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Les « Entretiens sur l'éducation » est un mensuel publié sans interruption depuis plus de 100 ans.
Le site www.entretiens.ch vous offre la possibilité de consulter en ligne ces extraordinaires archives parcourant/ponctuant au jour le jour l'histoire de l'éducation familiale d'un bout à l'autre du XXème siècle.
La survie de la brochure mensuelle imprimée parallèlement à la distribution virtuelle à travers le site est le garant de la poursuite de cette aventure. La rédaction est assurée de façon bénévole par un groupe de parents passionnés par la réflexion et l'écriture autour du vécu familial. Les frais d'impression du journal et la gestion du site (100 000 pages demandées par mois??)....30.- par an (20€).
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Une loi suggestive

II.

«Ce que l'homme a semé, il le moissonnera».

Dans un précédent article nous avons considéré cette loi au point de vue de nos enfants; n'aurait-elle aucune application à nous-mêmes, les parents ? A quoi comparerait-on mieux l'éducation qu'à une semaille faite en vue d'une moisson ? Nous sommes des semeurs. Ce travail variera selon la nature de la moisson à laquelle nous aspirons: Serez-vous satisfaits si vos enfants, nourris et instruits par vous pendant leurs jeunes années, s'avancent ensuite dans la vie et la traversent comme ils pourront, perdus dans le grand troupeau des hommes; ou aspirez-vous à ce qu'ils s'élèvent au-dessus de la médiocrité et brillent dans le monde, mais en bornant vos aspirations à un éclat terrestre et à des vues mondaines; ou bien votre idéal est-il que, vainqueurs des puissances mauvaises, ils deviennent pour leurs semblables des sources de force, des aides, des guides et mènent une existence utile et bienfaisante; regardez-vous plus haut et votre voeu le plus ardent est-il que gagnés à Dieu ils soient ouvriers avec Lui et qu'll puisse se servir d'eux comme d'instruments de justice et de lumière dans le monde? Tout autant de notions diverses de la moisson à récolter d'où dépendront le choix de vos semences et la façon dont vous sèmerez.

Souvent on rend les enfants responsables du résultat des semailles; ils ont, dit-on, bien ou mal profité de leur éducation, ils ont répondu aux espérances qu'on avait d'eux ou ils les ont déçues. Cela est juste dans une mesure. La moisson dépend du terrain. Mais elle dépend en premier lieu du semeur qui a choisi la semence, et qui l'a répandue au gré de sa volonté.

Nous sommes des semeurs! oh, noble fonction! auguste travail ! oh ! responsabilité aussi. Ce travail nous savons ce qu'il nous coûte, nous l'accomplissons au travers du labeur de l'âme, des craintes et des angoisses, des espérances et des joies, tâtonnant
pour trouver notre route, pliant parfois sous le fardeau de notre faiblesse et de nos erreurs, éprouvant l'ardent besoin du secours.

Nous semons par nos paroles et par nos enseignements, nous semons par nos actes, par toute notre attitude à l'égard de nos enfants, nous semons moins par ce que nous disons et faisons que par ce que nous sommes, nous semons par notre conduite vis à vis d'eux et par notre conduite en dehors d'eux; auditeurs de nos conseils, il sont spectateurs de nos vies, ils en observent l'inspiration et l'orientation; ils comparent celle-ci avec les directions que nous leur donnons pour eux-mêmes et ils concluent: notre vie est un constant ensemencement.

Que semons-nous? De la bonne graine, direz-vous. En êtes-vous sûrs ? Hélas ! Certains parents ne sèment-ils pas plutôt de l'ivraie? Ne serait-ce pas de l'ivraie que le flottement d'une conscience incertaine sur tel point de la vie morale, véracité dans les relations sociales, moralité, probité commerciale; ne serait-ce pas de l'ivraie qu'un langage non discipliné par la charité; ne serait-ce pas de l'ivraie qu'une conduite en désaccord avec les principes professés ? Semblables à la semence de la parabole, ces exemples germent soit que l'on dorme, soit que l'on veille, et soudain la moisson peut s'en dresser terrifiante ou douloureuse devant nous. Dans son roman «La Barrière» René Bazin nous présente un jeune homme qui à la face de ses parents leur avoue qu'il a perdu la foi, ceux-ci se récrient. Ne l'ont-ils pas envoyé au catéchisme, ne l'ont-ils pas soumis aux enseignements de l'Eglise, ne l'ont-ils pas confié à des directeurs religieux ?

