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Les « Entretiens sur l'éducation » est un mensuel publié sans interruption depuis plus de 100 ans.
Le site www.entretiens.ch vous offre la possibilité de consulter en ligne ces extraordinaires archives parcourant/ponctuant au jour le jour l'histoire de l'éducation familiale d'un bout à l'autre du XXème siècle.
La survie de la brochure mensuelle imprimée parallèlement à la distribution virtuelle à travers le site est le garant de la poursuite de cette aventure. La rédaction est assurée de façon bénévole par un groupe de parents passionnés par la réflexion et l'écriture autour du vécu familial. Les frais d'impression du journal et la gestion du site (100 000 pages demandées par mois??)....30.- par an (20€).
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En feuilletant notre catalogue

Début novembre. Il fait encore beau mais déjà froid. Ce n'est plus l'automne, mais pas encore l'hiver. Et voilà que ce matin, en relevant le courrier, je me sens projetée au coeur de l'hiver dans ces semaines de fièvre factice qui entourent les fêtes de fin d'année: le catalogue des jouets! Déjà? Quelque chose en moi se révolte. Pourquoi si tôt, pourquoi préparer Noël d'une si mauvaise manière en commençant déjà à exciter l'esprit des enfants? La raison des commerçants: «Achetez le plus vite possible, vous aurez plus de choix, vous éviterez la bousculade des derniers jours!» Raisons valables, certes, mais raisons économiques, c'est tout!
Mes yeux s'attachent à ce catalogue et je pense aux vitrines de Noël déjà prêtes, aux haut-parleurs des grands magasins qui assaillent le client et j'imagine ce qui va se passer à la maison avec Nathalie, quatre ans et Gérard, neuf ans.
- Maman, le catalogue des jouets! Je vais faire des croix sur tout ce que je veux!
- Mais, Nathalie, tu as le temps; Noël n'est que dans six semaines et puis, Noël, ce n'est pas recevoir tous les jouets que tu désires. Tu recevrais même le magasin entier que tu n'en serais pas plus heureuse.
Pour un enfant de quatre ans, six semaines sont aussi longues qu'une vie entière et une pénible impatience commence avec ce catalogue. Nathalie pense qu'il suffit de faire des croix sur un catalogue pour être comblée dans les jours qui suivent.
Je tiens le catalogue dans mes mains et j'hésite. Je le garde? Je le jette? De toute façon, si je le jette, les enfants en trouveront d'autres. Alors, je le garde mais ne le leur montrerai pas encore. J'aimerais tant ne pas leur gâter Noël. Ce sentiment de révolte s'avive en moi. Non, non! Noël, ce n'est pas recevoir tout ce que l'on désire. Le petit enfant nu que nous fêterons à Noël est venu pour apprendre aux hommes à s'aimer et les hommes prennent ce prétexte pour se gaver de plaisirs superficiels. Je suis très troublée dans mon désir de retrouver avec mes enfants l'essentiel de Noël, cet essentiel dont ils sont les premiers à avoir besoin: l'AMOUR, cet amour sans condition qui vient bien avant les jouets, les habits, cet amour qui est la nourriture du coeur, tout aussi vitale que celle du corps.
J'aimerais préserver Nathalie et Gérard de l'engloutissement de leur âme d'enfant, dû aux trop grandes facilités offertes par notre société. Comment agir?
«La grue géante qui marche toute seule; la super-voiture sport qui ne cogne aucun meuble; le jeu de construction raffiné doublé de perfectionnement électrique, etc., etc.»
0 merveille de la technique, éblouissement pour les yeux, magie du mouvement autonome! Mais, enfants du XXe siècle, tu es aussi doué d'imagination, d'esprit créateur, d'envie de chercher, de bâtir, de savoir, de faire par toi-même des expériences; tu ne connais bien que ce que tu as fait de tes propres mains avec la participation de ton intelligence.

