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Les « Entretiens sur l'éducation » est un mensuel publié sans interruption depuis plus de 100 ans.
Le site www.entretiens.ch vous offre la possibilité de consulter en ligne ces extraordinaires archives parcourant/ponctuant au jour le jour l'histoire de l'éducation familiale d'un bout à l'autre du XXème siècle.
La survie de la brochure mensuelle imprimée parallèlement à la distribution virtuelle à travers le site est le garant de la poursuite de cette aventure. La rédaction est assurée de façon bénévole par un groupe de parents passionnés par la réflexion et l'écriture autour du vécu familial. Les frais d'impression du journal et la gestion du site (100 000 pages demandées par mois??)....30.- par an (20€).
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L'exemple et la révolte

On lit dans Plutarque cette anecdote touchant le philosophe Speusippe, qui était le fils d'une soeur de Platon. C'était, dans sa jeunesse, un garçon colérique et dissolu, qui faisait bon marché de tous ses devoirs. Comme il ne pouvait souffrir les justes admonestations de ses parents, il fut envoyé chez son oncle Platon.
Platon le reçut dans sa maison; ne lui fit subir ni reproches ni contrainte, mais se contenta de lui donner tranquillement, jour après jour, le spectacle de sa propre vie aussi exempte d'emportement que de débauche. Ainsi, il lui inspira la honte de sa conduite, si bien que Speusippe conçut pour son oncle une grande admiration, désira l'imiter, et finit par s'enflammer de zèle pour la philosophie.
Des amis, cependant critiquaient Platon, de ce qu'il ne corrigeait pas un jeune homme si insolent et si plein de morgue.
«Mais, répondait-il, je le corrige bel et bien; je ne saurais mieux faire pour cela que de lui montrer, jour et nuit, par ma manière de vivre, la différence qu'il y a entre une conduite honnête et des moeurs méprisables.»
L'anecdote de Plutarque est fort jolie et mérite d'être gardée dans des tablettes sur l'éducation. Elle illustre le rôle éminent de l'exemple, plus fort que toute contrainte, et qui par surcroît ne se manifeste pleinement que là où il n'y a nulle contrainte.
Mais Platon n'était que l'oncle de Speusippe. Des parents auraient-ils pu se comporter ainsi? Les parents, dans l'éducation des premiers âges, peuvent-ils renoncer à toute contrainte? Il ne semble pas; car cette éducation-là comporte une part inévitable de dressage.
A y regarder de plus près, on dirait que les mêmes causes peuvent produire des effets contraires: affaire de quantité sans doute; mais cela complique bien l'éducation.
Un proverbe bien connu assure: «Tel père, tel fils»; et c'est la part de l'exemple. Mais un proverbe allemand insinue qu'il n'est pas de pires chenapans que les fils de pasteurs: c'est la part de la révolte.
Lorsqu'on analyse des cas concrets, on trouve communément, chez le même sujet, les deux réactions juxtaposées. A un moment, l'enfant n'a rien rêvé de plus beau que de devenir comme son père, ou comme sa mère; à un autre moment, il a voulu être tout au monde, plutôt que cela. Par la suite, les deux ambitions ont continué de vivre sourdement en lui, l'une poussant l'autre, l'une se nouant à l'autre, formant avec elle, les combinaisons et les compromis les plus ingénieux. La révolte l'emporte sur l'exemple lorsque la contrainte a été trop forte; mais si elle a été trop lâche, il n'y a plus d'éducation du tout.
Ce qui empêche la loi de l'exemple de pleinement jouer, de parents à enfants, c'est sans doute d'abord la proximité. Mais c'est aussi qu'il y a communément dans les parents un trop vif désir de voir leurs enfants leur ressembler, de se continuer en eux. Voilà ce dont il faudrait se garder car cela pourrait bien être ressenti par l'enfant comme la pire des contraintes. Mais comme ce désir des parents est des plus naturels, comme l'impatience de l'enfant et sa soif d'indépendance ne le sont pas moins, il ne semble guère qu'on puisse éviter entièrement le conflit; on peut l'amortir.
Tout en éducation est jeu de forces, diverses et contraires, dont les résultantes diffèrent du tout au tout.
On conçoit la boutade de Freud: «En matière d'éducation, de quelque manière qu'on s'y prenne, on s'y prend toujours mal.»
Mais il ne faut pas l'entendre dans un sens décourageant; à force d'études et de soins, on finira par s'y prendre le moins mal possible; et si le résultat n'est pas excellent, on garde la ressource de se dire, que le contraire eût sans doute été pire!
La première vertu de l'éducateur est de savoir se donner beaucoup de peine, et quant au résultat, se contenter de peu.
Comme le paysan. Ce n'est pas sans raison qu'on parle de «culture»!
Pourquoi la substance humaine serait-elle moins ingrate que la terre? Comme au paysan, il lui est loisible, pour se soulager, de maugréer contre les intempéries. Et tous les temps sont intempéries, au paysan. Mais tout en maugréant, et sans vouloir l'avouer, il sait bien que «ça vaut la peine».
Et la deuxième vertu de l'éducateur, c'est de ne pas tenir rigueur à son disciple, s'il ne le trouve pas tel qu'il l'a voulu. Car cela suffirait à gâter ce peu qu'il a obtenu, et qui après tout est beaucoup.









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