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L'image de l'enfant dans la société actuelle
L'une de nos lectrices a assisté l'automne dernier à une soirée organisée par le CIFERN (Centre d'informations familiales et de régulation des naissances à Genève) qui inaugurait ses nouveaux locaux. A cette occasion elle a entendu et apprécié l'allocution prononcée par le directeur scientifique de cette institution: Le Dr Willy Pasini. Le Dr Pasini est professeur-assistant à la Faculté de médecine de Genève. Il a bien voulu remettre une copie de son texte à notre lectrice et nous autoriser à en publier quelques passages. Voici aujourd'hui le premier des deux extraits que nous nous proposons de vous transmettre.
Tout en restant une dimension importante de la personnalité, la maternité n'est plus le seul mode de réalisation de la femme. De ce fait, la régulation des naissances devient une exigence, même si le rapport au désir d'enfant s'est profondément modifié.
Autrefois, on commençait par faire des enfants et on terminait par la contraception. De nos jours, on commence par la contraception et on termine peut-être par faire des enfants. La vieille question qu'on posait au Centre de planning était: «Comment ne pas avoir un enfant non-désiré?» question somme toute assez facile. De nos jours, la nouvelle question est: «Pourquoi avoir des enfants?» interrogation bien plus difficile, qui a des retombées sur la démographie et qui, dans cette année internationale de l'enfance, nous oblige à réfléchir au statut social de l'enfant. Dans la famille traditionnelle, il remplissait d'abord une fonction économique de main-d'ceuvre bon marché. Il était aussi une sorte d'assurance-vieillesse, il assurait l'héritage de la famille et la continuité du clan. Or, nous assistons aujourd'hui à un changement radical, à une inversion historique, dans la mesure où l'enfant a de moins en moins un poids économique et social pour le groupe et ne prend une nouvelle valeur que par rapport au couple. L'enfant aujourd'hui se privatise et il prend un sens par les gratifications affectives qu'il apporte au couple. Pour le dire avec un slogan, on est passé de l'enfant-capital à l'enfant-gratuité.
Ce nouveau rapport de l'enfant au couple constitue une véritable révolution copernicienne. Auparavant, les gens se mariaient pour avoir des enfants et le couple se définissait par la fonction procréatrice en trouvant ainsi une sorte de conformité entre leur désir et le besoin du groupe. Aujourd'hui, nous assistons à la situation inverse, dans la mesure où ce n'est plus l'enfant qui définit le couple, mais c'est plutôt le couple qui va choisir le sens qu'il va donner à l'enfant. De plus en plus de couples évaluent leur capacité d'être ensemble avant de penser à l'arrivée d'un enfant et parfois ils ont peur que celui-ci vienne modifier l'équilibre acquis. Ceci amène à une réalité paradoxale, dans la mesure où cet enfant qui dispose une fois né de beaucoup de droits et de privilèges, voit en même temps son «droit à naître» devenir plus fragile.
Nous assistons aussi à une autre tendance qui a inversé les rapports entre sexualité et procréation. Auparavant, avoir des enfants était un devoir social et le plaisir sexuel était tabou; aujourd'hui, faire l'amour est devenu plus ou moins obligatoire et faire des enfants est en train de devenir tabou au point que l'on assiste à une sorte d'«enfantement sous condition».
Dans un centre de planning familial, il faudra toujours tenir compte du statut psychologique et social de l'enfant, car il sera une excellente clé de compréhension pour des nombreuses demandes d'interruption de grossesse, des oublis incompréhensibles de la pilule contraceptive, voire des effets secondaires mal expliqués sur le plan médical.
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