
|
|
Les « Entretiens sur l'éducation » est un mensuel publié sans interruption depuis plus de 100 ans.
Le site www.entretiens.ch vous offre la possibilité de consulter en ligne ces extraordinaires archives parcourant/ponctuant au jour le jour l'histoire de l'éducation familiale d'un bout à l'autre du XXème siècle.
La survie de la brochure mensuelle imprimée parallèlement à la distribution virtuelle à travers le site est le garant de la poursuite de cette aventure. La rédaction est assurée de façon bénévole par un groupe de parents passionnés par la réflexion et l'écriture autour du vécu familial. Les frais d'impression du journal et la gestion du site (100 000 pages demandées par mois??)....30.- par an (20€).
En dehors du grand intérêt pour vous de cette matière exceptionnelle, que vous soyez jeune parent, chercheur dans une université ou simplement intéressé par l'évolution des comportements humains, votre soutien par l'intermédiaire d'un abonnement nous est indispensable.
Pour les pays lointains et si vous ne désirez pas profiter de la version papier, un abonnement sous forme de pdf est accessible au même prix annuel de CHF 30. Il vous donne un accès complet aux archives
En marge de l'année internationale de l'enfant
Le monde au creux de la vague?
Madame Bauer-Lagier, conseiller national genevois, a bien voulu nous donner quelques échos d'une table ronde intitulée: «Le monde au creux de la vague». Elle y a participé dans le courant du printemps 1979 aux côtés de plusieurs personnalités, parmi lesquelles se trouvaient Messieurs Samuel Roller et Claude Pantillon, bien connus dans le domaine de la pédagogie romande.
Monique Lechner. - Madame, vous avez pris part à une rencontre qui avait pour thème «Le monde au creux de la vague», croyez-vous que nos enfants seront engloutis par cette vague?
Madame Bauer-Lagier. - Tout dépendra de l'orientation du «navire»: voilà plusieurs années qu'une vague faite de violence, de préjugés surannés et de désintégration familiale s'élève devant nous. Si les responsables de l'éducation, comme les parents, les éducateurs, les enseignants, n'y prennent pas garde, notre monde court de gros risques.
M. L. - Ne trouvez-vous pas que cette table ronde met une charge très lourde sur les épaules de tous ceux qui s'occupent des enfants?
Mme B.-L. - En Suisse, l'accroissement des divorces et la diminution des mariages font naître une situation nouvelle dont l'enfant pâtit directement. Ailleurs, il est avéré que 750 millions d'enfants, insuffisamment nourris avant leur naissance déjà, ne se développeront jamais normalement. Quant au monde dans lequel les jeunes, privilégiés ou non, sont appelés à grandir, il résonne des mêmes bruits de guerre et de violence qu'autrefois, avec une perspective toute nouvelle, cependant, celle de l'anéantissement possible de toute vie à cause du péril atomique
sans compter que chaque jour qui passe voit se détruire une part des ressources de notre planète, les pays riches gaspillent et les contrées pauvres sont handicapées par une démographie galopante
M. L. - Donc «l'éducation de papa» a fait long feu. L'enfant est appelé à prendre conscience des éléments propres à son avenir d'adulte, et ces éléments, s'ils sont ignorés, peuvent submerger un monde pris de flanc par la vague.
Mme B.-L. - Parfaitement. Actuellement les adultes sont les témoins de tous ces changements. Si les éducateurs ne tiennent pas compte de la «charte des droits de l'enfant» et si ces mêmes adultes continuent à croire que leurs enfants réagissent en tous points comme ils l'ont fait au même âge, comment ceux-ci pourraient-ils devenir des personnes à part entière, dans un monde tout différent de celui de «grandpapa»?
M. L. - Donc l'éducation moderne doit changer de cap et présenter à la vague dangereuse la proue du bateau et non son flanc. Dites-moi, chère Madame, quelle manoeuvre la table ronde nous propose-t-elle face à la vague?
Mme B.-L. - Jusqu'à ce jour, l'accent a été mis sur les qualités intellectuelles plus que sur celles du coeur et de l'âme. Le sens du sacré se perd alors qu'il est aisé de le développer chez l'enfant dès son plus jeune âge. Cette promotion de l'intellect conduit à une sorte de déshumanisation. Tout en favorisant la désintégration sociale elle a avivé les conflits entre les êtres ou les groupes sociaux. Il est vrai que le respect d'autrui tend constamment à s'amenuiser: la compétition intellectuelle et la chasse aux performances physiques exagèrent souvent des sentiments de supériorité.
M. L. - Est-il exact, également, que certaines particularités ou infirmités physiques ou mentales prêtent couramment à la dérision chez les jeunes? Comment remédier à cet état d'esprit?
Mme B.-L. - Le remède? Il est difficile à administrer sans la participation active des adultes qui vivent selon un idéal de liberté, inspiré par une fraternité active et directe. Autrement dit, cette table ronde a remis en évidence la nécessité de préserver l'avenir de notre planète en recommandant aux éducateurs de signer avec tous les êtres vivants et avec la nature le seul traité de paix qui permettra au bateau de présenter à la vague une proue victorieuse. L'environnement humain et naturel sera sauvegardé par la mise en oeuvre d'une solidarité exemplaire à laquelle les enfants seront éveillés le plus tôt possible.
M. L. - Autrement dit, les «forts en thème» et les «bêtes à concours» ne seront plus seuls au palmarès de la vie; ils voisineront avec tous les êtres de bonne volonté, avec tous ceux qui voudront sauver le monde futur. Espérons que nombreux seront les hommes chez lesquels les dons de l'esprit, du coeur et de l'âme seront en parfaite harmonie
Parents et éducateurs, au travail! Et permettez-moi de vous souhaiter, chère Madame, de pouvoir exercer votre excellente influence longtemps encore au sein des autorités de notre pays.
|
|
|