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Ordre, désordre, lits pas faits… (1)

Ah! l'ordre… ce cher vieux problème…

Bien sûr que liberté sexuelle, crise de l'autorité, drogue et tutti quanti semblent être plus à l'ordre du jour. Plus «in», quoi. Mais ce cher vieux problème, si traditionnel, si émouvant par le fait même.., il nous touchera éternellement.
Comme le rocher de Sisyphe, il est une peine sans fin, et comme l'Hydre à cent têtes il est impossible à abattre (un peu de lyrisme fait du bien). Pas la peine, donc, d'essayer de le résoudre, ni même d'en parler.
Je vous scandalise? Tant pis.
Je vais d'ailleurs me contredire.

C'est qu'il avait chez nous, ce problème, une dimension véritablement métaphysique.
Je m'explique: ce n'est rien si des enfants grognent quand il faut ranger ou si on se préoccupe de ce qu'il faut exiger d'eux ou non dans ce domaine, ou de ce que vont penser les gens qui voient notre maison, ou de l'adaptation plus tard des enfants à la vie, etc., etc. Mais: et s'ils ne peuvent véritablement pas supporter qu'on touche à leurs affaires, ni qu'on exige quoi que ce soit à cet égard? Si c'est une impossibilité «ontologique»? Si vous sentez que c'est porter atteinte à leur être même…? Ne riez pas. Ce n'est pas drôle. Ne haussez pas non plus les épaules. Ce n'est pas une exagération, hélas. Ça existe, des gosses comme ça. Et si vous voyiez leurs réactions quand vous essayez de les amener à la raison (une raison qui est d'ailleurs uniquement la vôtre), vous sauriez que le jargon philosophique n'a pour une fois rien d'abstrait: le désespoir affolé, l'angoisse comme une lame de fond, la révolte puissante, irrésistible, le mur de granit qui se dresse, les réactions qui peuvent être celles de ces enfants-là lorsqu'on touche à leur monde, à leur être, sont bouleversantes. On ne peut que se rendre et accepter.

Reste le côté «hygiène», bien sûr.
On se dit: «Bon sang, et toute cette saleté, et si des bêtes se mettaient à y pousser, et si des friandises cachées y pourrissaient» et un jour on voit une drôle de larve dans le pli d'un tissu qui signifiait l'océan - un océan qui est immobile depuis les dernières vacances d'hiver et où un bateau invraisemblable, fait avec tous les vieux restes de la création, transporte glorieusement depuis des mois des personnages mythiques intouchables qui jouent avec toute sorte d'instruments de musique inventés pour aller chercher un trésor fabuleux qui se trouve au loin, sous l'armoire, dans la grotte du Pirate Négatif -Oeil-de-Corbeau…

Ne pas y toucher… Et cette larve, là…
On l'enlève, bien sûr (la larve, pas l'océan). On met peut-être unspray «anti-bêtes», on aère le plus souvent possible et… on tâche de ne plus trop y penser, en songeant que l'enfant sera probablement un jour un adulte tout à fait différent -et plein de personnalité.
Pour tenir jusque-là - car il le faut bien - j'ai expérimenté avec succès une solution qui est à ajuster selon votre tempérament: créer dans la pièce un point fixe discret (accepté par l'intéressé) qui vous comble personnellement.
Par exemple, si vous êtes du genre « Putzfrau» (et si vous avez la chance qu'il n'y ait pas des autocollants sur toute la vitre), vous pourriez entretenir merveilleusement la fenêtre et ne regarder qu'elle en entrant, pour jouir profondément de ce spectacle cristallin. Ou bien astiquer le petit bout de parquet qui reste libre de telle manière qu'il luise tel un soleil éblouissant et neuf, comme à la création du monde.
Si vous avez des doigts de fée, vous pourriez broder ou crocheter un beau coussin à mettre sur l'entassement du divan - ça sert toujours, et pour soi, et pour les copains. Et quel plaisir pour vous de voir cette harmonie de couleurs, cette richesse de travail. Cela vous attirera immanquablement. Bref, inventer un point qui vous hypnotise.

Ma solution à moi a été de créer en permanence un bouquet tout petit mais extraordinaire (à mes yeux, s'entend). Parfois ma fille le voyait, parfois elle ne le voyait pas. Mais cela n'avait aucune importance. Il était tantôt de style japonais, tantôt romantique, tantôt baroque, tantôt classique, tantôt humble, tantôt précieux, tantôt complètement fou-fou. Bref, vous sentez que je le composais avec une joie et une attention infinies, ne calculant ni la peine ni le temps. Ce fut toujours le plus beau bouquet de la maison et bien qu'il fût minuscule chaque fois que j'entrais dans la pièce, je pouvais me laisser aimanter avec une telle force et alors le contempler avec une telle plénitude que, la bonne volonté aidant, il devenait possible de ne voir que lui…

Une chambre d'enfant nous offre la vie avec toute sa puissance. Soyons heureux si elle est très vivante, et rusons avec nous-mêmes pour n'en pas voir ce qui si souvent est secondaire mais que, faisant passer au premier rang, nous avons peine à accepter.

(1) Réactions à la lettre de Mme U. R. Numéro d'octobre 1976.









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