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Le Docteur Olievenstein est entré chez nous (1)

Un jour «Olive» - c'est ainsi que ses amis et ses patients appellent le Dr Olievenstein - est entré chez nous; d'une façon discrète d'abord. Ma fille, 14 ans, la première lui a ouvert la porte. Elle avait rapporté à la maison son livre: «Il n'y a pas de drogués heureux», le lisait et m'en parlait. Mais pour moi, Olive n'était encore qu'un prénom. Je voulais le connaître mieux. A mon tour j'ai lu son livre. Mon mari, pour qui adolescence et drogue sont deux, redoutables points d'interrogation, a mis un certain temps avant d'oser l'aborder. Et puis un jour il l'a ouvert. Alors, Olive s'est installé chez nous et, pour un certain temps, y a pris beaucoup de place. Mon mari n'est plus tout à fait le même depuis. Moi non plus. A travers cette lecture commune et les échanges familiaux qui ont suivi, nous avons peu à peu pris conscience de la richesse inépuisable de ce livre, non seulement dans ce qu'il explique mais aussi et surtout dans ce qu'il suggère. Il a été vécu très différemment par chacun et certainement que chacun de vous, lecteurs, y trouvera matière à réflexions personnelles. Je vous livre quelques-unes de celles qui nous sont venues à l'esprit.

«Il n'y a pas de drogués heureux» est pour moi, avant tout, le récit d'une épopée intérieure exemplaire. Le lent cheminement d'un homme vers le dépouillement et la liberté intérieurs, à travers une constante réflexion, une remise en question perpétuelle, un engagement total, est à mes yeux le plus exaltant des récits. Dans un monde où bien souvent l'«appris» recouvre et cimente l'inconscient et l'oblige à suivre un déroulement logique et linéaire, il est bon de se trouver soudain en face d'un homme qui, dès sa jeunesse, éprouve le besoin de chercher «le sens derrière le sens», de «creuser le langage signifiant jusqu'à l'indiscible, jusqu'au non-communicable». Ce sera, si j'ose dire, la démarche constante de son existence. Plus tard à Marmottan, il exhortera les médecins de son équipe à se méfier du savoir et à«essayer d'entendre ce quelque chose derrière eux (les drogués) qu'ils ont à vous dire». «Le savoir, je le respecte, mais il vient après coup, après ce qui est réellement important, la chaleur et l'authenticité de l'écoute, le sens de la dimension réelle d'un individu.»

Ce genre de démarche souterraine suppose une disponibilité qui ne vient pas d'un seul coup; elle est le fruit de mutations successives, parfois très douloureuses et d'une détermination (prise déjà très tôt) de dominer les circonstances, et non pas de les subir. Jamais Olievenstein n'aura donné aux «barrières» de la satisfaction de soi, du pouvoir, de la résignation, de l'habitude, le temps d'ériger un écran entre lui et les autres. A chaque menace, il a infléchi l'événement, prenant la voie la plus difficile, la plus jalonnée d'inconnues afin d'être obligé d'innover, de créer et, par là, de renaître spirituellement et intellectuellement. Pour lui, ne peut soigner les drogués - et les êtres en général - que celui qui s'est dépouillé totalement et radicalement de tout conformisme, respect des normes, des règles et des institutions.

Pour ma fille, qui participe à son temps, ce livre répond à trois questions essentielles que tout adolescent est appelé à se poser:
1) pourquoi, comment peut-on devenir toxico ?
2) qu'est-ce qu'un drogué?
3) comment les soigne-t-on?
A la première question, Olievenstein répond d'abord en citant les cas extrêmes de ceux dont l'enfance et l'adolescence ont été massacrées par des événements atroces. Mais il parle surtout de ceux qui, dans une vie en apparence normale, ne trouvent pas au niveau des adultes une écoute et une attention dignes d'eux ni un intérêt vrai et profond pour leur être et leur devenir. L'absence de communication est le leitmotiv des 6500 jeunes qui ont consulté à Marmottan depuis cinq ans. Interrogez-vous, parents! Combien parmi vous savez encore, avec les années, réinventer la vie pour qu'elle ne soit pas morne; créer de temps en temps un climat de fête pour que vos enfants sentent que leur joie de vivre a un écho; accompagner vos enfants à travers leurs années difficiles sans avoir recours au chantage, à la morale ou à la répression? vaincre vos peurs et vos angoisses pour ne pas les leur coller à la peau: Les questions pourraient se succéder. Sur le millier de parents qu'a reçus le Dr Olievenstein, une quinzaine a accepté de se remettre en cause et de chercher le pourquoi de la drogue chez leurs enfants. Est-ce assez?

A la deuxième question, on peut répondre schématiquement qu'un drogué est un être blessé, chez qui tout le «reçu» s'est effondré, sans qu'il y ait promesse d'autre chose et avant que sa recherche personnelle l'ait fait déboucher sur des valeurs neuves. La drogue, au début, va l'isoler et lui révéler une jouissance foudroyante qui le marque à tout jamais et qu'il va chercher à tout prix à faire revivre mais sans jamais plus y parvenir.

C'est le souvenir de cette extase originelle qui est l'obstacle le plus grand à toute thérapeutique car, s'il est possible de sevrer quelqu'un physiquement, on ne peut presque rien contre sa mémoire. Pour atteindre le drogué là où il est - et c'est la réponse à la troisième question - Olievenstein n'allait pas s'installer dans un système orthodoxe. Il fallait créer un nouveau type de rapport thérapeutique qui tienne compte de ce vécu, afin d'essayer de substituer à cette nostalgie insoutenable d'autres raisons de vivre. C'est l'enjeu de la bataille que le Dr Olievenstein mène depuis tant d'années. De l'avis de mon mari et du mien, son action est encore trop solitaire. Et pourtant on sent qu'elle est la seule bonne, la seule efficace. Elle montre le pouvoir que peut avoir un seul homme s'il est animé de passion, s'il s'engage tout entier et s'il aime vraiment les autres.

(1) «Il n'y a pas de drogués heureux», Dr C. Olievenstein. Ed. Laffont, collection Vécu. 329 pages. Fr. 26.70.









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