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Janusz Korczak: «Comment aimer un enfant»

En novembre 1987 quelque trois cents personnes participaient à Genève au quatrième colloque de l'Association suisse des amis du Dr Korczak sur le thème: «Comment parler à un enfant». ll nous a paru intéressant de faire plus ample connaissance avec ce pionnier de l'éducation en publiant quelques extraits de son livre «Comment aimer un enfant», recueillis pour nous par Sylvie Gabus. Ils nous font découvrir à la fois le poète et l'éducateur aux idées révolutionnaires pour son époque.
Janusz Korczak, né en 1879 dans une famille juive polonaise, deviendra au fil des ans et de ses études de médecine un pédiatre renommé. Ecrivain, poète, journaliste, il se révèle avant tout un pédagogue et un éducateur de génie, même si ces termes ne lui plaisaient guère.
Il n'était d'ailleurs pas toujours tendre avec ces derniers. «Combien souvent la lourde patte de l'éducateur brigue naïvement l'honneur de jouer sur l'esprit subtil de l'enfant. ll savait aussi les remettre à leur juste place: «Sois toi-même. Cherche ta propre voie. Apprends à te connaître avant de prétendre connaître les enfants. »
Pour lui l'enfance n'est pas une période, mais un état. «Enfant? Adulte? ll y a seulement des êtres humains». L'enfant est un être à part entière, et pas un homme en devenir. Il faut l'aimer pour ce qu'il est, pour ce qu'il peut et veut être, pas pour ce que nous aimerions qu'il devienne.
Les adultes ont tendance à faire de l'enfance un monde «sous-développé» en marge du leur. L'enfant n'a pas sa place dans notre société et cette dernière n'est conforme ni à ses désirs, ni à ses besoins. C'est une des raisons pour lesquelles Korczak créa à Varsovie une maison de l'orphelin, conçue tout spécialement pour les enfants destinés à y vivre.
Homme de terrain, de pratique, Korczak n'avait que faire de plates théories et prêchait plutôt l'éducation par l'amour et le respect. Aussi opposé à l'autoritarisme qu'à la permissivité - ressentie par l'enfant comme de l'indifférence - il les laissait s'épanouir dans le respect et l'amour mutuels, mais aussi dans la rigueur du travail. Chaque enfant participait aux tâches quotidiennes, à l'organisation de la vie sociale et s'en trouvait valorisé. «Korczak nous laisse une incomparable leçon d'humanité, en même temps qu'une vision de l'éducation assez révolutionnaire pour nous faire encore rêver à l'aube du XXIe siècle».


A l'enfant: «Fais tes expériences»

(…) Une porte: attention aux doigts: une fenêtre: il risque de tomber dans la rue; un noyau: il va s'étrangler en l'avalant de travers; une chaise: il la renversera sur lui; un couteau: il se coupera le doigt; un bâton: il risque de perdre un oeil ; une boîte: c'est plein de bactéries; des allumettes: l'incendie, la mort par brûlures…
Si, t'ayant crue, l'enfant n'a jamais essayé de manger en cachette une livre de prunes à moitié vertes; si, le coeur battant, ayant réussi à tromper la surveillance, il n'a pas, dans un coin obscur, frotté une allumette; si, obéissant, confiant, passif, il se soumet à ton exigence de renoncer à toute expérience, à tout effort de volonté, que fera-t-il le jour où, dans son être profond, il ressentira une de ces choses qui blessent, qui brûlent, qui agressent?
- Ne cours pas, il y a des voitures qui passent; ne cours pas, tu vas transpirer; ne cours pas, tu vas te salir; ne cours pas, j'ai mal à la tête. (Tant d'interdictions, alors qu'en principe nous permettons à l'enfant de courir; c'est même la seule chose qui lui soit vraiment permise lorsqu'il veut se sentir vivre.)
Et les roues de cette machine infernale tournent ainsi de longues années pour réduire en miettes la volonté, l'énergie de l'enfant, pourvoir partir en fumée toutes les ressources de son être.
Ne cherchons pas à prévenir chacun de ses gestes; ne lui indiquons pas son chemin à la moindre de ses hésitations; n'accourons pas à l'aide lors de son plus léger trébuchement. N'oublions pas: nous pouvons ne plus être là au moment où il aura à livrer ses plus durs combats.
Que sa volonté toute fragile se mesure avec la force des passions, qu'il y succombe souvent: c'est dans ces escarmouches avec sa propre conscience que doit s'exercer et croître sa résistance morale.
Celui qui ne s'égare pas dans son enfance; qui, surveillé et protégé, n'apprend pas à s'empoigner avec la tentation, sera un jour un être moralement passif.

