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L'adolescent entre deux mondes
Désarroi
La révolte contre les parents, le rejet des idéaux éthiques et sociaux des adultes, plongent l'adolescent dans un état de désarroi et parfois de détresse intenses.
Entre un monde qui disparaît et un monde qui n'est pas encore, il est là, qui ne sait plus ni qui il est, ni où il en est. Il se sent différent et de celui qu'il a été et de ceux qui l'entourent, dont l'incompréhension, réelle ou imaginaire, l'ulcère et le pousse en face d'eux à se replier sur lui-même.
Mais la solitude est bien trop lourde pour le jeune mal assuré, désaccordé, qui n'a pas encore conquis son autonomie, laquelle implique et l'estime de soi et le sentiment de sa propre identité.
L'amitié est un premier recours contre ce désarroi et cette solitude; la vie de groupe en est un autre, qui viendra faire utilement contrepoids et corriger ce que l'amitié à cet âge peut avoir de trop exclusif et de trop passionné.
La vie en groupe
La plupart des adolescents la recherchent et on les voit s'agglomérer avec une facilité déconcertante. Eux qui se veulent et se croient originaux, qui tentent de s'affirmer et de s'imposer à leur entourage par la singularité, l'excentricité même, s'accommodent non seulement de l'imitation - on s'efforce de ressembler en tout aux êtres que l'on admire -, mais encore et surtout d'un extrême conformisme. Ce paradoxe s'explique par le besoin d'identification et la recherche d'identité. Rejetant les modèles anciens, l'adolescent doit s'en trouver de nouveaux avant de pouvoir, ou plutôt pour pouvoir être enfin lui-même. Il ressemble à un acteur qui essaie une série de rôles successifs avant de trouver enfin celui qui lui convient.
Ses premiers pas dans la voie de l'émancipation sont mal assurés; en dépit de ses attitudes arrogantes, provocantes et frondeuses, il est incapable encore d'assumer son personnage, faute de savoir très bien lui-même qui est ce personnage, faute surtout d'avoir pris confiance dans ses possibilités. En s'identifiant à ses semblables, en répudiant le «Je» pour se fondre dans le «Nous», il peut alors sans trop d'angoisse assumer une personnalité de groupe opposée aux modèles des parents et des adultes en général.
Le conformisme: une étape
Cette emprise du «Nous» et le sentiment de force qui en résulte se sont accrus dans des proportions jamais vues jusqu'ici grâce aux moyens de communication et de contact fournis par la technique moderne; le «Nous» s'étend désormais à toute la collectivité adolescente. Au bénéfice susceptible d'être retiré de la participation effective à un groupe restreint (contact, chaleur, sécurité, etc.) s'ajoute donc le profit qui découle de l'adhésion à un idéal collectif plus large - mode de vie, prise de position politique, culte d'idoles, etc. - choisi et créé par les jeunes (du moins le croient-ils), qui insère l'adolescent et l'adolescente dans une communauté plus vaste et leur procure pour un temps cette identité sociale qui leur faisait défaut.
Mais il est important de souligner que si le conformisme adolescent est grandement facilité par les mass media, ceux-ci ne l'expliquent pas: l'adolescent a besoin de se sentir identique aux autres (différent des adultes mais semblable à ses pairs) pour se décharger de son angoisse, pour se rassurer et reprendre confiance en lui-même, pour se situer; alors que la volonté d'originalité marque la prise de distance par rapport au passé et aux parents, le conformisme s'explique par la recherche d'une identité qui ne peut s'acquérir, encore une fois, qu'au travers de nouvelles identifications.
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