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La presse féminine

Elle. J'ai pris connaissance avec intérêt d'une étude faite par un groupe de travail des Dames de Morges sur la presse féminine (1). Ces dames se sont donné la peine de faire un historique.
Le premier périodique destiné aux femmes date de 1759: c'est le «Journal des Dames». Il était mensuel et avait avant tout des prétentions littéraires: poèmes, épigrammes, récits de voyage, écrits dans le style précieux de l'époque. La mode, telle que nous la connaissons, y tenait fort peu de place.
La forte mortalité des femmes en couches et des enfants en bas âge suscita des conseils d'hygiène. Et puis, on y trouva des théories éducatives, où l'influence de Rousseau restait prépondérante.
Les premières aspirations de féminisme apparurent déjà dans cette période d'avant la Révolution. (Contrairement à ce qui avait été le cas au Moyen Age, la femme ne pouvait plus se produire dans les assemblées et ne pouvait plus, par exemple, être juge, ou avocat, ou procureur).
Ce qui est curieux dans le «Journal des Dames», c'est l'absence totale de toute référence à l'amour conjugal. On s'y moque du mariage comme d'un état ennuyeux et lassant.
Les premiers journaux de mode apparurent en 1785. Ils contenaient beaucoup de publicité pour les marchands de mode, dont on donnait noms et adresses.
A la fin du XVllle siècle apparaît le premier courrier du coeur. Chose curieuse, écrit par un homme et prenant le mariage au sérieux, le voulant aussi heureux que possible.
Au début du XIXe siècle, ce qu'on appelait «la mode» régissait non seulement l'habillement mais encore les sentiments (il fallait être triste pour être à la mode, par exemple) et les attitudes («La mode aujourd'hui est d'aller à l'église et nous en avertissons nos fidèles abonnées une fois pour toutes»).
Peu à peu l'éducation et l'instruction des enfants devint un des éléments importants, et, vers le milieu du XIXe siècle, la presse féminine a trouvé sa forme. Elle ne changera guère.

La presse féminine actuelle

Il semble qu'il y ait actuellement plus ou moins trois types de magazines féminins, suivant le genre de femmes auxquelles ils veulent s'adresser et qui sont les suivants:

- le type de la femme riche, plutôt citadine, séductrice et pour laquelle la beauté est capitale. Elle voyage. Elle s'occupe beaucoup de son corps.

- la femme de la classe moyenne, mère de famille, qui vit plutôt en province, ou à la campagne. C'est l'épouse. Elle s'occupe de son environnement. C'est aussi la ménagère. Elle peut elle aussi voyager.

- les adolescentes. Elles n'ont pas d'argent, ni pour la beauté, ni pour le ménage, ni pour les voyages. Donc pas de publicité. L'évasion se fait par les histoires d'amour entre bergère et prince charmant, et par la vie des vedettes auxquelles on s'identifie.

Lui. Je suis un peu étonné que l'on arrête l'évolution de la presse féminine au milieu du XIXe siècle. Il me semble qu'au cours du XXe siècle elle a pris un développement et une importance de plus en plus grande. Il me paraît faux de déclarer que seuls les périodiques destinés aux femmes riches mettent en vedette la séductrice, la femme belle et qui cherche à plaire. L'évolution de l'économie, le nivellement des classes sociales, la prospérité générale ont eu pour conséquence que toutes ou presque toutes les femmes ont pour ambition d'être élégantes, attirantes, bien proportionnées (la peur de grossir est quasi-universelle!). Il n'est pas non plus exacte que les adolescentes n'ont pas d'argent. Elles en trouvent pour aller applaudir un Johnny Halliday ou pour acheter les disques de leur chanteur préféré. Il me semble que la principale caractéristique de la presse féminine est de cultiver ce désir des femmes d'être séduisantes.

Elle. Vous avez peut-être raison, mais reconnaissez que le rôle de cette presse est terriblement négatif. Elle s'attache à culpabiliser la femme, à lui faire croire qu'elle n'est rien si elle ne soigne pas sa beauté, qu'elle n'est rien si elle n'est pas bonne ménagère, qu'elle n'est rien si elle ne sait pas faire face à tout. On fait tout pour l'obliger à vivre dans une euphorie factice. En un mot cette presse a pour fonction essentielle de manipuler la femme à son insu, de la conditionner.

Lui. Il me semble que vous mettez un peu légèrement la presse en accusation. Il existe sans aucun doute une relation entre la presse féminine et la mentalité, le comportement, la manière de sentir, en un mot la manière d'être de la femme. L'une est le reflet de l'autre. Mais il n'est pas du tout évident que la presse soit le bourreau et la femme la victime.
Si l'on veut bien considérer la chose sous l'angle de l'économie on fait la constatation suivante: le journal ou la revue est une affaire commerciale. Celui qui veut vendre une marchandise doit se préoccuper du «marché», faire ce qu'on appelle du «marketing». Dans le cas qui nous occupe, un journal ou une revue doit offrir ce qui plaît à la clientèle, ce qu'elle réclame, ce qui fait vendre. C'est une vérité première en matière de commerce et on ne voit pas pourquoi elle ne serait pas applicable à la presse féminine. Si la majorité des lectrices en puissance désire surtout savoir comment être belle et séduisante, si elle est avide de connaître la vie des vedettes de cinéma auxquelles elle s'identifie, le rédacteur est certain de faire monter le tirage en relatant, avec tous les détails, les amours de Mireille Matthieu ou de Liz Taylor. C'est le client qui commande et non l'inverse.

Elle. Peut-être. Mais vous ne pouvez pas nier que les publications exercent une influence - et une influence néfaste - sur les femmes auxquelles elles s'adressent.

Lui. Il est évident que le phénomène n'est pas simple car la publicité joue aussi son rôle et le conditionnement par la publicité existe incontestablement. Entre le journal ou la revue et la lectrice se déroule un jeu subtil fait d'actions et de réactions. Mais je ne crois pas qu'on puisse dire que la femme est davantage conditionnée par les publications que ne l'est l'homme par le journal qu'il lit chaque matin en allant au bureau. Chacun a la presse qu'il mérite.

Elle. Si vous avez raison, ce serait à désespérer de l'avenir de la femme et du féminisme.

Lui. Pas du tout. Les choses évoluent et elles évoluent même rapidement. Le temps n'est peut-être pas loin où les tirages de la Presse féminine diminueront et où celui des «Entretiens» montera à 10 000 !


(1) Voir Evelyne Sullerot: Histoire de la Presse féminine, Armand Colin, 1966.









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