A l'éducateur: d'abord: «Connais-toi toi-même»

Sois toi-même. Cherche ta propre voie. Apprends à te connaître avant de prétendre connaître les enfants. Mesure les limites de tes capacités avant de fixer celles des droits et des devoirs des enfants. Parmi tous ceux que tu pourrais avoir à comprendre, élever, instruire, tu viens en premier; c'est par toi qu'il te faut commencer.
C'est une erreur de croire que la pédagogie est une science de l'enfant et non pas de l'homme.
Dans un moment d'emportement, un enfant violent frappe; un adulte violent tue. A un enfant candide on soutire son jouet; à un adulte naïf on fait signer des traites. Un enfant déraisonnable dépense en bonbons l'argent du cahier; un adulte irresponsable dilapide au jeu son patrimoine. Enfant? Adulte? Il y a seulement des êtres humains. Seule existe une différence d'échelle entre les idées, les sentiments, les impulsions, les expériences de chacun d'eux. N'oublie pas que nous ne les connaissons pas.
Sois ce que tu es et observe attentivement les enfants lorsqu'ils peuvent être vraiment eux-mêmes. Observe-les, mais ne leur demande rien. Car tu ne parviendras jamais à transformer un enfant turbulent ou agressif en enfant recueilli et tranquille. Jamais celui qui est méfiant et sombre ne deviendra franc et expansif, pas plus qu'un enfant ambitieux et têtu ne deviendra doux et soumis.
Et toi-même?
Si ton allure n'est pas imposante, ni ta poitrine puissante, en face d'une bande qui chahute tu userais en vain de la parole. As-tu un sourire doux et un regard patient? Alors, ne dis rien. Peut-être se calmeront-ils d'eux-mêmes? Cherche ta propre voie.

L'enfant et l'éducateur

Nous écrasons l'enfant de notre autorité et exigeons de lui respect et reconnaissance. Il nous les montre, mais à sa manière.
L'enfant te respecte parce que tu portes une montre; parce que tu reçois des lettres de l'étranger; parce que tu as le droit d'avoir sur toi des allumettes et de te coucher tard. Il te respecte parce que tu signes ton nom avec de l'encre rouge; parce que tu disposes d'un tiroir fermant à clef; parce que tu jouis de tous les privilèges de l'adulte. Mais il t'estime beaucoup moins pour ta culture qu'il soupçonne toujours d'être incomplète: «Et le chinois, vous le parlez aussi? Savez-vous compter jusqu à un milliard?»
L'éducateur raconte de belles histoires, mais le concierge ou la cuisinière en connaissent de plus belles encore. L'éducateur sait jouer du violon, mais il n'entend rien aux règles du jeu du base-ball.
Il y a des enfants candides prêts à croire tout ce qu'on leur dit, mais il y en a d'autres, doués d'un esprit critique: ceux-là, ni notre esprit ni notre autorité morale ne les impressionnent. Les adultes? Ils ne font que mentir, tricher; ils se servent de prétextes indignes, sont hypocrites. S'ils ne fument pas de cigarettes en cachette, c'est uniquement parce qu'ils peuvent le faire au grand jour. Ils ne font que ce dont ils ont envie.
Plus tu te prends au sérieux, plus il t'évite; plus tu cherches à lui en imposer, plus il t'échappe. Mais, si tu ne t'es pas rendu complètement ridicule à ses yeux, si tu n'es pas complètement gâteux, si tu ne t'efforces pas bêtement de rentrer dans ses bonnes grâces… il te respectera à sa manière.









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