Je ne savais pas que ce catalogue entraînerait mes pensées si loin et
je sens se dessiner en moi une ligne à suivre:

- comprendre mes enfants en tant qu'enfants modernes dont la vie est
facile, vivant au milieu de tentations multiples;
- comprendre que ces tentations sont souvent une souffrance pour eux;
- les aider à les surmonter, leur en faire voir le côté factice;
- les orienter sur les jeux et jouets qui leur donneront une satisfaction intérieure, un enrichissement de leur personnalité, une mise en valeur de leurs possibilités;
- leur rappeler qu'ils font partie d'une minorité privilégiée et qu'ils en soient conscients;
- se réjouir avec eux de la vraie valeur de Noël et préparer une fête qui soit une fête d'amour et non seulement un échange d'objets inutiles.

Ces pensées habitant mon esprit, je me sens un peu plus forte.

Le vrai cadeau

Quatre semaines passent. C'est le 15 décembre. Nathalie et Gérard s'impatientent. J'essaie d'être fidèle à moi-même et de leur transmettre ce que je sens.
- Maman, c'est trop long d'attendre encore dix jours!
- Pour vous aider à être patients, voulez-vous que nous préparions la crèche ?
- Oui, oui, où est-elle?
Nous descendons à la cave et trouvons un grand carton avec, en rouge, l'inscription: Crèche - Noël. Le carton est amené à l'appartement par les enfants, la crèche déballée, posée sur le bahut, les petits santons mis à leur place.
- Le petit âne, dit Nathalie, il lui manque une oreille!
- C'est toi qui l'a cassée il y a deux ans, répond Gérard d'un air moqueur.
- Comme c'est triste; il a mal, alors, le petit âne?
- Mais non, rassure le frère aîné d'un air tout à coup protecteur, va chercher un peu de pâte à modeler, je lui ferai une oreille neuve.
Les personnages et les animaux prennent place dans la crèche; elle se met à vivre sous nos yeux et nous sommes là tous trois à regarder quand Nathalie me dit:
- Maman, pourquoi il est tout nu le petit bébé?
- Parce que ses parents étaient pauvres et n'avaient pas de quoi acheter de layette.
- Pourquoi il est couché dans la paille? Ça doit piquer la peau?
- Parce que ses parents n'avaient pas de maison confortable.
- Mais c'est triste alors tout ça? Pourquoi on fait une grande fête puisque c'est triste?
Gérard, du haut de ses neuf ans, écoute, pensif et ajoute:
- C'est vrai, ça, pourquoi?
- Parce que ce petit enfant, malgré sa pauvreté apparente, était riche d'une merveilleuse nouvelle qu'il allait répandre pendant toute sa vie parmi les hommes, les femmes et les enfants de son peuple. Une nouvelle qui allait se répandre sur toute la terre. Cette nouvelle était comme un cadeau, le plus beau que l'on puisse imaginer: Cet enfant est venu pour nous dire:

AIMONS-NOUS!

- C'est ça le cadeau?
- Oui, Nathalie. Imagine que papa et moi nous ne vous aimions pas Gérard et toi, vous seriez très malheureux et vous pourriez recevoir alors les plus beaux jouets, vous seriez quand même très malheureux, car il vous manquerait la chose la plus importante au monde: l'amour. Et ce bébé de Noël est venu sur la terre pour dire à ceux qui l'avaient oublié, à ceux qui se querellent et qui se font la guerre: «Aimez-vous, c'est le vrai sens de la vie!»
Vous comprendrez maintenant pourquoi Noël est la fête de la joie, de la joie que donne l'amour que nous avons les uns pour les autres. D'ailleurs, c'est en souvenir de cela que l'on échange des cadeaux, mais les cadeaux ne sont pas le plus important.
Gérard, devenu sérieux, ajoute:
- C'est vrai, il ne faut pas exagérer…
Gérard et Nathalie se rapprochent un peu de moi. Passe un instant de silence. Nous sommes émus. C'est le 15 décembre. Il n'y a autour de nous ni excitation, ni fausse lumière, ni cadeaux, ni volaille dans le four. Mais le vrai Noël, nous venons de le vivre, nous en avons retrouvé l'essentiel.
L'impatience de Nathalie et de Gérard s'est calmée. Quelque chose de grave mais d'heureux émane de mes enfants. Il me semble qu'ils ont compris.









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