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Les « Entretiens sur l'éducation » est un mensuel publié sans interruption depuis plus de 100 ans.
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La survie de la brochure mensuelle imprimée parallèlement à la distribution virtuelle à travers le site est le garant de la poursuite de cette aventure. La rédaction est assurée de façon bénévole par un groupe de parents passionnés par la réflexion et l'écriture autour du vécu familial. Les frais d'impression du journal et la gestion du site (100 000 pages demandées par mois??)....30.- par an (20€).
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Enfants russes, enfants américains

Je ne suis pas certaine que ce livre (1) m'aurait attirée si je l'avais eu sous les yeux avant d'aller moi-même en Union soviétique. Je suis presque sûre (et j'en ai un peu honte rétrospectivement) que je me serais dit: «Les enfants russes, j'imagine sans peine comment ils sont: menés à la baguette, sans égard pour leur sensibilité individuelle, toujours noyés dans des collectivités.»
Mais il y a eu ces deux semaines à Moscou, où j'ai pu observer des classes qui déambulaient dans les rues, des groupes qui arpentaient les salles du musée Pouchkine, les centaines d'élèves de l'école N° 32. Ce qui m'a obligée à remettre en question l'image que je m'étais préfabriquée.
Je pensais voir des enfants obéissants, figés, anesthésiés. Et chaque fois que j'en ai vus de tout près, ce qui m'a le plus frappée, c'est leur naturel et leur aisance. Entre eux tout d'abord. Entre eux et leurs «maîtres» également. J'écris maître entre guillemets. Car, à vrai dire, les enseignants que j'ai vus m'ont fait davantage penser à des animateurs, tels qu'on les conçoit de plus en plus aujourd'hui, qu'à des pions chargés de transmettre le savoir, de faire régner l'ordre et la discipline.

Et pourtant l'ordre et la discipline règnent, c'est incontestable!

Comment les éducateurs parviennent-ils à ce résultat sans férule et sans menaces, sans système rigide de coercition? C'est sur ce point essentiel que l'ouvrage d'Urie Broufenbrenner donne des renseignements qui peuvent intéresser quiconque se pose actuellement des questions sur l'enfance, le rôle de l'école, la préparation à la vie d'adulte.
Urie Broufenbrenner est Américain, marié et père de deux enfants. Parti d'une «enquête de civilisation comparée sur l'éducation des enfants», il a été amené à réunir une foule d'observations, d'interviews et d'expériences au cours de sept séjours en Union soviétique. En plus de l'intérêt que représente une étude de ce genre faite par un citoyen du monde capitaliste, je vois encore une autre raison de prêter attention aux remarques qu'il présente: le fait que ce technicien de la psychologie et de la sociologie ne se soit pas contenté de baser ses réflexions uniquement sur les tests, enquêtes et expériences «scientifiques». Il a tenu compte aussi des observations et des expériences vécues par chacun des membres de la famille en prise directe avec la vie quotidienne.
La première moitié de son ouvrage est consacrée aux différentes étapes de l'éducation en Union soviétique. La seconde s'intitule: «L'éducation américaine, hier, aujourd'hui, demain.» Comme l'Europe occidentale est atteinte généralement dix ans plus tard par les mouvements qui secouent les Etats-Unis, nous pouvons nous préparer à affronter d'ici quelques années les problèmes d'éducation aigus qui ébranlent les Américains depuis quelque temps. Or, cette étude comparée de deux conceptions diamétralement différentes de l'approche de l'enfance et de la jeunesse donne un relief particulièrement frappant aux bienfaits comme aux inconvénients des deux systèmes.
D'un côté: individualisme, compartimentage, dispersion. Les enfants américains (et les nôtres de plus en plus) ont souvent une vie morcelée, coupée en tranches successives ou parallèles. Ils ont peu de contact avec leurs parents. Leurs parents ont peu de relations avec l'école. Les copains et la télévision ont plus d'influence sur eux que les adultes. Ne se sentant vraiment intégrés nulle part, ils ne savent pas très bien où ils vont. Ce qui leur donne ces sentiments si répandus d'inutilité, d'indifférence ou de révolte.
De l'autre côté: cohérence, continuité, progression naturelle. Car, de la naissance à la vieillesse, le but poursuivi est toujours le même: le service à la communauté. Cela commence à la maison, et cela continue à la crèche, au jardin d'enfants, à l'école, à l'usine, dans le travail agricole, à l'université. Tout est mis en oeuvre pour renforcer à chaque étape de l'existence les sentiments de responsabilité, de solidarité et de loyauté à l'égard du collectif.

Bien que Broufenbrenner ne cache pas sa sympathie à l'égard des méthodes pratiquées en Union soviétique pour favoriser et renforcer dès les premières années de la vie le sentiment d'appartenance au «collectif», il n'envisage nullement de les voir adoptées en bloc par l'Occident. Car il en voit et en signale lui-même les dangers. Mais il suggère que nous les examinions avec un minimum d'objectivité et de sens des réalités. Et que nous soyons assez libres dans notre jugement pour nous inspirer des aspects positifs de ce programme d'ensemble.
Les parents et les éducateurs qui s'interrogent douloureusement sur le comportement des adolescents de chez nous (dont beaucoup se réfugient dans la passivité ou la «révolte pour la révolte») liront certainement avec intérêt les propositions concrètes que Broufenbrenner élabore à la fin de son livre. Car ce qu'il souhaite, ce n'est pas une imitation aveugle et béate des méthodes soviétiques, mais un sentiment plus clair d'appartenance à la communauté et du rôle que chacun de nous peut y jouer, qu'il soit enfant, adolescent ou adulte.

(1) Urie Broufenbrenner: «Enfants russes, enfants américains». Aux éditions Fleurus, collection Education et Société.









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