« - Ce n'est pas cela que je vous reproche, répond le jeune homme, j'ai été chrétiennement préparé au baccalauréat, je le reconnais, j'ai eu plus d'instruction religieuse, plus d'exhortations à la piété, plus d'exemples de foi parmi mes maîtres que beaucoup d'hommes de ma génération; cela aurait suffi, cela suffit pour faire un croyant solide mais à une condition: c'est que la famille soit en harmonie avec l'enseignement qu'elle fait donner. - Eh bien, et la nôtre? - Moi, j'ai vu en rentrant à la maison, trop d'exemples qui ne concordaient pas avec la leçon de l'école, et j'ai douté. - Tu as vu de braves gens Félicien. - J'ai vu que vous faisiez passer beaucoup de choses avant la religion. - Lesquelles? dis, lesquelles ? - L'énumération serait longue, si je voulais: l'innombrable amusement, le repos, les honneurs, l'avenir, le vôtre et le mien peut-être. J'ai vu que vous ne souteniez pas plusieurs des idées que j'avais appris d'abord à vénérer, et des hommes qu'on m'avait cités comme modèles, et que vous laissiez parler chez vous, librement, contre des préceptes formels..... J'ai été comme un abandonné parmi tous vos soins superflus ! Je n'ai pas souvent rencontré à votre table et dans vos salons des vertus qui eussent influé sur moi Enfin je n'ai pas compris à vous voir vivre que la religion fût la loi à laquelle on doit tout soumettre.....»

La scène est poignante et la page mérite d'être lue. Passons. Il y a en revanche, grâce à Dieu, nombre de bonnes et salutaires semences que des parents fidèles, judicieux et aimants déposent dans le coeur de leurs enfants et celles-ci préparent de douces moissons. Il est touchant au sein de la Croix-Bleue d'entendre fréquemment des buveurs relevés évoquer avec gratitude le souvenir de leur mère; que de serviteurs de Dieu qui font remonter à leurs parents l'origine de leur foi et de leur vocation! Quelle sauvegarde en face du vice n'a pas été pour beaucoup de jeunes gens le visage de leur père surgissant dans leur souvenir, et quelle reconnaissance ne repose pas au fond du coeur d'hommes et de femmes sans nombre envers ceux qui les ont vraiment élevés. Oh! tressaillement de joie ! larmes d'émotion, chants de louange, heureux les parents à qui il est donné de constater déjà dans ce monde ou qui découvriront dans l'au-delà qu'après avoir semé avec larmes, ils peuvent saluer la moisson avec des chants de triomphe et d'humble reconnaissance.

Encore une remarque: si nous moissonnons ce que nous avons semé, nous ne moissonnerons pas ce que nous n'aurons pas semé. Il est tel père qui pense pouvoir abandonner à la mère l'éducation des enfants durant leur enfance, comptant bien retrouver sur le jeune homme son influence et son autorité: il oublie qu'une relation, comme une chaîne, se compose d'une série d'anneaux, et qu'on ne crée pas à volonté entre les âmes un contact qui n'a pas été préparé. Dans un article saisissant de la Revue du Christianisme Social l'auteur nous décrit le réveil moral douloureux d'un père qui, absorbé par ses affaires, se voit soudain appelé au chevet de son fils qui vient de se tirer un coup de révolver: veillant en face du cadavre du jeune homme durant une longue nuit, il cherche à se rendre compte des motifs
qui lui ont inspiré cet acte effrayant: ce ne sont, il a des raisons pour le croire, ni le jeu ni la débauche qui en sont cause; qu'est-ce donc ? Le père cherche en vain, mais il se rend compte qu'il ne peut pas découvrir, parce qu'il ne connaît pas son fils. Il l'a élevé, il a pourvu à ses études, il lui prépare une fortune, mais il a vécu à côté de lui sans que leurs âmes fussent jamais en contact, il ignore ce qui s'agitait dans le coeur du jeune homme, ses aspirations, ses doutes, ses désespoirs peut-être; et maintenant il se trouve devant l'irréparable et il ne peut comprendre: il est trop tard. - Ce récit me semble s'enfoncer comme une épée dans le coeur des parents; si nous découvrions un jour que nous n'avons pas été ce que nous aurions dû être, et que par notre faute, par celle de nos erreurs ou de notre indifférence, notre enfant a manqué le but, peut-être a sombré! Quelle moisson!

Ne restons pas toutefois sous cette impression; nous avons besoin d'être encouragés; il est bon que nous comprenions notre responsabilité; la pensée de notre rôle en tant que semeurs est grave sans doute, mais elle est aussi lumineuse. Celui qui sème pour l'Esprit, dit Saint-Paul, moissonnera de l'Esprit la vie éternelle.









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