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La vie devant soi

Emile Ajar, Mercure de France, 270 pages.*

Ajar: pseudonyme énigmatique derrière lequel se cache le mystérieux auteur de «La Vie devant Soi». En novembre 1975, lorsque paraît ce très beau livre, on offre à l'écrivain le Prix Goncourt. Il le refuse, se cache, se dérobe. Il n'en faut pas plus pour que toute la presse soit en émoi. Ajar, qui est-il? Pourquoi se cache-t-il? Il court toutes sortes de bruits contradictoires sur son compte. On le traque. Maintenant, un an plus tard on connaît son nom, son visage, son histoire. Il se «raconte» dans son troisième livre «Pseudo» qui éclaire rétrospectivement la lecture de «La Vie devant Soi». Ajar écrit pour ne pas devenir fou. Son roman, c'est une thérapie, un exorcisme, un cri.

«La Vie devant Soi» est une histoire d'amour mais dans le genre sentimental on a rarement écrit plus tragique. «La Vie devant Soi» véhicule toute la peur, toute la misère humaine et en même temps tout l'espoir, toute la tendresse du monde.

Mohammed, dit Momo arrive à l'âge de trois ans chez Mme Rosa, une vieille juive et ancienne putain qui a ouvert à Belleville un «clandé» pour enfants. «Nous étions presque tous des enfants de putes», nous dit Momo. «Au début je n'avais pas de mère et je ne savais même pas qu'il en fallait une.» Durant onze ans, Momo va partager l'existence de Mme Rosa, l'accompagnant avec une fidélité sans faille jusque dans son agonie et sa mort.

A travers les yeux de Momo, le récit se déroule, tour à tour tragique et cocasse et l'on découvre avec quel degré d'intensité douloureuse l'enfant vit cette expérience. Il pose sur sa mère d'adoption un regard d'une lucidité redoutable: «Elle avait les seins, le ventre et les fesses qui ne faisaient plus de distinction, comme chez un tonneau…», puis, comme pour tempérer sa clairvoyance cruelle, il laisse éclater son amour: «Chaque matin j'étais heureux de voir que Mme Rosa se réveillait, car j'avais des terreurs nocturnes, j'avais une peur bleue de me trouver sans elle.» Ou encore: «Je fauchais des bras entiers de mimosa au marché et je revenais à la maison pour que ça sente le bonheur.»

Ils vivent ainsi quelques années, cahin-caha, se soutenant mutuellement, exprimant chacun à sa façon pudique, bourrue, sa tendresse et son amour pour l'autre. Peu à peu, la santé de Mme Rosa se détériore. Momo observe avec une lucidité d'adulte les ravages de la maladie sur ce corps épuisé. Il la soigne, la nettoie, l'habille, la déshabille, assumant avec une noblesse admirable un rôle trop lourd pour lui. Mais de cette misère, de cette mocheté, de cette solitude il en a quelquefois ras le bol. Alors il file, «pas pour me sauver», dit-il, «seulement pour ne plus être là» et il cherche refuge dans son monde magique. «Je commençais à comprendre que la meilleure chose pour moi, c'est d'aller vivre là où ce n'est pas vrai.» Il se recroqueville dans un petit coin et par le rêve «fait venir» ses amis, le clown bleu, la lionne qui défend ses petits, le flic, «le plus fort flic que vous pouvez imaginer. Quand il a mis son bras autour de mes épaules je sentais qu'il allait être un père pour moi». Mais toujours il revient sur terre et court rejoindre Mme Rosa.

Les dernières pages de «La Vie devant Soi» accèdent par leur concision et leur pudeur dans le drame, au sublime. Momo réinvente pour cette femme qui va mourir, les gestes qu'un amant aurait pour sa bien-aimée. Il la pare, la maquille, la parfume, allume des bougies autour d'elle et finalement s'étend à ses côtés pour attendre… l'anéantissement ou le miracle.

Vous le saurez en lisant ce récit admirable au langage et au rythme très particuliers et qui en même temps est un message d'espoir et un remède contre le découragement.



Nous vous rappelons que vous pouvez emprunter des livres à la Bibliothèque des parents à Genève (voir numéro de mars 1977), «La Vie devant Soi» s'y trouve.


* «La vie devant soi» a également été publié à la Guilde du Livre. 28









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