Entretiens sur l'éducation : historique du journal

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Les « Entretiens sur l'éducation » est un mensuel publié sans interruption depuis plus de 100 ans.

Le site www.entretiens.ch vous offre la possibilité de consulter en ligne ces extraordinaires archives parcourant/ponctuant au jour le jour l'histoire de l'éducation familiale d'un bout à l'autre du XXème siècle.

La survie de la brochure mensuelle imprimée parallèlement à la distribution virtuelle à travers le site est le garant de la poursuite de cette aventure. La rédaction est assurée de façon bénévole par un groupe de parents passionnés par la réflexion et l'écriture autour du vécu familial. Les frais d'impression du journal et la gestion du site (100 000 pages demandées par mois??)....30.- par an (20€).
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Une chambre en ville

Au féminin

Cette fois ça y est: elle déménage. Au propre et au figuré. Elle lit les petites annonces, téléphone aux Agences immobilières et discute des heures durant au bout du fil avec sa copine Nathalie. Vous vous préparez à l'inévitable. Claudine, votre fille aînée, 20 ans, salariée et vaccinée, va quitter le foyer familial. Elle l'a répété depuis des mois sur tous les tons, ceux de la colère les jours d'orage, dans l'affirmation de soi quand elle tirait des plans sur l'avenir.
La liberté de faire ce qu'on veut, sans dire oÃ¹ on va et avec qui, la liberté de rentrer tard, de traîner en pyjama, de ne pas ranger sa chambre, de ne plus participer aux réunions de famille. Plus de contraintes, la paix royale, la liberté, quoi! Pas de Jules. Entre filles et avec Nathalie, l'amie de tous les instants depuis l'enfance. Une fille sérieuse que vous aimez bien, encore une chance… Quant au reste, il faudra vous y faire, vous avez quatre enfants!
Une fois le tohu-bohu affectif apaisé, les revendications épuisées, du style: quand on pense à tout ce que nous avons fait pour notre fille, les difficultés partagées, les angoisses au moment des examens, les démarches pour trouver une situation, les nuits sans sommeil, etc., quand l'emporte la conviction raisonnable que la vie est mouvement et que l'on n'empêche pas les jeunes de faire leurs expériences, vous allez découvrir quelques aspects très agréables de cette nouvelle situation: une certaine liberté pour vous aussi: moins de lessive, moins de repassage, une facture de téléphone singulièrement allégée, la possibilité de réorganiser votre appartement avec une chambre de plus et pour finir, cadeau, cadeau: des relations meilleures avec votre fille, sans drame ni passion, enfin des échanges adultes, des services que l'on vous demandera avec égards du genre:
- Je pars trois jours, me prendrais-tu le chat?
- Viendrais-tu arroser mes plantes pendant les vacances?
Ou bien un coup de téléphone angoissé parce qu'on est malade, que Nathalie a un petit ami sérieux, qu'elle va sûrement lâcher sa co-locataire, et puis le final:
- Quand est-ce que je peux venir à la maison vous présenter mon futur époux?

Au masculin

Chercher un appart. au masculin, cela signifie généralement qu'il y a une fille sous roche, si j'ose cette métaphore. Pas folle la guêpe, si j'ose encore celle-là. On ne quitte pas la maison sans motif. Le giron maternel, même possessif, c'est l'assurance de la table garnie, les boutons recousus, les chaussettes raccommodées et une oreille attentive à tous les récits. Comme les mères sont folles de leur fils, c'est bien connu, il est rare qu'elles les poussent dans des traquenards. Au contraire, elles s'y connaissent généralement bien en stratégies féminines et leurs conseils peuvent être utiles, surtout au début.
- Ne téléphone pas le premier, n'écris pas trop souvent, ne t'engage pas trop vite, mets-la à l'épreuve, etc.
Pas toujours commodes, les génitrices: tigresses, si la belle est une coquette ou une frivole, elles ont le coeur qui fond devant la timide ou la sentimentale. Jamais elles ne diront assez que leur fils est un type bien qui mérite la plus charmante, qu'il a été élevé dans le respect de la femme et que celle qui en héritera tirera le bon numéro.
Que le fils cherche un appart. pour nicher avec sa dulcinée, la mère fera jouer toutes ses relations pour trouver un studio au n-ème étage, aéré, grand balcon-cuisine intégrée. Elle sait ce qui convient à son grand: du soleil, de l'espace pour déplier son mètre quatre-vingt et à proximité de l'Uni, du bureau ou de l'atelier, pour éviter les déplacements en mob sous la pluie. Tout vaut mieux que les retours aux aurores dans les frimas et sans écharpe.
Qu'une autre se charge des tâches ancillaires, ce n'est pas ce qui l'inquiète, elle ne craint pas les comparaisons. Personne ne réussit comme elle la tarte aux pommes et ne remplace aussi bien les fermetures éclair. Que son rejeton en ait soupé de ses exploits domestiques, elle ne l'envisage même pas!
Tellement sûres d'elles, les mères ont beaucoup à apprendre du départ de leur fils. Entre mère et fille la connivence féminine finit toujours par jouer. Mais que le fils s'épanche ailleurs, demande conseil ailleurs, s'épanouisse sous un autre regard, il n'est pas sûr qu'à un moment donné la mère ne se sente pas dépossédée, virée, larguée.
Osera-t-elle seulement téléphoner à l'appart. que son fils partage avec l'Â«autreÂ»?

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