et la gestion du site (100 000 pages demandées par mois??)....30.- par an (20€).
En dehors du grand intérêt pour vous de cette matière exceptionnelle, que vous soyez jeune parent, chercheur dans une université ou simplement intéressé par l'évolution des comportements humains, votre soutien par l'intermédiaire d'un abonnement nous est indispensable.
Pour les pays lointains et si vous ne désirez pas profiter de la version papier, un abonnement sous forme de pdf est accessible au même prix annuel de CHF 30. Il vous donne un accès complet aux archives
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Laissez-le être un enfant

L'écolier est aussi un enfant

Pour certains parents, dès l'instant où l'enfant est entré à l'école, il n'est plus pour eux qu'un écolier. Toute sa vie est organisée en fonction de l'école; il ne peut jouer, se distraire que s'il a bien travaillé; il n'est aimé, apprécié que s'il a de bonnes notes; s'il est malade, on voit dans la maladie un retard pris sur les programmes, bien plus qu'un accroc de santé; les camarades choisis par l'enfant ne sont acceptés que dans la mesure où ils seront de bons exemples par leur travail; les sorties du jeudi ou du dimanche sont choisies en fonction des progrès qu'elles pourront faire faire à l'enfant en histoire, en géographie, ou en sciences naturelles; à un dessin animé qui pourrait amuser l'enfant on préférera un documentaire sur les mers du Sud; le choix des livres, bien entendu, est fonction du même souci; quand il sera grand, on l'enverra pour ses vacances faire des séjours en Allemagne ou en Angleterre; les jeux eux-mêmes n'échappent pas à ces calculs intéressés - et souvent faux, vous verrez plus loin pourquoi; aux soldats et poupées on préfère les lotos de l'histoire, les puzzles de géographie ou les maquettes qui instruisent en distrayant.
Ce raisonnement sordide a quelquefois des conséquences inattendues : ou l'enfant docilement fait tout ce qu'on lui propose et devient un adulte en miniature qui ignore les joies de l'enfance, ou il ne s'intéresse plus à rien parce qu'on a voulu l'intéresser à tout, ou encore, par une saine hygiène, il s'évade, il rêve, il vit en imagination, seul domaine où les adultes ne peuvent pénétrer, et il est très difficile de le ramener sur terre pour lui faire faire une addition.

Réserves pour l'avenir

Le «tu dois travailler, pense à ton avenir» n'a guère de sens pour lui. On peut l'employer, mais sans en abuser. L'avenir, pour un enfant qui, au moins jusqu'à 7 ans, ne distingue pas la semaine du mois ou de l'année, cela ne veut rien dire.
Nous ne voulons pas vous pousser à traiter votre enfant comme un bébé; ce serait l'empêcher de grandir; ni vous conseiller de lui laisser faire tout ce qu'il veut. Mais attirer votre attention sur un point important : votre enfant passe six heures à l'école; en rentrant, il a encore des leçons à apprendre; il doit dormir assez. Au milieu de ce programme chargé, il a besoin d'avoir des moments de liberté totale, pour mener une vraie vie d'enfant qu'il est encore, à 3 ans comme à 9; une vie de rêveries, de monologues, de chansons, de jeux, une vie où il puisse donner libre cours à sa sensibilité, son imagination, son goût de l'observation.
Et il faut qu'il puisse jouer à ces jeux qui lui plaisent, sans intervention constante, sans interruption incessante : «Tais-toi» s'il chante, «ne fais pas de désordre» s'il a étalé ses soldats par terre, «ne salis pas tout» s'il barbouille avec ses pinceaux. C'est à vous de l'installer dans un coin où il ait la liberté de faire sa peinture ou ses jeux, tranquillement.
(Et, s'il aime dessiner ou peindre, donnez-lui le matériel nécessaire, mais surtout pas de modèle, image à copier ou à colorier par exemple. Peindre et dessiner ne feront plaisir à l'enfant, et ne seront pour lui une occasion de se détendre que s'il peut le faire librement. Et vous verrez vous-même qu'il ne sera pas à court d'idées).
En laissant l'enfant vivre dans son petit monde, en ne voulant pas trop vite le pousser dans le nôtre, nous lui faisons faire sa réserve de sensations, d'images, d'impressions, «réserve dans laquelle s'alimentera sans fin sa vie personnelle». On ne peut devenir vraiment adulte si on a sauté l'étape enfance, si on ne l'a pas vécue pleinement, «les joies de l'enfance font le courage des hommes».
Plus, ces jeux de l'enfance peuvent déterminer une vocation. Savez-vous comment est venue à Goethe l'idée d'écrire son Faust ? La grand-mère de Goethe donna à ses petits-enfants des marionnettes :« Il faut que les petits enfants aient un théâtre et des marionnettes, disait-elle. C'était ainsi dans ma jeunesse, et j'ai souvent payé cher pour voir le docteur Faust et la danse des nègres». Enfants, Goethe et sa soeur jouaient la vieille légende du docteur Faust. Un chef-d'oeuvre en naquit.
Et Jean Rostand raconte que sa passion des sciences naturelles est née dans les jardins de Cambo où, enfant, il observait les bêtes.

Rôle de l'imagination.

Un avenir si lointain ne vous intéresse pas pour le moment ? Vous voulez que nous vous parlions de l'école? Eh bien, cette imagination qui irrite certains parents, car elle fait vivre l'enfant dans un rêve alors qu'il devrait s'occuper de choses sérieuses, elle sera souvent très utile à l'école. Pas seulement pour faire une rédaction, mais pour comprendre la donnée d'un problème, ou pour en trouver la solution.
Les manuels parlent souvent de personnages ou d'objets inconnus des enfants : « Avec sa chaîne, l'arpenteur mesure un champ de 100 mètres de long sur 30 de large. Combien lui faudra-t-il de kilogrammes de graines pour semer du blé s'il faut 1 kg. de graines par mètre carré ? ».
Avec un peu d'imagination, l'enfant le verra mieux, cet arpenteur, mesurer son champ, et l'imagination aussi l'aidera à découvrir qu'il faut faire une multiplication pour trouver le nombre de kilogrammes de graines nécessaires pour ensemencer le champ.
Et si, au jardin, votre enfant passe des heures à regarder les fourmis transporter leurs provisions, il ne perd pas son temps : l'esprit d'observation est au centre de l'enseignement.
« Tu en as de la chance d'être un enfant !» Combien de parents ne le disent-ils pas à leurs enfants (avec un profond soupir).
Mais alors il faut leur laisser cette chance complète.

Méfiez-vous des théories séduisantes

Pourquoi est-il urgent de rappeler que l'enfant a droit à son enfance ? Parce qu'il est pris entre les deux pinces d'une tenaille qui se rapprochent dangereusement et qui risquent de l'étouffer : le commerce, et la course au génie.
Dans un premier temps, on s'efforce de convaincre les parents que les enfants peuvent faire tout, plus tôt et plus vite :

manger du boeuf à 2 mois
bondir joyeusement à 4 mois
lire à 18 mois
taper à la machine à 3 ans des poèmes de leur invention
identifier les planètes au même âge
ou jouer aux échecs à 5 ans.

Et les auteurs de ces découvertes, pour persuader les parents sceptiques, affirment que leurs théories sont fondées sur les travaux de «pédiatres éminents», de Jean Piaget ou de Gesell.
On pourrait croire que les auteurs de ces théories nouvelles ont partie liée avec les commerçants. Car, bien sûr, il s'agit avant tout de vendre : des livres, du matériel éducatif, etc.
Mais le vrai scandale, la vraie menace pour l'enfant, c'est de dire aux parents : « Vous pouvez faire de votre enfant un génie en vous y prenant plus tôt, plus vite ». Car tous les parents sont ambitieux et pressés. S'ils sont séduits par ces théories dites nouvelles, quand leurs enfants auront-ils le temps de jouer ?
Ainsi l'enfant pressé, forcé, poussé, voit-il peu à peu son domaine rétrécir.
On a dit de ce siècle qu'il était celui de l'enfant. C'est vrai : après Dewey, Freud, Piaget, Gesell, Wallon, l'enfant est mieux connu, mieux expliqué, mieux compris. Mais certainement, ni mieux aimé, ni plus heureux.
L'enfant d'aujourd'hui n'est plus fessé (cela est contraire à la pédagogie moderne), mais cela lui ferait certainement moins de mal que d'être forcé.









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